Monsieur le secrétaire d'État, vous avez à juste titre commencé vos propos en soulignant que vous aviez trouvé une situation catastrophique en arrivant au pouvoir en 2012. Elle n'était pas due au hasard, mais au fait que la droite avait mené durant dix ans une politique de l'offre : dispositif « Fillon » de baisse des cotisations, multiplication des niches fiscales, baisse des impôts des plus fortunés...
Aujourd'hui nous sont présentés des textes qui poursuivent cette politique et l'amplifient. Les députés du Front de gauche ne peuvent accepter de suivre cette voie. L'obsession de la compétitivité et de la baisse du coût du travail est destructrice. Si cette solution marchait, cela se saurait ! Alors que l'INSEE relève que le prélèvement sur les entreprises s'est réduit de 13 milliards d'euros en 2013, l'investissement recule, le chômage continue d'augmenter et la consommation stagne au premier trimestre 2014. Faut-il continuer dans cette voie, sachant que la baisse des cotisations sur les bas salaires a des effets particulièrement pervers notamment par le biais de la « trappe à bas salaires » ?
Personne ne nie qu'il faille redresser les comptes publics, mais alors que la Banque centrale européenne affiche maintenant des taux négatifs, il faut savoir que l'État français rembourse 45 milliards d'euros au titre de la charge de la dette, montant qu'il n'est pas inintéressant de rapprocher des 50 milliards d'économies. La pression exercée sur la dépense publique et sociale fera sentir ses effets négatifs sur la croissance et sur les collectivités territoriales. Les 11 milliards d'euros « économisés » sur les collectivités locales auront des conséquences terribles pour l'emploi local de certains territoires.
Les députés du Front de gauche défendront des solutions alternatives mais ils sauront aussi s'associer à la politique des petits pas que mèneraient les députés d'autres groupes. Les convergences pourraient porter sur des propositions relatives aux niches fiscales et sociales. Je rappelle que le taux de l'impôt sur les sociétés de notre pays est l'un des plus élevés, soit 38 %, pour l'un des rendements les plus faibles – seulement 30 milliards d'euros en 2015. Entre le CICE, la C3S, la baisse des cotisations sociales et la baisse de l'impôt sur les sociétés, 41 milliards d'euros seront dépensés dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité d'ici à 2017 pour aider les entreprises. C'est considérable ! Monsieur le secrétaire d'État, vous ne pouvez pas mettre en avant les réelles difficultés de la petite PME de mécanique pour justifier une diminution de l'impôt sur les sociétés de la grande distribution !
Ensuite, le rattrapage prévu par le PLFR concernant l'impôt sur le revenu est salutaire puisque trop de ménages modestes y sont désormais assujettis. Reste que dès ce PLFR on aurait pu relever le barème pour réparer l'iniquité de son gel en 2011 et 2012. Il n'est pas normal que les ménages moyens ne bénéficient pas de la disposition de relèvement du seuil d'entrée. Toute la progressivité de l'impôt sur le revenu est à revoir. Le président Carrez a remis un rapport en 2010 faisant valoir que si l'on avait maintenu le barème du début des années 2000, jamais nous n'aurions connu un tel déficit public.
Il y aurait eu une solution plus simple que la prolongation jusqu'en 2017 de la contribution exceptionnelle touchant l'impôt sur les sociétés : supprimer le CICE pour les grandes entreprises.
Enfin, geler les aides personnelles au logement revient à envoyer un drôle de signal. La politique du logement est des plus gourmandes en crédits et se révèle inefficace tant on a multiplié les dispositifs dérogatoires et les niches fiscales – or, nous aurions pu revenir sur certaines sans toucher les plus modestes.
Ce PLFR étant presque exclusivement tourné vers l'offre, il manque sa cible. Aussi les députés du groupe GDR ne le voteront-ils pas.