Intervention de Serge Letchimy

Réunion du 24 juin 2014 à 21h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Letchimy :

Nous franchissons ce soir une étape historique ! Le grand poète Aimé Césaire m'a tenu à plusieurs reprises un propos dont je n'avais pas compris toute la portée au premier abord : « Cherche dans la nature et tu trouveras. ». Me parlant de développement économique, de société, de culture, de patrimoine, il savait que nous nous trouvions face à une difficulté majeure qui n'était pas seulement budgétaire ou financière : nos pays ont besoin de construire une stratégie de développement économique fondée sur la résilience, patrimoniale et culturelle.

Et si on lit bien la poésie de Césaire, on voit que la biodiversité est au coeur de sa rébellion et de son combat. C'est à travers elle qu'il est allé chercher l'inspiration pour s'élever et être l'éveilleur des consciences, celui qui nous permet à tous, quelle que soit notre couleur, de conjurer les effets de la colonisation et de l'esclavage pour emprunter de nouvelles voies, dans la solidarité avec la nature.

Grâce à votre amendement CD746, nous disposerons d'un comité régional dans chaque département et région d'outre-mer. Sans nous dispenser d'observer les grandes directives nationales, très importantes pour nous, nous pourrons ainsi débattre en toute clarté, en nous inscrivant résolument dans notre géographie cordiale propre.

Nous étions en train de perdre le contact avec la nature. L'aliénation ne consiste pas seulement, en effet, dans la perte de sa culture, c'est aussi un assimilationnisme qui fait perdre le contact avec sa propre nature. C'est une troisième forme de colonisation, la plus grave parce qu'elle est le fait, non de l'autre, mais de nous-mêmes. Les Antillais, les Mahorais et les Réunionnais étaient ainsi dépossédés de toute prise sur leur devenir.

Vous acceptez également d'instituer une délégation de l'Agence pour la biodiversité, dans laquelle je vois un véritable laboratoire de recherche, d'innovation et de développement au niveau national, dans la ligne de la déclaration de Rio et de la convention sur la biodiversité biologique. Dans cette perspective, nous avons besoin d'une assez grande autonomie intellectuelle pour créer une ingénierie locale. Et vous avez parfaitement vu, dans ce texte d'importance majeure pour la France et pour le monde, que l'innovation n'est pas affaire que de technologie moléculaire, mais qu'elle exige aussi de combattre le pillage de nos richesses végétales, marines ou animales par les grands trusts économiques, afin de développer notre savoir-faire.

Je vous remercie, madame la ministre, au nom de mon pays, la Martinique, et je souhaite que nos collègues votent à l'unanimité les deux amendements que vous venez de défendre.

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