Intervention de Élisabeth Guigou

Réunion du 25 juin 2014 à 9h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉlisabeth Guigou, présidente :

Nous accueillons M. Claude Mandil et Mme Cécile Maisonneuve, qui vont nous donner leur analyse de la politique européenne en matière d'énergie et de climat : ce qui a été fait et ce qui reste à faire, les perspectives.

D'une part, la politique climatique semble piétiner. L'objectif des « trois fois vingt » du paquet énergie climat de 2008 pourrait être atteint en 2020. Cependant, les récents développements appellent à la vigilance. En Allemagne, qui a amorcé son « tournant énergétique », les émissions de CO2 sont à la hausse.

La politique énergétique, d'autre part, se heurte à d'importantes difficultés dans trois domaines : celui du marché du gaz, faute d'avoir su créer les conditions de la sécurité énergétique et de la diversification ; celui de l'électricité, faute pour certains pays, l'Allemagne, notamment, mais aussi l'Espagne, d'avoir su maîtriser le coût et les implications techniques d'un développement à marche forcée des renouvelables ; enfin celui du carbone, avec un prix de la tonne de CO2 beaucoup trop faible pour inciter les industriels à faire les investissements nécessaires à la poursuite de la baisse des émissions via le progrès technologique.

L'actuelle politique européenne de l'énergie est également prise en défaut par l'insuffisance de ses résultats en matière de prix, ce qui menace la compétitivité européenne. Notons également que les énergéticiens européens soulignent l'insuffisance des investissements.

Dans l'ensemble, cette schizophrénie européenne à vouloir traiter le climat sans aborder avec suffisamment de clarté la question énergétique ne menace-t-elle pas la réussite de sa transition énergétique et par conséquent, ce qui serait désastreux, la capacité de l'Europe à ouvrir la voie au reste du monde pour parvenir à l'horizon 2050 à l'économie décarbonée indispensable à la maîtrise de l'élévation des températures terrestres ?

Comment peut-on alors remettre la transition énergétique européenne sur une trajectoire soutenable avec notamment quatre conditions clefs : un niveau de prix adapté qui soit supportable pour le consommateur et qui ne menace pas l'avenir des entreprises européennes ; un développement maîtrisé des renouvelables dont le niveau de subvention ne produise pas les effets contraires à ceux recherchés ; un coût de la tonne de CO2 significatif ; enfin une coordination des Etats membres alors que le traité de Lisbonne leur laisse la responsabilité de leur mix énergétique.

Ce dernier point n'est pas le moindre comme l'illustre le cas de la politique allemande. La décision allemande de sortir rapidement du nucléaire par appel au charbon et au développement des énergies renouvelables a en effet la double conséquence de compromettre les objectifs climatiques européens et de poser de graves problèmes aux réseaux électriques du fait du caractère intermittent des nouvelles énergies.

Enfin, ne convient-il pas que l'Europe adopte une vision plus large de la transition énergétique, en donnant à sa stratégie une dimension industrielle que les seuls mécanismes du marché intérieur ne lui apportent pas et qu'elle se dote, d'une part, des outils donnant aux énergéticiens les conditions et la visibilité indispensables à leurs investissements d'avenir, et, d'autre part, d'un volet recherche et investissement très intégré en faveur des nouvelles technologies qui ne sont pas encore matures comme le solaire ?

Ce sont des questions massives et un vaste programme, mais je fais confiance à nos intervenants pour les traiter. Claude Mandil a en effet rédigé une note remarquable pour le think tank Synopia et les rapports de Cécile Maisonneuve sont également de très grande qualité.

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