Les chiffres foisonnent, au point que l'on peine à s'y retrouver. Le CICE pèse 20 milliards d'euros. Est-il financé ou non ? Il est censé l'être par de la TVA, par des taxes écologiques dont on ne sait pas très bien ce qu'elles seront car on ne cesse de changer de pied, et par des économies – mais tout est financé par des économies ! Et encore faudrait-il dire lesquelles…
Nous sommes évidemment favorables à la baisse des charges et des impôts, mais le pacte de responsabilité coûte lui aussi de l'argent. Le coût du travail sera réduit par une baisse d'environ 10 milliards d'euros des cotisations patronales. Les mesures fiscales – suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), baisse du taux de l'impôt sur les sociétés, fin de la surtaxe exceptionnelle – représenteraient quelque 8 milliards. Pour les ménages, ce sont 5 ou 6 milliards qui seraient engagés d'ici à 2017. On en arrive au total à 30 à 35 milliards d'euros.
Face à ces dépenses, on trouve 50 milliards d'économies assez peu documentées. A-t-on mesuré l'effet de la ponction qui sera opérée sur les collectivités locales ? La vision optimiste des évolutions de l'ONDAM et de la masse salariale sur lesquelles on table est-elle bien réaliste ? Bref, les incertitudes sont nombreuses.
Il n'est dès lors pas étonnant que nous peinions à atteindre notre objectif de déficit, quelle que soit la manière dont on le calcule, et que nous devions le rectifier de jour en jour. Entre 2013 et 2014, le déficit est passé de 4,3 % du PIB à 3,8 % selon le Gouvernement, mais à 4 ou 4,1 % seulement selon la Cour des comptes et plusieurs économistes : la baisse ne dépasse pas 0,2 ou 0,3 point, ce qui est négligeable.
S'agissant des réformes structurelles, le texte est encore plus indigent. La réforme des collectivités locales est assurément structurelle, mais est-elle chiffrée ? La « stratégie nationale de santé » n'est rien d'autre que ce que l'on pratique depuis toujours : on lutte contre les radiologistes et les biologistes, ainsi que contre l'industrie pharmaceutique – au nom de la réduction de la dépense de médicaments –, et on développe l'ambulatoire. Ce n'est pas ce que j'appelle une réforme structurelle. Vient enfin la chasse aux opérateurs et aux taxes affectées : fort bien, mais c'est un peu léger pour fonder une stratégie de maîtrise des finances publiques.
Je me demande enfin si le Gouvernement a anticipé les effets sur la croissance du discours choc que M. Montebourg se prépare à prononcer…