Intervention de Hervé Gaymard

Séance en hémicycle du 7 novembre 2012 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2013 — Défense

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Gaymard, suppléant M :

Monsieur le président, madame la présidente de la commission, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout le monde s'accorde à reconnaître le contexte particulier dans lequel s'inscrit l'élaboration du budget de la défense pour 2013. Nous entrons en effet dans une période de transition entre deux Livres blancs et deux lois de programmation militaire. Des choix importants vont être faits ; des décisions majeures vont être prises. Le budget que nous examinons ne doit donc pas anticiper sur l'avenir, mais il ne doit pas non plus compromettre l'activité de nos forces. Pour reprendre une expression déjà utilisée à l'envi, nous avons affaire à un « budget d'attente », un « budget de transition ».

Je ne reviendrai pas sur les principaux chiffres de ce budget. Le Gouvernement a entendu maintenir une certaine stabilité par rapport à 2012. Le montant des crédits de paiement est au même niveau que l'année dernière, mais les autorisations d'engagement connaissent une baisse de 3,3 % par rapport à l'année passée. À plus long terme, ces chiffres correspondent à une accentuation du décrochage par rapport à la loi de programmation militaire 2009-2014 : par rapport aux prévisions initiales, le recul devrait dépasser les 3 milliards d'euros. Certes, Michel Rocard a dit un jour que les lois de programmation militaire étaient de la poésie, mais cela fait tout de même beaucoup, et ce gouvernement n'est pas le seul à avoir fait ce type de choix. Néanmoins, je tiens à saluer sa décision de sanctuariser, en dépit du contexte budgétaire contraint et dans la lignée des choix effectués par le président Sarkozy, les deux secteurs très importants que sont la dissuasion nucléaire et le renseignement.

En ce qui concerne les équipements, le projet de budget pour 2013 prévoit notamment la livraison de onze Rafale, de la première Frégate multimissions et de quatre hélicoptères Tigre. La livraison du premier A400M devrait intervenir en juin et, fait notable, le projet de budget contient également les crédits nécessaires au lancement du MRTT, l'avion de transport et de ravitaillement tant attendu. En revanche, il convient de relever que d'autres programmes d'équipement connaissent une évolution moins favorable. Ont ainsi été décalées la commande du quatrième sous-marin nucléaire d'attaque Barracuda ainsi que celle de la première étape du programme Scorpion. Il en va de même de la rénovation des Mirage 2000D et des Atlantique 2. Au total, le Gouvernement a choisi de décaler près de 4,5 milliards d'euros de commandes.

Par ailleurs, nous sommes préoccupés par les chiffres concernant la disponibilité des matériels et l'entraînement des personnels. Le « bleu » budgétaire contient des chiffres effarants s'agissant, par exemple, des heures de vol des pilotes de l'armée de l'air. Ces lacunes pourraient menacer à terme les compétences de nos armées, leur efficacité et donc leur capacité à faire face aux menaces et à nous protéger. Les inquiétudes dont je viens de vous faire part sont d'autant plus réelles que le contexte stratégique actuel est loin d'être apaisé. L'arc de crise s'étend vers le sud, notamment à la zone sahélienne, qui s'apparente de plus en plus à un nouvel Afghanistan. À cela s'ajoutent les risques de prolifération du fait du programme nucléaire iranien et de la possession d'armes chimiques par le régime syrien.

Je note également que la trajectoire des budgets de défense des pays émergents suit une tendance très différente de celle des pays européens. La faiblesse de l'effort de défense de la plupart de ceux-ci, à l'exception de la France et de la Grande-Bretagne, ne doit donc pas nous laisser penser que le monde entier désarme. Pour conserver notre rang et assurer notre sécurité, il ne faut pas baisser la garde.

De nouveaux textes, je l'ai dit, vont prochainement fixer les grandes orientations de notre défense pour les années à venir, tant en termes de moyens que de missions. Sans anticiper sur leur contenu, le rapport pour avis de la commission des affaires étrangères, que j'ai l'honneur de représenter en suppléant Guy Teissier, évoque quelques pistes qu'il faudra prendre en compte lorsque arrivera l'heure de faire des choix.

J'en citerai deux. D'une part, il faut faire preuve de cohérence : le monde militaire a besoin, et attend que les choix faits soient cohérents. Cela implique de ne pas confier aux armées des missions sans leur donner les moyens de les remplir et, si l'on abandonne des missions, de dire lesquelles. D'autre part, il convient d'accroître l'effort en matière de recherche. Les crédits qui lui sont consacrés s'élèvent à 3,3 milliards d'euros pour 2013, contre 3,8 milliards d'euros quatre ans plus tôt. Nos exportations s'accompagnent de transferts de technologies vers les pays importateurs. La recherche et l'innovation doivent donc nous permettre de garder un temps d'avance pour rester compétitifs par rapport à nos clients émergents.

Telles sont les observations que je voulais formuler sur le budget de la défense pour 2013, auquel la commission des affaires étrangères a donné un avis favorable. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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