Intervention de Benoît Hamon

Réunion du 2 juillet 2014 à 16h00
Commission des affaires économiques

Benoît Hamon, ministre de l'Éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, Mme Aurélie Filippetti, ministre de la Culture et de la communication, Mme Fleur Pellerin, secrétaire d'État chargée du Commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger, auprès du ministre des Affaires étrangères et du développement international, Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État chargée du Numérique, auprès du ministre de l'Économie, du redressement productif et du numérique, et M. Thierry Mandon, secrétaire d'État à la Réforme de l'État et à la simplification, auprès du Premier :

Je souhaiterais tout d'abord saluer le travail des deux rapporteures, Mmes Corinne Erhel et Laure de La Raudière.

Le numérique à l'école constitue un outil important pour lutter plus efficacement contre les inégalités sociales et scolaires et bâtir une école plus inclusive. Là où des expérimentations sont conduites, il bouleverse d'ores et déjà l'espace pédagogique de la classe car il motive les élèves, il suscite la participation de ceux qui n'intervenaient pas et il permet à des enfants frappés de troubles cognitifs ou atteints de handicaps comme la dyslexie et la dyspraxie de suivre la même leçon que les autres. Le bilan des pratiques pédagogiques testées en France et à l'étranger montre leur efficacité dans la lutte contre le décrochage et pour le rattrapage de certains élèves en difficulté.

La France se trouve moins bien équipée que les autres pays européens au collège et à l'école, mais mieux équipée au lycée, et ce dans les trois filières, générale, technique et professionnelle. Ainsi, 97 % des enseignants interrogés jugent que les ressources pédagogiques numériques constituent un atout, mais seuls 5 % d'entre eux les exploitent dans les classes, ce qui atteste de l'ampleur du chantier que nous avons à conduire.

Celui-ci a trois dimensions : le raccordement de l'ensemble des établissements, même les plus isolés, afin qu'une fracture numérique ne vienne pas s'ajouter aux fractures sociales et géographiques ; l'équipement des classes de tableaux interactifs, de terminaux mobiles et d'ordinateurs ; enfin, les ressources pédagogiques numériques nécessitent une préparation des enseignants, lors de leur formation initiale comme continue.

Le numérique en classe change le statut de l'erreur, car celle-ci s'efface sur une tablette ou sur un terminal mobile. Cela permet de recommencer, de retravailler, et de ne pas s'y arrêter. L'erreur se trouve ainsi au service des apprentissages et des progrès des élèves, ce qui modifie la relation entre l'enseignant et l'enfant. Au moment où le conseil supérieur des programmes (CSP) se penche sur le socle des connaissances et des compétences devant être acquises au terme de la scolarité obligatoire et où l'on réfléchit à l'évaluation de leur maîtrise, le chantier du numérique à l'école offre une opportunité de modifier les ressources pédagogiques pour les placer davantage au service des programmes et de la lutte contre les inégalités sociales et scolaires à l'école.

Le Gouvernement lancera un plan d'équipement des écoles et des collèges et incitera les collectivités territoriales à investir une fois que l'effet de levier sera suffisant ; en outre, il soutiendra la filière industrielle du numérique éducatif, dont le marché mondial est évalué à 92 milliards d'euros. Un certain nombre d'éditeurs sont prêts à prendre le tournant du numérique, mais il ne s'agit pas simplement de transformer un manuel scolaire en fichier pdf. Il y a lieu d'élaborer des programmes interactifs, nouveaux, innovants et qui s'appuient sur les expérimentations déjà existantes, afin que les enseignants exploitent toutes les opportunités offertes par les instruments numériques.

Le rapport met en lumière des carences dans l'enseignement de l'informatique à l'université ; cette situation a conduit Xavier Niel à créer l'Ecole 42, et je souhaite que l'on formule rapidement des propositions sur la manière d'améliorer l'enseignement de l'informatique. Nous portons un vif intérêt aux cours en ligne ouverts et massifs (CLOM) – ou MOOC pour l'acronyme anglais – qui constituent un instrument d'appui à la formation continue des professeurs et qui doivent être développés en France et dans l'espace francophone pour ne pas laisser la formation des élites francophones aux Anglo-Saxons. Il s'agit d'un enjeu de souveraineté important.

Je suis favorable à ce que la réforme des rythmes scolaires permette d'inciter des collectivités locales et des écoles à initier les élèves du primaire au code et au langage informatique. L'initiation au fonctionnement et aux règles du langage informatique figure dans la proposition de socle des connaissances et des compétences avancée par le Conseil supérieur des programmes (CSP) ; l'élève français devra ainsi savoir que les équipements informatiques utilisent une information codée, devra connaître les principes des langages de programmation et devra être capable de réaliser de petites applications utilisant des algorithmes. Les professeurs de technologie demandent à dispenser cet enseignement. Il me paraît prématuré d'en faire une matière obligatoire faisant partie des apprentissages fondamentaux au primaire, mais cela peut s'insérer dans le socle du collège.

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