Monsieur le ministre, je vous rappelle que notre discussion intervient en un moment très particulier. En effet, vous savez bien qu’en ce moment même, les têtes pensantes de la Commission européenne travaillent à un traité de libre-échange entre les États-Unis d’Amérique et l’Union européenne. La lecture des documents relatifs à ce traité ne laisse pas de susciter une certaine inquiétude. Les documents rédigés en anglais sont très instructifs par le fait même qu’ils manquent de la précision propre à la langue française. Le continent européen, qui est le premier pour les entreprises de services, pourra se ravitailler en matières premières et en produits énergétiques aux États-Unis. Parmi ces produits énergétiques, d’ailleurs, j’inclus le gaz de schiste liquéfié. Non rentable sur le continent américain, il nous sera vendu, à nous Européens, à un prix supérieur à celui que M. Schröder pourrait obtenir de Gazprom pour le gaz russe.
Plus sérieusement, la France a une particularité : ses terroirs, ses appellations d’origine contrôlée. Nous avons mis en place des mécanismes de protection de ce patrimoine culturel et immatériel qui constitue notre identité propre. Or l’article 10 de ce projet de loi donne incidemment au Gouvernement la possibilité de modifier profondément cet équilibre. C’est une espèce d’article-balai qui m’inquiète profondément. L’avenir de notre patrimoine gastronomique, viticole et agricole national est en jeu. Je crains que ces décisions du Gouvernement, de la Commission européenne et du Conseil de l’Union européenne, reviennent à ouvrir les portes de notre continent aux entreprises américaines, qui finiront par détruire notre identité.
Cet article pose ainsi une question très profonde. Il donne trop de puissance au Gouvernement, à qui je ne fais absolument pas confiance pour défendre les intérêts et le patrimoine de la Nation.