Intervention de Marie-Françoise Bechtel

Réunion du 8 juillet 2014 à 17h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Françoise Bechtel :

Je suis élue dans une circonscription située en Picardie, région qui offre le contre-exemple d'une carte rationnellement définie, puisqu'elle est composée de trois départements dont chacun a vocation à rejoindre un ensemble géographique différent. Ce découpage pourrait toutefois avoir un sens s'il reposait sur une logique claire. À ce propos, vous avez affirmé, monsieur le ministre, que la réforme ne visait pas à créer des régions répondant à un espace identitaire – ce que je salue –, mais à bâtir des zones économiques cohérentes, volontaristes et jouant un rôle dans le redressement économique du pays. Ne faut-il pas faire plus de place dans le projet de loi à ces deux paramètres : des régions vastes, hétérogènes et reposant sur certains sacrifices identitaires d'une part, et appelées à devenir de grandes circonscriptions économiques et d'aménagement du territoire, d'autre part ?

Est-il raisonnable que la région devienne un organe de gestion technique, quand la proximité avec les citoyens réclamerait que la compétence en matière de routes, de collèges ou d'aide sociale reste en grande partie située à un échelon territorial inférieur ? Des régions aussi grandes et aussi hétérogènes répondraient-elles encore à la définition des collectivités territoriales posée par la loi de 1982, maintenant très ancienne et qui reproduisait d'ailleurs les vieilles lois républicaines de 1871 et de 1884 sur le département et la commune ? L'article 72 de la Constitution dispose que les communes et les départements sont des collectivités territoriales qui « s'administrent librement par des conseils élus » : les régions appelées à devenir de grands espaces économiques – ce que j'approuve – entrent-elles dans cette catégorie ? Ne conviendrait-il pas de faire de la région nouvelle une émanation des territoires qui lui sont inférieurs, et notamment des départements – éventuellement regroupés deux par deux pour reprendre l'idée de Michel Debré –, des intercommunalités et des métropoles, ces deux derniers échelons représentant des éléments modernes de territorialisation ? Ainsi, on conserverait l'espace démocratique proche des citoyens et la proximité dans la gestion des services, tout en dégageant les régions de la gestion quotidienne de certaines compétences – celle des lycées, par exemple – afin qu'elles se consacrent davantage au pilotage économique des territoires. Une réforme ambitieuse, suivant votre conception, ne devrait-elle pas aller jusque-là ?

Il est opportun de procéder à la montée en puissance des intercommunalités, mais le rythme de ce mouvement ne doit pas être trop rapide car la vie communale, notamment dans les départements ruraux, reste un élément important de l'administration des services, de la cohésion territoriale et du lien entre les citoyens.

Je crains que les administrations déconcentrées n'effectuent qu'un service du pauvre en direction des territoires relégués, du fait de l'éloignement de ceux-ci des métropoles riches et des intercommunalités puissantes.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion