Intervention de Son Excellence M Yossi Gal

Réunion du 11 juin 2014 à 9h45
Commission des affaires étrangères

Son Excellence M Yossi Gal, ambassadeur d'Israël en France :

e ne doute pas un instant de l'amitié, réelle, de la France et de son Parlement pour l'État d'Israël, et je me félicite de l'excellence des relations entre nos deux pays. L'amitié donne le confort de parler avec sincérité, et c'est ce que je vais faire.

Je tiens pour une erreur de jugement le fait d'analyser le complexe conflit israélo-palestinien sous le seul prisme des implantations. Cette question très importante doit, par convention, être traitée dans le cadre de la négociation de l'accord final entre les deux parties ; il y a des divergences à ce sujet, c'est vrai, mais l'avenir des colonies sera déterminé entre nous une fois tracées les frontières entre les deux États. J'appelle votre attention sur le fait que de nombreuses autres questions déterminantes doivent aussi être résolues : le terrorisme, la montée de l'extrémisme et la manière de garantir la sécurité ne sont pas les moindres. On ne peut mettre l'accent sur un volet du dossier pour en faire la seule question à traiter.

Israélien et juif, je suis optimiste par définition et je pense qu'il existe de nombreux motifs d'espérer : la conclusion du traité de paix avec l'Égypte, les bonnes relations que nous entretenons avec la Jordanie, le fait que nous tentions de parvenir à un accord avec les Palestiniens. Pour autant, nous ne pouvons ignorer les événements intervenus au cours des dernières semaines à Ramallah. À ce stade, le défi que la France et l'Europe devraient lancer à Abou Mazen est clair. Si le gouvernement de réconciliation est sérieux, il doit imposer son autorité au Hamas pour endiguer la violence et le terrorisme – j'imagine que tous, dans cette pièce, en sont d'accord – ; désarmer le Hamas ; faire cesser la production d'armes et de missiles dans la bande de Gaza ; déployer les forces palestiniennes à Gaza et le long de la frontière avec l'Egypte. Il lui faudra aussi faire accepter au Hamas les trois conditions posées par le Quartet, et je ne pense pas que la France, qui combat le terrorisme, y trouve à redire puisqu'il s'agit de faire cesser les tirs de roquette contre les civils. En bref, l'espoir d'un règlement existe mais nous devons être réalistes.

Les États-Unis, et singulièrement le secrétaire d'État, sont toujours engagés dans les pourparlers en vue de la négociation et ne relâchent pas leur effort.

Ce qui s'est passé en Égypte l'an dernier est probablement le coup le plus important porté à l'extrémisme des Frères musulmans. L'Égypte joue un rôle capital dans la région et le traité de paix que nos deux pays ont signé est essentiel aux relations futures. Nous continuerons de travailler avec les Égyptiens et je suis heureux que le président Al-Sissi considère, comme nous, qu'il faut répondre au défi à la sécurité qui nous est lancé dans le désert du Sinaï.

La Résolution 181 du Conseil de sécurité des Nations Unies définit ce qu'est l'« État juif » de la plus simple manière : un État pour le peuple juif. C'est aussi un État qui, comme la France et les autres démocraties européennes, est fondé sur les valeurs qui nous sont chères de liberté et d'égalité, et sur le respect des droits de l'homme.

Nous sommes toujours prêts à coopérer avec la Jordanie, avec les Palestiniens et avec les autres pays de la région à propos de la gestion de l'eau et des questions environnementales ; nous avons des relations étroites avec les Jordaniens à ce sujet.

Je ne saurais vous dire, monsieur Habib, pourquoi les choses se passent comme vous les avez décrites. Pour nous, Israéliens, la paix n'est pas une notion abstraite : c'est de notre vie qu'il s'agit, et de l'avenir de nos enfants. Il faut donc mettre fin au terrorisme. La paix est un choix, et nous avons fait le choix stratégique difficile d'accepter le principe de « deux États pour deux peuples » ; ce n'était pas le cas il y a dix ans. Ce qui m'inquiète, c'est que M. Abbas ait décidé de s'allier au Hamas. Alors que les négociations entre Israël et l'Autorité palestinienne étaient très avancées, plutôt que de faire progresser le processus de paix, il a préféré cette alliance incompréhensible.

L'« espoir » de paix a été évoqué plusieurs fois. Soit. Mais ce qui est aussi en jeu, c'est l'existence de l'État d'Israël, plusieurs fois menacée par le passé. Nous nous sommes retirés du Liban et il en est résulté un arsenal de plus de 100 000 missiles du Hezbollah. Nous nous sommes désengagés de la bande de Gaza il y a dix ans et il en est résulté un arsenal de plus de 80 000 missiles du Hamas… Nous devons tenter de promouvoir de bonnes relations avec nos voisins palestiniens, mais rester vigilants.

Le mur a été conçu uniquement pour mettre fin aux attaques terroristes. Le fait est que, depuis huit ou neuf ans, aucun autobus n'a explosé à Jérusalem, et qu'il n'y a plus eu d'attentats-suicides : c'est la conséquence directe de la construction du mur, qui n'est qu'un outil de protection. Une fois les frontières tracées entre les deux États, on décidera de l'avenir de cet ouvrage comme de celui des colonies.

La Cisjordanie connaît une croissance économique sans précédent, la coopération existe sur le plan sécuritaire et, d'une manière générale, la situation est calme. Dans la bande de Gaza en revanche, le bras répressif du Hamas se fait sentir. Nous maintenons le passage ouvert ; il n'y a ni pénurie alimentaire, ni manque de médicaments, ni déficit de matériaux de construction, l'eau et l'électricité sont fournies par Israël et, en dépit des problèmes politiques irrésolus, le gouvernement israélien permet la mise en oeuvre des projets des Nations unies dans ce territoire palestinien.

Je crains que le temps ne joue contre ceux qui, comme nous, veulent la paix au Moyen-Orient. Il est très important d'expliquer aux populations, côté palestinien et côté israélien, ce qu'apportera la paix. Les deux parties doivent donc accentuer leurs efforts pour promouvoir les idéaux pacifiques. Malheureusement, comme le montre la lecture des journaux palestiniens et israéliens, la confiance réciproque est à l'étiage. C'est dommage.

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