Si, en matière d'expatriation, la France est en retard par rapport à ses concurrents, on observe toutefois un allongement de la durée du séjour et une augmentation du nombre des départs : le nombre des Français à l'étranger est donc destiné à augmenter rapidement et de manière quasi mécanique.
Deux raisons de nature conjoncturelle participent de ce double mouvement : la situation économique française qui s'installe dans la durée et l'attraction de revenus plus élevés à l'étranger – en effet, soit les salaires y sont plus élevés, soit le revenu net après impôts y est plus avantageux. Il faut également noter les difficultés rencontrées par les jeunes pour accéder à un logement intermédiaire dans nos grandes métropoles, notamment dans la métropole parisienne, difficultés qui amoindrissent l'attractivité de notre pays.
Quant aux éléments structurels favorisant la mobilité, il faut souligner la mondialisation et la transformation de la nature des contrats. En 2003, 38 % des Français de l'étranger travaillaient pour la fonction publique ou des organisations non gouvernementales : ils ne sont plus aujourd'hui que 20 %. Les contrats d'expatriation sont de plus en plus souvent remplacés par des contrats locaux, ce qui modifie le rapport à la mère patrie. Enfin, les moyens de communication modernes permettent désormais de rester en liaison très étroite avec sa famille, ce qui n'était pas le cas il y a quarante ans et modifie le ressenti culturel de l'expatriation.
Notons aussi que les premiers à faire du France bashing sont nos compatriotes. Les jeunes qui vivent à l'étranger ne cessent de souligner combien ils sont soulagés de n'avoir pas à vivre en France à l'heure actuelle. C'est pourquoi nous allons approfondir l'enquête sur ce qui représente à nos yeux un sujet de préoccupation majeur, en instaurant notamment une veille attentive : la CCI de Paris-Île-de-France a signé un accord avec l'Union des chambres de commerce et d'industrie françaises à l'étranger – UCCIFE –, en vue d'instaurer un baromètre permettant d'observer et de mesurer la réaction, les attentes et la vision des ressortissants français dans les principaux pays d'expatriation. Ce serait une erreur de freiner les départs : il convient même de les encourager en les facilitant. Ne disons pas à ceux de nos compatriotes qui ont choisi de partir qu'ils trahissent leur pays, mais demandons-leur d'en devenir les ambassadeurs. Trop souvent, en raison des tracasseries administratives qu'ils ont dû surmonter pour partir, ce n'est pas sans amertume que les candidats à l'expatriation quittent la France.
Il faut également faciliter leur retour, sur le plan des démarches administratives ou du logement. Il est primordial pour la mère patrie de nouer un lien très fort avec ses expatriés.
Il convient d'intégrer la diaspora française, qui compte aujourd'hui quelque 2 millions de compatriotes et est destinée à augmenter : considérons ceux qui s'installent durablement, voire définitivement à l'étranger, comme autant d'atouts pour notre pays. C'est ce que font l'Allemagne de manière évidente, l'Italie de manière plus discrète et le Royaume-Uni sur le plan culturel. Les exécutifs de la compagnie Emirates Airlines ou de la compagnie d'Abou Dabi comprennent de nombreux Britanniques. Certes, ils sont indépendants et sont loin du Royaume-Uni : ils n'en portent pas moins l'influence de leur pays. C'est pourquoi nous avons l'intention de proposer au ministre des affaires étrangères de travailler à l'acculturation de la diaspora afin de l'embarquer dans l'« entreprise France ».
Il convient enfin de renforcer, dans la compétition internationale pour les talents, la position déjà favorable, voire envieuse, de la France, notamment de la région capitale. Il faut donner le sentiment à ceux qui arrivent en France qu'ils sont les bienvenus. Les universitaires étrangers et leur famille sont mieux accueillis, s'agissant notamment du logement, dans les universités américaines que dans les universités françaises.