Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du 5 novembre 2012 à 16h10
Commission élargie : culture

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérald Darmanin, rapporteur pour avis de la Commission des affaires culturelles et de l'éducation, pour les patrimoines :

Dans notre civilisation, disait Malraux, l'avenir ne s'oppose pas au passé, il le ressuscite. Convenons, madame la ministre, que, pour préparer l'avenir immédiat, votre projet de budget ne tient guère compte de notre passé patrimonial.

Vous nous présentez en effet une baisse spectaculaire et inédite des crédits alloués aux patrimoines, parfaitement résumée par mon collègue Lamour. Si certaines baisses doivent être relativisées – ainsi la diminution de 48 % des crédits de l'action 4 s'explique-t-elle en grande partie par l'achèvement du projet de Pierrefitte-sur-Seine –, d'autres sont plus inquiétantes. J'en retiendrai trois : la baisse de moitié des crédits d'acquisition ; la diminution de 20 % des crédits de l'action « Patrimoine archéologique » ; la réduction de 13 % de ceux de l'action « Patrimoine monumental ».

Ces baisses touchent des dépenses d'investissement, s'agissant notamment de cette dernière action, ce qui ne pourra que ralentir les opérations d'entretien et de restauration. Je ne partage pas l'optimisme du dossier de presse fourni par votre ministère, qui évoque un rééquilibrage au profit des territoires alors que ceux-ci sont loin de bénéficier d'un effort supplémentaire. Si les crédits d'entretien se maintiennent peu ou prou, les crédits de restauration baissent de 13,2 % pour les monuments historiques appartenant à l'État et de près de 11 % pour les autres. Les conséquences sur l'état de notre patrimoine pourraient être lourdes : tout élu le sait, lorsqu'une restauration est reportée, l'état du monument risque de se dégrader.

Les crédits alloués aux grands projets baissent en conséquence de l'abandon du projet de Maison de l'histoire de France. À ce propos, je note que les 15 millions inscrits en projet de loi de finances pour 2012 n'ont pas été redéployés.

S'agissant enfin des acquisitions, même si les crédits ne sont pas très élevés – 8,55 millions –, leur baisse de moitié inquiète d'autant plus que le Gouvernement a semblé incertain à l'égard du mécénat. Il s'en est fallu d'un cheveu de Mona Lisa que les dispositifs fiscaux favorables au mécénat d'entreprise disparaissent ! Si vous avez su, madame la ministre, vous soustraire sur ce point à l'autoritarisme du ministre du budget, nous espérons que les arbitrages vous resteront favorables au cours des années à venir.

Selon un rapport publié par le CREDOC en juin dernier, 57 % des Français auraient visité un musée ou un monument au cours des douze mois précédents. Pourtant, l'accès des classes populaires et moyennes aux collections nationales reste insuffisant. Les statistiques manquent pour juger de l'effet des mesures adoptées sur la démocratisation, qu'il s'agisse de la gratuité pour les jeunes de 18 à 25 ans, ou des expériences et projets de déconcentration culturelle – « Pompidou mobile » et Pompidou-Metz, en attendant le Louvre-Lens. Selon un constat partagé, toutefois, la communication vis-à-vis des publics les plus éloignés de la culture n'est pas suffisante pour provoquer le fameux choc culturel que Malraux appelait de ses voeux.

Quelques questions. Sur les 15 millions alloués en 2012 au projet de Maison de l'histoire de France, 11,25 millions devaient financer des travaux touchant des établissements censés participer à la MHF, dont le musée du château de Compiègne et le musée des plans-reliefs des Invalides. Ces travaux seront-ils réalisés ?

Comment l'espace libéré par le transfert des archives à Pierrefitte-sur-Seine sera-t-il utilisé ?

Le musée du Louvre et la Caisse des dépôts devaient être sollicités pour vérifier le schéma économique du projet d'Hôtel de la marine : qu'en est-il ?

Dans l'acte III de la décentralisation annoncé par le Président de la République, faut-il s'attendre à ce qu'une partie du programme « Patrimoines » soit décentralisée au profit des régions ?

Enfin, comment concrétiser la démocratisation de l'accès aux collections nationales, le coût n'étant manifestement pas le seul obstacle à la création d'un habitus culturel parmi les publics visés ?

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