Intervention de Christian Eckert

Réunion du 11 juin 2014 à 12h15
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Christian Eckert, secrétaire d'état chargé du Budget :

Nous avons trouvé, en 2012, une situation économique, financière et sociale particulièrement dégradée : une croissance à l'arrêt, des finances publiques dans une situation significativement défavorable, un niveau de dette publique sans précédent en temps de paix, à près de 90 % de la richesse nationale, un taux de chômage sur une trajectoire de forte augmentation et des inégalités nourries par une décennie de mesures fiscales favorables aux ménages les plus aisés.

Dès l'été 2012, le Gouvernement et la majorité ont mis en oeuvre un ensemble de mesures destinées à remédier à ce constat, menant, d'abord, un effort de réduction du déficit public qui a été qualifié de considérable par la Cour des comptes. L'assainissement des finances publiques est indispensable pour garantir le financement de notre modèle social. Les mesures des lois de finances successives ont permis de réduire, dès la fin de l'année 2013, le déficit structurel à un niveau proche de son plus bas depuis 2002 : en dix-huit mois, les déséquilibres budgétaires accumulés ont fortement diminué.

Le Gouvernement et la majorité ont également mis en oeuvre des mesures destinées à renforcer la progressivité du système fiscal. L'impôt de solidarité sur la fortune a été rétabli après la réforme de 2011 qui l'avait vidé de sa substance. Les droits de succession et de donations ont été relevés afin de revenir sur les évolutions votées dans le cadre de la loi « TEPA ». Une tranche d'imposition sur le revenu à 45 % a été instaurée. En parallèle, le gel du barème de l'impôt sur le revenu, décidé pour deux ans par le précédent gouvernement, a été compensé pour les ménages les plus modestes par le renforcement de la décote et du revenu fiscal de référence ouvrant droit à des exonérations ou minorations d'impôts locaux et de prélèvements sociaux. Enfin, dans le but de soutenir la croissance et l'emploi, un nombre important de leviers ont été mobilisés au cours des deux premières années de la législature.

Outre le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi – CICE –, qui allège le coût du travail de 20 milliards d'euros en année pleine et doit soutenir l'emploi et l'investissement productif, je tiens à rappeler tout un ensemble de mesures dont, notamment, pour la croissance, le nouveau programme d'investissements d'avenir – PIA – d'un montant de 12 milliards d'euros, et, pour l'emploi, la mise en oeuvre des contrats d'avenir et des contrats de génération.

L'objectif de cette politique économique et budgétaire est donc clairement défini : soutenir la croissance et l'emploi dans un contexte économique particulièrement dégradé tout en assainissant les comptes publics.

Le pacte de responsabilité et de solidarité et le programme d'économies de 50 milliards d'euros poursuivent et amplifient ces orientations : ils forment un ensemble cohérent, qui doit être envisagé dans sa globalité. Considérer isolément chacune de leurs mesures ne fait pas sens : l'allégement du coût du travail, le soutien au pouvoir d'achat des ménages modestes et les économies sur la dépense publique constituent trois composantes indissociables l'une de l'autre.

Dans son volet relatif aux entreprises, le pacte part de trois constats. Le taux de chômage demeure supérieur à 10 % même si sa progression a été arrêtée en fin d'année 2013. Les marges des sociétés non financières ont diminué régulièrement depuis dix ans. Enfin, si le soutien fourni par l'État via les contrats aidés est utile à l'emploi, il est insuffisant pour obtenir une baisse durable du chômage.

Ces constats ont conduit le Gouvernement à proposer un ensemble d'allégements des prélèvements des entreprises – certains sont inscrits dans le présent PLFR, les autres le seront dans le PLFRSS.

Cet ensemble comprend tout d'abord un allégement du coût du travail pour inciter les entreprises à embaucher : 4,5 milliards d'euros d'allégement des cotisations patronales entre 1 et 1,6 SMIC – une telle mesure étant estimée fortement créatrice d'emplois, le PLFRSS proposera de la mettre en oeuvre dès le 1er janvier 2015 ; 4,5 milliards d'allégement des cotisations patronales entre 1,6 et 3,5 SMIC – cette mesure, qui bénéficiera particulièrement aux entreprises industrielles et exportatrices, sera mise en oeuvre à compter du 1er janvier 2016 ; 1 milliard d'euros en faveur des indépendants dont le revenu est inférieur à 3 SMIC – la mesure entrera en application le 1er janvier 2015.

Cet ensemble comprend également des allégements destinés à soutenir la capacité d'investissement et d'innovation de notre tissu productif, notamment la suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés – C3S – à l'horizon de 2017, avec, dès 2015, un abattement de 3 millions d'euros sur son assiette – la mesure pèsera pour 1 milliard d'euros dans les comptes. Le PLFR prévoit par ailleurs de proroger d'une année la contribution exceptionnelle d'impôt sur les sociétés pour un produit de quelque 2,7 milliards d'euros.

