Seul l'État jacobin peut réformer et imposer, paradoxalement, la décentralisation et la réforme de l'État. Les élus locaux, qu'ils soient de droite ou de gauche, seront toujours des freins au progrès. Ils l'ont été depuis l'année 1715, lors de la cassation du testament de Louis XIV, durant laquelle la royauté a perdu contre les parlements le combat entrepris. Le Gouvernement rencontrera de multiples résistances, même dans les rangs de ses amis.
J'ai essayé de réunir la Normandie, ayant, pour ce faire, de solides appuis, à commencer par le député-maire de Cherbourg – n'est-ce pas, monsieur le ministre ? – et le président de la région de Basse-Normandie. L'opposition de quelques barons de Haute-Normandie a eu raison du projet. Je suis convaincu que la réforme que vous défendez s'impose, et qu'elle traduira dans les faits des options essentielles en matière de recomposition territoriale.
Chacun sait que M. Vallini s'adonne à la culture des roses. Pour sa réforme, s'orientera-t-il vers un jardin à la française ou à l'anglaise ? Plus précisément, la préfecture de région et l'assemblée départementale devront-elles être situées au même endroit ? En Normandie, l'une pourrait-elle être à Rouen et la seconde à Caen ?
Les services de l'État, qui doivent montrer l'exemple en matière de décentralisation, vont-ils se déplacer, ou bien rester où ils se trouvent aujourd'hui ? Les incidences de ce choix seront déterminantes sur l'emploi. L'inspection académique, qui représente la moitié des services de l'État dans ma circonscription, sera-t-elle regroupée dans un même lieu ? C'est au vu de ce critère que les électeurs se prononceront lors des élections. En Alsace, ils redoutaient que tous les services ne se concentrent en un seul endroit. C'est parce que Strasbourg a tué Colmar que la réforme préparée en Alsace n'a pas abouti.
Comment choisirez-vous les capitales de région ? Pourquoi ne pas interroger à ce sujet des académiciens comme Erik Orsenna ou Emmanuel Le Roy Ladurie, dont l'avis ne serait pas moins honorable que celui des membres du Conseil d'État ou de la Cour de cassation ?
Bien que j'aie lu le projet de loi avec attention, j'ai mal compris le rôle imparti aux départements. Si l'un d'eux se tourne détourne de sa région d'origine, sa décision s'imposera-t-elle à celle-ci ?
Enfin, ne sombrez pas dans le travers qui consiste à augmenter le nombre d'élus. Si l'on réduit à 150 l'effectif de chaque conseil régional, on atteindra déjà le nombre de 1 525 élus. Les assemblées trop nombreuses sont ingérables. Nous étions 49 en Basse-Normandie, ce qui suffisait largement. À mon sens, le chiffre de 100 conseillers pour les nouvelles régions est un maximum. Il permettrait de réaliser des économies et de gagner en efficacité.
Quoi qu'il en soit, mon soutien vous est acquis pour mener à bien cette vaste réforme.