Intervention de Martial Saddier

Séance en hémicycle du 9 novembre 2012 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2013 — Écologie développement et aménagement durables

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartial Saddier :

Que dire des nombreuses annonces et priorités formulées par la suite par le Président de la République et le Premier ministre, à l'issue de la conférence environnementale ? Nous aurions, en tant que commissaires du développement durable, légitimement pu nous réjouir des priorités affichées pour le quinquennat, avec le lancement du débat sur la transition énergétique, la rénovation thermique des bâtiments, la place accordée à la biodiversité et l'amélioration de la prévention des risques technologiques et naturels. Or, au vu de la baisse drastique des crédits affectés au ministère de l'écologie, nous nous interrogeons – c'est un euphémisme – sur les conditions dans lesquelles seront mises en oeuvre ces priorités.

Une chose est désormais sûre : l'écologie n'a pas de place au sein de la politique de ce gouvernement. Si la situation économique nécessite des efforts, ce ne sont pas des efforts mais des sacrifices que vous demandez à l'écologie !

De plus, les deux textes majeurs de la session extraordinaire du mois de septembre, qui avaient de fortes implications environnementales, et que nous avons eu à examiner en catastrophe, ont connu de sombres destins. La loi sur le logement social a été déclarée non conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel et la proposition de loi visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre, premier texte destiné à mettre en place la transition énergétique, a été rejetée par le Sénat. L'examen de ce dernier texte a au moins eu le mérite de démontrer, une nouvelle fois, que certains députés de l'actuelle majorité n'avaient que faire des dispositions protectrices introduites par les lois fondamentales « Littoral » et « Montagne », et préféraient de loin favoriser, par exemple, le développement anarchique de l'éolien sur nos territoires.

Revenons au budget qui nous est soumis. Force est de constater, tout d'abord, qu'entre 2012 et 2013, le budget global du ministère de l'écologie subit une baisse de 4,5 % de ses crédits. En 2012, les crédits de cette mission s'élevaient à 9,82 milliards d'euros en autorisations d'engagement ; ils sont ramenés à 8,38 milliards d'euros en 2013.

De plus, en termes de moyens de personnel, il y aurait, pour l'année 2013, une réduction de 614 postes, dont 318 auprès des quarante opérateurs rattachés à votre ministère. Permettez-nous donc d'être particulièrement sceptiques quant aux moyens qui seront déployés pour réaliser les choix stratégiques que vous nous avez présentés.

Devant la commission du développement durable, vous avez insisté, madame la ministre, sur la volonté du Président de la République d'organiser un grand débat national sur la transition énergétique, suivi de l'élaboration d'une loi de programme. Vous avez également tenté de nous rassurer quant au maintien des crédits destinés au Fonds chaleur de l'ADEME. Toutefois, force est de constater que les crédits consacrés à l'ADEME et ceux affectés au Fonds chaleur subissent une baisse non négligeable. Ce fonds ne sera doté que de 220 millions d'euros pour 2013, contre 235 millions en 2012. Vous en conviendrez, ce n'est pas tout à fait ce que le Gouvernement avait affirmé récemment en indiquant que le Fonds chaleur serait maintenu à son niveau actuel. Mais avec votre gouvernement, nous ne sommes plus à une contradiction près !

Votre budget fait pâle figure en ce qui concerne la filière des énergies renouvelables, le développement des réseaux de chaleur, la biomasse et la géothermie, alors que notre majorité avait alloué 1,2 milliard d'euros au Fonds chaleur renouvelable, ce qui avait permis de financer 104 projets de chaleur par biomasse entre 2009 et 2012. En commission, les opérateurs et les professionnels de la filière ont rappelé que, pour être efficace, le Fonds devait être doté de 500 millions d'euros.

Le Gouvernement s'enorgueillit de lancer d'ici à décembre un appel d'offres pour la création d'un parc éolien au large du Tréport et de Noirmoutier. Une telle annonce est aisée, puisque c'est notre majorité qui a lancé le 11 juillet 2011 l'appel d'offres éolien en mer, comprenant le lot du Tréport qui n'avait pas trouvé preneur à l'époque.

Autre annonce du Gouvernement dont on ne trouve malheureusement aucune application dans les crédits de la mission : la rénovation thermique de notre parc immobilier. Le Premier ministre a souhaité améliorer les dispositifs d'aide existant pour la rénovation des logements privés afin de mettre aux normes énergétiques un million de logements par an – rien que ça ! –, plus particulièrement des logements anciens. Pourtant, en regardant le programme 174 « Énergie, climat et après-mines », on se rend compte que le crédit d'impôt pour dépenses d'équipement de l'habitation principale en faveur des économies d'énergie a baissé de moitié par rapport à 2012. Introduire une telle baisse dans le budget, ce n'est pas ce que je qualifierai d'amélioration des aides existantes !

Je souhaiterais aussi revenir sur les annonces récentes du Gouvernement concernant l'une des mesures proposée par Louis Gallois en vue de relancer la compétitivité : la reprise du débat sur l'exploitation des gaz de schiste. Bien que nous soyons opposés à l'utilisation de la fracturation hydraulique pour l'exploration et l'exploitation des gaz de schiste, la loi du 13 juillet 2011, dont notre majorité a été l'initiatrice, prévoit à son article 2 la création d'une commission nationale d'orientation, de suivi et d'évaluation des techniques d'exploration et d'exploitation, principalement destinée à émettre un avis sur les conditions de mise en oeuvre des expérimentations – des strictes expérimentations – sous contrôle public. Nous sommes particulièrement étonnés de ne pas trouver trace dans ce projet de la création de cette commission, dont l'installation avait pourtant été prévue dans un décret du 21 mars 2012.

Cette commission serait constituée sur le modèle du Haut conseil des biotechnologies, dont nous avons pu constater cette semaine encore, lors d'une réunion de la commission des affaires sociales et de la commission du développement durable, l'autorité, l'indépendance, la capacité à éclairer le pouvoir politique. De même, nous avons entendu tous les opérateurs, qui ont demandé 20 millions d'euros pour lancer une étude sur les OGM, pour l'ANSES et le Haut conseil. Il n'y a aucune trace de ces crédits dans le budget.

Au cours de votre audition, vous avez rappelé l'ambition du Président de la République de faire de la France « une nation de l'excellence environnementale » et un pays exemplaire dans la reconquête de la biodiversité. Pour y parvenir, vous comptez créer une Agence nationale de la biodiversité, chargée de développer, grâce à des moyens renforcés, un outil indispensable en termes de connaissances. Permettez-nous, madame la ministre, de nous interroger vivement sur la teneur de ces « moyens renforcés », quand nous constatons tous que le programme « Paysages, eau et biodiversité » chargé de prévoir les crédits destinés à cette Agence est en nette baisse par rapport à l'année dernière,…

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