Intervention de Manuel Valls

Réunion du 25 octobre 2012 à 21h00
Commission élargie : immigration, asile et intégration

Manuel Valls, ministre de l'intérieur :

M. Richard a raison : ces questions sont difficiles, compliquées, non seulement parce qu'elles ont été utilisées sur le plan politique depuis des années – notre pays n'est d'ailleurs pas le seul à connaître un tel phénomène –, mais aussi parce que le rapport à l'autre, à l'étranger, est un problème très ancien dans notre société. Il faut essayer d'appréhender ce problème avec justesse, dans le respect des personnes, sans stigmatiser, avec la volonté de respecter les droits, mais sans faire preuve de naïveté. Nous savons en effet ce que peut coûter à une société le fait qu'une crise économique se conjugue avec une crise identitaire et culturelle. Cela peut conduire à des incompréhensions, des rejets, des mouvements de fond qui emporteraient tous les républicains. J'appelle donc à tenir un discours de responsabilité, qui doit se traduire par des actes.

Certes, nous sommes ici pour discuter d'un budget, mais derrière les chiffres, il y a des politiques, et aussi des mots. Or les mots, dans une société en crise, peuvent compter : ils peuvent aviver les tensions ou, au contraire, les apaiser en faisant appel à l'intelligence de nos concitoyens. Il est donc de notre responsabilité d'informer et de faire oeuvre de pédagogie. En disant cela, je ne cherche à donner aucune leçon.

M. Grandguillaume a, avec raison, placé son discours sous l'égide de Jean Jaurès et des notions de responsabilité, de vérité, de fermeté et de justice. C'est bien la démarche que nous essayons d'adopter.

La difficulté de ce budget, c'est qu'il touche à des questions très différentes, même si elles ne sont pas sans lien entre elles. Le choix a été fait par le Président de la République et le Premier ministre de conserver une cohérence à la politique migratoire, sous la responsabilité du ministre de l'intérieur. Je l'ai dit hier à propos de la mission « Sécurité » : il n'est pas nécessaire de défaire à tout prix ce qui a été fait, ou d'opérer systématiquement des ruptures pour être efficace, pour améliorer une politique ou faire en sorte qu'elle corresponde aux valeurs que nous jugeons essentielles. Défaire, c'est prendre le risque de perdre du temps et de faire passer des messages contradictoires, à l'intérieur comme à l'extérieur de notre pays. Nous ne voulions pas prendre cette responsabilité. C'est aussi une question de cohérence.

Monsieur Dolez, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire aux associations, je n'admets pas que le ministère de l'intérieur soit perçu uniquement comme celui de la police et de la répression. La police et la gendarmerie assument, certes, l'ordre républicain, car sans cet ordre il n'y a ni progrès social, ni droits, ni possibilité de vie commune. Qui, sinon les policiers et les gendarmes, pourrait assurer la régulation des flux migratoires ? Voulez-vous que ce soient les élus, les associations, les gardes champêtres, les curés ? Soyons sérieux ! C'est aux forces de l'ordre d'assumer pleinement ces responsabilités. Mais le ministère de l'intérieur c'est aussi le ministère des droits, et c'est sous le régime de la loi et de la Constitution qu'agissent ses fonctionnaires. Je le dis avec fermeté, car j'en ai assez de cette vision répressive du ministère de l'intérieur. Cette position fait l'objet d'un débat au sein de la gauche, mais pour ma part, je l'assume.

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