Intervention de Philippe Nauche

Séance en hémicycle du 7 novembre 2012 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2013 — Défense

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Nauche :

Monsieur le ministre, le budget que vous nous présentez aujourd'hui est un budget qui a du sens. Il illustre l'esprit de défense, dans un cadre difficile.

Les crédits de la mission « Défense » que nous sommes amenés à examiner s'inscrivent dans un exercice complexe, avec à la fois le caractère contraint du budget, lié à l'état général de notre pays, et son caractère transitionnel. Ces crédits visent donc à préserver l'essentiel de notre outil de défense au service de notre pays.

Caractère contraint car le volume des dépenses a été fixé de la façon la plus rigoureuse. Je tiens d'ailleurs à vous féliciter, monsieur le ministre, pour l'efficacité avec laquelle vous avez permis à ce budget d'être ce qu'il est.

Caractère transitionnel car la gestion des dix dernières années a parfois péché par excès d'optimisme. Je reprends là les propres termes de la Cour des comptes, dans le rapport qu'elle a remis au mois de juillet sur le bilan à mi-parcours de la loi de programmation militaire couvrant la période 2009-2014, afin d'éclairer nos choix.

Je ne citerai que les recettes exceptionnelles attendues, qui devaient rapporter 2,5 milliards d'euros et n'ont au bout du compte rapporté que 1 milliard. Que dire par ailleurs des dépenses, elles, prévisibles, mais qui n'avaient pas été prévues, liées à la participation de la France aux structures intégrées de l'OTAN ?

Tout ceci a conduit le Président de la République et le Gouvernement à mettre en route l'élaboration d'un nouveau Livre blanc de la défense. Ce document, qui devrait être présenté en janvier, servira de base à l'élaboration d'une nouvelle loi de programmation militaire que nous examinerons dans les mois à venir. Elle déterminera les missions et les contrats opérationnels des forces armées ainsi que les moyens qui leur seront alloués pour les remplir.

Permettez-moi de faire une parenthèse sur une affaire qui me tient spécialement à coeur, et je sais, monsieur le ministre, à quel point vous vous êtes mobilisé afin de la résoudre au plus vite : il s'agit de la mise en place hâtive et non maîtrisée de nouveaux outils de gestion au sein de nos armées. Le logiciel Louvois, destiné, je cite, à « moderniser les procédures de paiement des soldes des personnels des armées », a été mis en place en octobre 2011 sans avoir été fiabilisé. Dans le même temps, les services de traitement de la solde étaient supprimés pour contribuer à la baisse des effectifs de soutien prévus par la RGPP du précédent gouvernement. On le sait aujourd'hui, 10 000 à l5 000 militaires et leurs familles sont en difficulté.

C'est un héritage dont vous vous seriez bien passé. Depuis des semaines, vous avez travaillé à faire cesser ces dysfonctionnements mais, un an après la mise en service, des erreurs perdurent. Je me félicite de l'efficacité avec laquelle vous êtes intervenu et de l'énergie que vous y avez mise, afin qu'aucune famille ne reste dans une situation intenable et indigne de notre pays.

Cela étant, comme je l'ai dit en commençant, le budget 2013 ne pouvait être qu'un budget de transition. Il vous fallait à la fois maintenir le niveau opérationnel de nos forces et maîtriser la dépense publique, dans un contexte que nous connaissons tous.

Ce difficile équilibre se retrouve au sein des quatre programmes qui constituent la mission « Défense », sur lesquels je ne reviendrai pas en détail, nos rapporteurs les ayant déjà largement et excellemment présentés.

Deux exemples, cependant, pour illustrer la préparation des choix opérationnels que vous allez effectuer comme il se doit.

Le budget 2013 prévoit le lancement du programme d'avions MRTT, attendu depuis 2007, soit plusieurs années. Cet avion de ravitaillement en vol et de transport, pour lequel sont prévus 368 millions d'euros en autorisations d'engagement, permettra de remplacer la flotte vieillissante d'avions ravitailleurs, et sa polyvalence d'assurer un plus large spectre de missions. C'est une décision extrêmement importante.

Le système de drone MALE intermédiaire, destiné à assurer des missions de renseignement de théâtre, est présent dans le budget. Aucune solution industrielle n'a encore été arrêtée, mais un achat sur étagère étant envisagé, je tiens à dire que, si cette solution assurerait certes la continuité de notre capacité de renseignement d'origine imagerie, vitale du point de vue opérationnel, elle poserait cependant la question de la maîtrise des logiciels et de certains capteurs pour assurer l'indépendance de nos moyens. À cet égard, il y a un très grand enjeu technologique et industriel en matière d'industries de défense, en particulier pour le drone MALE, car il faudrait que puisse être lancé en même temps un programme qui serait idéalement européen.

Enfin, monsieur le ministre, à l'heure où le retrait de nos forces d'Afghanistan est engagé, je souhaite conclure mon propos en évoquant la situation des personnels afghans avec lesquels nos forces ont travaillé, et plus spécifiquement celle des interprètes. Leur vie est aujourd'hui menacée pour certains. Tous les membres de la coalition sont confrontés à cette question. Certains pays envisagent d'accueillir ces personnes, si elles le souhaitent, sur leur territoire. Je souhaite savoir ce que la France envisage de faire à leur égard.

En conclusion, à la lumière de tous les arguments que je viens d'exposer, je soutiendrai, comme mes collègues du groupe socialiste, ce budget qui est le meilleur possible dans la période de transition d'aujourd'hui et dans le contexte budgétaire qui est le nôtre. En effet, il prend en compte l'objet essentiel d'un budget défense : le rôle et le sens de l'action que nous voulons voir tenir à notre pays dans le monde. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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