Madame la députée, vous soulevez là une vraie question, une question légitime. Cette interrogation est récurrente : elle a porté sur différents dispositifs d’allégement de charges, et notamment sur les allégements de charges sociales patronales – dits « allégements Fillon ». Vous savez que pendant un certain temps, ces allégements ont été calculés sur la base des salaires mensuels, et que – disons-le clairement – la gauche a toujours demandé que le calcul porte sur le salaire annuel. C’est l’actuelle opposition qui, à la fin de la précédente législature, a décidé de calculer les allégements Fillon sur le salaire annuel. Elle l’a fait pour des raisons diverses traduisant probablement une préoccupation de rendement, sur laquelle je n’ai pas de jugement à porter. Il s’agissait aussi d’éviter que certains employeurs versent plus facilement des rémunérations exceptionnelles ponctuelles – primes de fin d’année, primes particulières – plutôt qu’un salaire mensuel plus élevé.
Vous avez donné des exemples. Soyons encore plus caricaturaux : imaginons un salarié qui serait payé 1,29 SMIC pendant 11 mois, puis aurait une prime – même modeste – le dernier mois. Dans ce dernier cas, il dépasserait le seuil de 1,3 SMIC sur l’année.
Cela étant, pourquoi le Gouvernement a-t-il choisi ce dispositif ? Principalement pour deux raisons. D’abord, pour adopter un dispositif parallèle au dispositif de réduction des charges sociales patronales. L’analogie vaut ce qu’elle vaut, mais le dispositif annuel d’allégement de charges sociales patronales dit allégement « Fillon » est désormais bien connu, bien rodé. C’est pourquoi le Gouvernement a choisi le même type de dispositif avec le même mode de calcul pour les salariés. Certes, ce n’est pas toujours les salariés qui choisissent si les primes sont versées ponctuellement ou mensuellement – ce qui peut arriver : certains employeurs mensualisent un certain nombre de primes. Ensuite, comme l’a dit Dominique Lefebvre il y a quelques instants, votre proposition pourrait aboutir à une rupture d’égalité entre les salariés dont le salaire est versé uniformément au cours des douze mois de l’année, et ceux dont le salaire mensuel est inférieur mais le salaire annuel égal du fait des primes de fin d’année.
Voilà pourquoi le Gouvernement a fait ce choix. Nous pensons qu’il est plus conforme au principe d’égalité des citoyens devant les charges publiques, quelle que soit la forme de ces charges, impôts ou cotisations. Le Gouvernement s’est posé la même question que vous : elle l’a conduit à travailler, à réfléchir, à consulter le Conseil d’État, et enfin à prendre la décision que je viens de décrire.