Cette question de fond mérite que l’on s’y arrête quelques instants quoiqu’elle n’entre pas dans le champ d’action de ce projet de loi.
Je l’ai dit et répété urbi et orbi, ce texte comporte un certain nombre d’enjeux et de défis mais pas celui de l’ouverture à la concurrence.
Madame Fraysse, vous pourrez rapporter ce témoignage à M. Chassaigne qui, à mon sens, ne le connaît pas – il est vrai que sur cette question, quelles que soient les familles politiques ou les appartenances syndicales, la situation est parfois malaisée. J’en veux pour preuve le rapport du Conseil économique, social et environnemental qui m’a été remis lors de mon arrivée aux responsabilités gouvernementales, au mois de juillet 2012. Le rapporteur, qui n’était pas encore secrétaire général de la CGT, concluait ainsi : « Une concertation devrait être engagée avec l’Association des régions de France pour définir le calendrier et les modalités de l’ouverture à la concurrence des TER et lancer assez rapidement les premières expérimentations qui devraient pouvoir commencer au début de 2015. »
La CGT avait d’ailleurs voté ce rapport, dont je m’étais, pour ma part, volontairement distancié. Mon propos n’est pas d’accuser qui que ce soit, mais de montrer que cette question mérite d’être clarifiée. Ce que j’entends, y compris dans la rue, c’est que le service public a été fragilisé, notamment dans le fret, du fait d’une libéralisation qui s’est faite à la hâte, et sans que le service public soit organisé et rendu plus robuste. J’ai déjà eu l’occasion de dire que lorsqu’il s’est agi d’ouvrir le fret à la concurrence en 2007, on a mis le wagon à l’envers. Il aurait été préférable de commencer par organiser et renforcer le service public, pour qu’il soit à même d’affronter cet environnement concurrentiel.
Sur les piquets de grève, on m’accuse de vouloir, à travers ce texte, ouvrir le trafic ferroviaire à la concurrence. En réalité, ce texte n’ouvre pas à la concurrence : il y prépare le service public, pour une date qui est encore incertaine. Mais nous refusons, pour notre part, d’anticiper cette ouverture à la concurrence, contrairement aux préconisations contenues dans les conclusions de l’avis du Conseil économique, social et environnemental.
Cela signifie qu’il faut une organisation de qualité ; nous y travaillons.