Intervention de Pierre-Alain Muet

Séance en hémicycle du 17 juillet 2012 à 21h30
Projet de loi de finances rectificative pour 2012 — Article 2

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Alain Muet :

Et ça, c'est un problème de politique économique. Il y a peut-être des situations qui le justifient. J'ai souvent cité la France des années cinquante, où on aurait pu se poser la question : l'économie était dans une situation de plein emploi et il y avait des pénuries de main-d'oeuvre partout. Mais dans une situation de chômage élevé, excusez-moi, mes chers collègues de l'ancienne majorité devenue minorité, c'est une aberration économique.

Et je vais simplement prendre un exemple. Vous avez parlé de la crise. Cette crise, la France l'a abordée, à l'été 2008, avec un taux de chômage de 7,5 %, soit exactement le même taux qu'en Allemagne. La France a continué à dépenser entre 4,5 et 5 milliards d'euros par an pour subventionner des heures supplémentaires. L'Allemagne, à l'inverse, subventionnait la réduction du temps de travail, de façon négociée comme à son habitude, non par idéologie mais par pragmatisme ; elle subventionnait également le Kurzarbeit, c'est-à-dire le chômage partiel, ce qui fait que l'économie allemande a traversé la crise en maintenant ses salariés dans l'entreprise, car le temps de travail a été profondément réduit.

Cela représentait 5 milliards d'euros en 2009, et aujourd'hui l'Allemagne a un taux de chômage de 5,8 %, quand le nôtre atteint 10 %. Là est le problème. La subvention des heures supplémentaires est absurde en période de chômage massif.

J'ai lu, comme vous, le rapport de nos collègues Jean-Pierre Gorges et Jean Mallot : pratiquement aucun pays n'a subventionné aussi massivement que nous les heures supplémentaires. Le seul pays à l'avoir fait un peu, dans une tout autre logique que je n'ai pas le temps de développer ici, c'est l'Italie, avant d'arrêter avec la réapparition du chômage.

Dans la situation de chômage que nous connaissons, cette subvention que nous allons supprimer est une arme de destruction massive de l'emploi. Peut-être le terme « massif » est-il excessif mais, selon l'OFCE, une telle mesure en période de chômage supprime 30 000 emplois, et une étude réalisée par un brillant économiste de l'INSEE parle, elle, de 80 000 emplois.

Quoi qu'il en soit, réfléchissez une seconde, mes chers collègues : dépenser 4,5 milliards d'euros pour détruire des emplois, ça ne s'est jamais vu dans aucun pays ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) En supprimant ce dispositif, c'est-à-dire en réalisant des économies, nous allons créer des emplois !

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