Intervention de Pierre Lellouche

Séance en hémicycle du 16 juin 2014 à 21h30
Autorité parentale et intérêt de l'enfant — Article 12

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Lellouche :

J’aborderai une matière que vous connaissez infiniment mieux que moi puisqu’il s’agit du droit de la famille. Comme j’ai fait moi-même un peu de droit, mais pas assez de droit de la famille, je me suis référé à un manuel de droit privé d’Alain Bénabent et j’ai comparé ce qui figurait dans le code civil, tel que décrit par ce professeur de droit, sur le retrait de l’enfant avec maintien de l’autorité parentale et ce que vous en avez fait.

Jusqu’à présent, dans des circonstances exceptionnelles, le juge pouvait, si l’intérêt supérieur de l’enfant l’exige, confier l’enfant à un tiers. Mais ce choix a été encadré, et d’abord par la préférence à la parentalité. Il s’agissait de laisser l’enfant en famille. L’autorité parentale devait continuer à être exercée par les pères et mères. La tâche consistait seulement à accomplir tous les actes usuels relatifs à sa surveillance et à son éducation. Enfin, il y avait les provisions sur une tutelle. Ces conditions ont pour l’essentiel disparu de cette proposition de loi.

On voit bien que l’on passe d’un système de délégation,de placement de l’enfant dans des circonstances exceptionnelles sans mettre en cause l’autorité parentale. L’enfant sera confié à un tiers qui peut très bien n’avoir aucun lien de parentalité avec la famille de cet enfant. Ce tiers aura beaucoup de droits. Vous supprimez la notion de tutelle en raison de l’amendement de Mme la rapporteure qui considère que la tutelle est obsolète. Dès lors, les parents biologiques et le tiers passeront leur temps à aller voir le juge. Et vous écrivez même cela dans votre texte. Vous êtes en train d’ouvrir très largement le placement de cet enfant, de confier à des tiers des pouvoirs très larges et de créer des situations de conflit qui devront sans cesse être arbitrées par le juge.

C’est tout sauf la stabilité de l’éducation de l’enfant. Oui, madame, nous pensons que l’intérêt de l’enfant – supérieur ou pas – est sacrifié dans ce texte, qui fait la part belle aux droits des adultes.

Voilà la différence. Nous ferions tous bien de relire ce qui est dans le droit de la famille et de comprendre vers quoi vous nous amenez. Même si, j’en suis sûr, vos intentions étaient bonnes au départ, vous allez fragiliser l’enfant, judiciariser la vie de la famille recomposée et en plus, diviser les Français.

Je vous parle très sérieusement : ce n’est pas bien, ce que vous faites. Ce n’est pas dans l’intérêt de l’enfant, ce n’est pas dans l’intérêt des familles, c’est contraire à l’esprit du code civil. Alors, pardon, votre exégèse de l’anglais…

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