Avec la mission « Culture », nous abordons la partie historique et essentielle du budget du ministère.
Pauvre culture, qui voit ses crédits passer de 2,54 milliards en 2012 – ce qui représentait alors une hausse 2,9 % par rapport à 2011 – à 2,43 milliards en 2013, en recul de 4,3 % ! Cette baisse est d'autant plus frappante qu'elle touche des missions fondamentales du ministère.
Je comprends les impératifs budgétaires et leur caractère prioritaire. Mais est-ce une raison suffisante pour casser des dynamiques essentielles ? Mes remarques s'inspireront de l'objectif affiché dans le rapport qui nous a été transmis : une action culturelle en faveur du plus grand nombre, équitablement répartie sur le territoire. Dans ce cadre, je m'en tiendrai à quatre observations relatives au programme 175.
Ce budget met un terme à quelques grands projets, qui sont non seulement des facteurs de croissance économique et de création d'emplois dans les territoires, mais aussi d'identité et de fierté locales. Mais c'est votre choix. Vous n'avez retenu que des projets parisiens : si l'on excepte le MuCEM, trop avancé pour être annulé. Vous avez confirmé le projet de la Philharmonie et la réouverture du musée Picasso, ainsi que l'ouverture du Centre des archives de Pierrefitte-sur-Seine. Nous étions pourtant en droit d'attendre des choix plus équilibrés sur de tels dossiers, qui participent très directement au rayonnement des territoires et à leur attractivité touristique et économique : le soutien à l'entretien et à la rénovation des monuments historiques eût constitué, à cet égard, une voie médiane ; malheureusement, cette ligne budgétaire passe de 381 millions en 2012 à 362 millions en 2013.
La compensation financière prévue pour l'accès gratuit aux musées, d'un montant de 18 millions d'euros, me semble un pur affichage dans la mesure où l'on sait depuis longtemps que le facteur financier, en ce domaine, n'est pas discriminant ; de surcroît, les inégalités d'accès à la culture n'ont cessé de se creuser au cours des dernières décennies. Permettez-moi d'ailleurs, monsieur le président de la Commission des affaires culturelles, de vous rappeler que vous approuvez aujourd'hui ce que vous critiquiez l'an passé en déclarant : « Mon opinion est que ce ne sont pas des dispositifs financiers incitatifs qui sont les plus efficaces. Dans ce domaine l'éducation artistique est la priorité. »
Quant au plan « Musées en régions », il se prolongera jusqu'à son terme. Ce plan n'aura été ni anodin, ni inutile : au-delà d'un effort budgétaire complémentaire de l'État, il a introduit une excellente méthode de mobilisation des ressources, d'émulation et de transparence partout sur les territoires. Compte tenu de ce bilan et de l'issue prochaine du dispositif, nous pouvions nous attendre à un prolongement ou un approfondissement, via une série d'évaluations par exemple. On ne peut dire, en tout cas, que les mesures présentées signent une politique de « rééquilibrage territorial ».
En ce qui concerne le programme 131, il est très surprenant que son budget n'ait pas été sanctuarisé, dans la mesure où il constitue une amorce des politiques culturelles dans les territoires. C'est tout particulièrement vrai pour le spectacle vivant, qui représente plus de 90 % du programme. Les choix en ce domaine sont d'autant plus surprenants que Mme la ministre avait montré de bonnes dispositions en débloquant, au mois de juillet dernier, 23,5 millions, dont 18,5 millions pour les régions. Mais force est de constater que les crédits du programme 131, après avoir augmenté de 51,87 millions en 2012 – en raison, il est vrai, de l'intégration des 45 millions d'euros dédiés à la Philharmonie de Paris, laquelle demeure financée l'an prochain –, accusent un recul de 13 millions en 2013.
L'action n° 1 – « Soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant » – voit ses crédits de paiement ramenés de 719 à 713 millions, soit le niveau budgétaire de 2011. Sur ce total, le financement du spectacle vivant ne représente que 284 millions d'euros de crédits d'intervention déconcentrés en fonctionnement. Au demeurant cette baisse problématique ne s'accompagne pas d'une meilleure visibilité de la destination des fonds publics, comme l'avait pourtant recommandé la Cour des Comptes.
Je trouve dommage que le nouveau pouvoir ne se soit pas fixé pour objectif de réfléchir aux conditions d'un développement harmonieux et durable du spectacle vivant ; ce projet de loi de finances pouvait très bien en offrir l'occasion. Il n'est pas question de dénigrer une profession ou un régime de protection sociale, mais bien plutôt de reconnaître le formidable développement en France, depuis les années 80, d'un secteur qui a irrigué tous les territoires de créations artistiques et d'animations culturelles. C'est là un exemple de collaboration systématique entre l'État et les collectivités locales qui va potentiellement bien au-delà du périmètre culturel.
La réforme de l'intervention de l'État s'impose de façon urgente autour d'axes déjà connus : réviser les critères, qu'ils soient artistiques ou économiques ; réexaminer les labels du spectacle vivant et rationaliser la carte des financements en systématisant les conventions-cadres pluriannuelles ; améliorer les conditions de production et de diffusion des oeuvres en développant les liens entre le public et le privé ; mettre en place de nouvelles sources de financement – via les apports des entreprises audiovisuelles ou un fonds national d'aide à la diffusion – ; poursuivre la professionnalisation des entreprises de spectacle ; développer des pôles européens de spectacle intégrés et favoriser l'exportation ; enfin, responsabiliser les établissements publics sur leur mission de diffusion. Cette clarification des critères d'intervention et l'élargissement de la diffusion permettront de retrouver des marges de manoeuvre pour soutenir l'innovation artistique.
Pour le maintien de la vie artistique dans nos territoires, nous attendons moins des DRAC, les directions régionales des affaires culturelles, ou des FRAC, les fonds régionaux d'art contemporain, que d'une collaboration vivante et efficace entre les acteurs de la culture, l'État et les collectivités locales. Nous souhaitons une véritable dynamique permettant de dresser une nouvelle carte des labels, une politique d'intervention de l'État mieux ciblée et mieux articulée avec celle des collectivités, une augmentation de la diffusion des spectacles favorisant leur rentabilité, et la professionnalisation accrue des artistes et des diffuseurs. Les possibilités de rapprochement et de mutualisation entre certaines institutions doivent aussi être examinées.
Le groupe UDI votera contre ce projet de budget qui, en plus de ne pas répondre à l'objectif affiché d'une offre culturelle équitablement répartie sur le territoire, contribue selon lui à entretenir des ambiguïtés et des malentendus.