Intervention de Rudy Salles

Séance en hémicycle du 12 juin 2014 à 9h30
Lutte contre l'apologie du terrorisme sur internet — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRudy Salles :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, qu’elles concernent le territoire national ou les ressortissants français à l’étranger, les menaces terroristes qui pèsent sur la France sont, hélas ! bien réelles.

Pour combattre le terrorisme, nous disposons d’un arsenal juridique reconnu par nos voisins européens pour sa pertinence. Cela, nous le devons aux gouvernements successifs qui ont su, pendant de nombreuses années, mesurer toute l’importance de ce fléau et anticiper les menaces qu’il fait peser sur notre pays. Pour autant, le terrorisme, ses caractéristiques et ses causes évoluent. Sans conteste, ces mutations rendent nécessaire une adaptation de notre législation.

Le terrorisme d’aujourd’hui résulte essentiellement du djihadisme, de l’embrigadement d’individus souvent jeunes qui, à l’issue de parcours de radicalisation souvent liés à des passages en prison ou à des séjours à l’étranger dans des camps d’entraînement, décident de passer à l’acte. Au 30 mai 2014, près de 320 individus, français ou résidant en France, combattaient en Syrie, 140 individus étaient repérés comme étant en transit pour rejoindre ce pays et un nombre équivalent était reparti de Syrie pour la France ou pour un pays tiers. Malheureusement, on dénombrait déjà une trentaine de morts au cours de combats en Syrie ou en Irak.

Cette radicalisation a été nourrie, encouragée, voire est née sur internet, à travers des sites faisant la propagande de la violence, notamment du djihad. Les individus basculent peu à peu de l’intégrisme au terrorisme actif, souvent à l’insu de leurs proches, et sans montrer un quelconque signe extérieur de radicalisation. De nombreuses photos ou vidéos faisant la propagande du terrorisme, voire montrant des scènes de décapitation, circulent sur internet, notamment sur les réseaux sociaux, où leur coefficient de diffusion est démultiplié.

Face à cette menace croissante, il est urgent d’adapter notre législation pour donner à l’État, à nos forces de police et à nos magistrats toutes les armes et tous les moyens de détection, d’identification et de répression dont ils ont besoin pour lutter efficacement contre le terrorisme. Aussi, nous saluons l’initiative du rapporteur Guillaume Larrivé et de ses collègues de déposer une proposition de loi qui renforce l’arsenal de prévention et de répression, tout en adaptant les instruments juridiques à notre disposition.

Certes, des dispositifs ont déjà été mis en place pour lutter contre l’apologie du terrorisme sur internet. Je pense notamment à l’Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication, l’OCLCTIC. En 2013, l’Office recevait près d’un signalement de site de propagande terroriste par jour. Un autre acteur dans la lutte contre l’endoctrinement est la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires, la MIVILUDES. L’action de ces organismes ne suffit cependant pas à faire face à l’ampleur qu’a prise le phénomène de propagande ces derniers temps. Mener une action à la fois répressive, curative et surtout préventive est devenu une urgence.

Le texte que nous examinons aujourd’hui fait à cet égard plusieurs propositions louables et utiles. Tout d’abord, il vise à permettre à l’autorité administrative de bloquer l’accès à des pages internet faisant l’apologie du terrorisme en s’inspirant du dispositif adopté en matière de lutte contre la pédopornographie. Ce dispositif de blocage sera vraisemblablement de nature à fortement diminuer la visibilité des sites faisant l’apologie du terrorisme.

Les auteurs du texte proposent ensuite de créer un délit permettant d’incriminer toute personne qui consultera de manière habituelle des sites internet qui provoquent au terrorisme ou en font l’apologie et qui diffusent à cette fin des images d’actes terroristes d’atteinte à la vie. Le ministre a indiqué en commission ses réticences quant à une mesure qui pourrait se révéler être une violation disproportionnée de la liberté d’opinion et de communication. Nous notons cependant que la procédure pénale applicable sera adaptée, afin de la rapprocher du droit commun et, ainsi, de respecter au mieux les droits et libertés constitutionnellement garantis.

Enfin, nous approuvons la proposition d’élargir les moyens de « cyber-patrouilleurs » afin de permettre, en matière de police judiciaire, d’effectuer surveillance, infiltration, sonorisation et captation de données informatiques lors de l’enquête de flagrance ou de l’enquête préliminaire.

Pour rejeter ce texte, la majorité a prétexté des difficultés techniques et a invoqué le plan de lutte contre la radicalisation violente et les filières terroristes, présenté par le Gouvernement le 23 avril dernier, ainsi que vous l’avez rappelé voilà quelques instants, monsieur le secrétaire d’État. Ce plan est bien évidemment nécessaire et nous l’approuvons dans son principe. Nous notons en outre que certaines mesures rejoignent celles de la présente proposition de loi. Je pense notamment à la généralisation de l’enquête sous pseudonyme et aux mesures favorisant la suppression rapide des contenus illicites et des sites de recrutement. Pour autant, en adoptant cette proposition de loi, nous pourrions aller plus loin,…

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