S'agissant des ménages, il faut tout d'abord rappeler que les ménages moyens et modestes ont pris toute leur part depuis 2011 à l'assainissement des finances publiques. Outre le dégel du barème de l'impôt sur le revenu, le PLFR prévoit un allégement de l'impôt sur le revenu dès l'automne 2014, qui s'appliquera sur les revenus de l'année 2013. Cette mesure, qui a fait l'objet d'une concertation avec la majorité parlementaire, concernera 3 700 000 foyers fiscaux, dont 1 900 000 ne verseront rien au Trésor public en septembre prochain. Elle consiste en une réduction d'impôt de 350 euros par foyer fiscal – 700 euros pour un couple –, qui viendra alléger l'imposition de ces ménages d'environ 1,16 milliard d'euros en 2014. Cette mesure devrait être pérennisée dans le cadre d'une refonte plus globale du bas du barème de l'impôt sur le revenu dans le projet de loi de finances pour 2015. Le PLFRSS comprendra en outre un allégement de cotisations sociales pour les salariés payés entre 1 et 1,3 SMIC, pour un montant total de 2,5 milliards d'euros.

Le Gouvernement vous propose, dans le cadre du PLFR et du PLFRSS, de mettre en oeuvre les seules mesures du pacte ayant un effet en 2014 et 2015. En effet, l'année 2015 sera mise à profit pour étudier l'effet de ces mesures, qui seront toutefois inscrites dans le prochain projet de loi de programmation des finances publiques, c'est-à-dire dans la trajectoire de nos finances publiques, comme elles l'ont été dans le programme de stabilité. Il s'agit là du principal levier pour permettre le retour à l'emploi des personnes qui en sont aujourd'hui privées.

Dans le même temps, le Gouvernement propose de poursuivre l'effort d'assainissement des finances publiques : c'est le programme d'économies de 50 milliards d'euros dont les grandes lignes ont été présentées dans le programme de stabilité.

J'ai entendu certaines craintes sur l'impact que pourraient avoir ces économies sur la croissance : je souhaite les apaiser. D'une part, ce plan d'économies fait partie d'un ensemble cohérent : les allégements de prélèvements prévus dans le cadre du pacte alimenteront la demande par l'investissement, par l'embauche et par la consommation des ménages modestes. D'autre part, les annonces récentes du président de la Banque centrale européenne soutiendront l'activité économique dans les mois qui viennent.

Ce plan d'économies est donc accompagné par des mesures fiscales et monétaires : le pacte et le « plan à 50 » sont indissociables et ne peuvent être appréhendés de manière isolée.

Le PLFR et le PLFRSS prévoiront des mesures de report de revalorisation de certaines prestations sociales. Les petites retraites de base et les minima sociaux ne seront pas concernés par ces mesures. Le RSA, quant à lui, sera revalorisé de 2 % au-dessus de l'inflation, comme le prévoit le plan pauvreté. Le PLFR prévoit plus particulièrement le report de la revalorisation des aides au logement financées par l'État. Si le manque à gagner découlant de cette mesure est de l'ordre de 1,70 euro par mois pour les ménages bénéficiaires, il est plus que compensé, pour les bénéficiaires du RSA, par la revalorisation de 2 % prévue dans le cadre du plan pauvreté et, pour les salariés payés au SMIC, par l'allégement de cotisations salariales prévu par le pacte – 500 euros par an pour un salarié au SMIC, soit 42 euros par mois.

Le PLFR prévoit enfin des annulations de crédits de l'ordre de 1,6 milliard d'euros, représentant la part de l'État dans les économies supplémentaires de 4 milliards d'euros sur 2014 annoncées par le Gouvernement. Ces annulations de crédits portent, pour 635 millions, sur les crédits mis en réserve et, pour quelque 965 millions d'euros, sur des crédits non gelés, c'est-à-dire hors réserve, ce qui n'a jamais été proposé par aucun Gouvernement – je vous renvoie à la liste, page 15 de l'exposé général des motifs du projet de loi. Tous les ministères sont concernés. Les dépenses d'intérêts de la dette pourraient également être réduites de 1,8 milliard d'euros.

En ce qui concerne les prévisions de recettes, que nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer récemment dans le cadre de la présentation du projet de loi de règlement, je vous confirme qu'elles sont cohérentes avec les prévisions associées au programme de stabilité qui vous ont été communiquées et qu'elles prennent en compte l'effet base des moindres recettes constatées en 2013.

Au total, le déficit budgétaire, hors investissements d'avenir prévus dans le cadre du PIA 2, sera de 71,9 milliards euros en 2014, en diminution de 2,9 milliards euros par rapport à l'exécution pour 2013. Comme le rappelle l'article liminaire, le déficit public atteindrait 3,8 %, en baisse continue depuis 2012, et le déficit structurel 2,3 %, son plus bas niveau depuis 2001.

Si, dans la présentation des mesures du PLFR, j'ai anticipé sur celles du PLFRSS, c'est que les deux textes forment un tout cohérent. Il me revenait donc, dans un souci d'honnêteté intellectuelle, de vous les présenter ensemble.

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