Intervention de Élisabeth Guigou

Réunion du 2 juillet 2014 à 9h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉlisabeth Guigou, présidente :

Nous recevons ce matin Mme Anne Paugam, directrice générale de l'Agence française de développement (AFD), et M. Claude Périou, directeur général de Proparco, accompagnés de M. Éric Baulard, directeur exécutif en charge des risques à l'AFD, ainsi que Mme Marie Hélène LOISON, Directeur général délégué de la Proparco en charge des opérations pour une audition, ouverte à la presse, qui sera essentiellement consacrée au rôle du secteur privé dans la politique d'aide au développement.

Le développement économique durable des pays partenaires passe par le développement du secteur privé local. La contribution des entreprises étrangères au développement est désormais reconnue officiellement, notamment par la loi d'orientation et de programmation que nous avons adoptée il y a quelques jours.

Par ailleurs, l'AFD est un outil de la diplomatie économique. C'est la raison pour laquelle nous avons conditionné notre avis favorable au contrat d'objectifs et de moyens (COM) de l'AFD au souhait que l'agence définisse dans ses appels d'offre des critères précis permettant de cibler autant que faire se peut les compétences et savoir-faire des entreprises françaises.

Vous nous direz à ce propos quel dialogue l'AFD a noué avec les milieux d'affaires français et avec les entreprises présentes dans les pays où elle intervient, et quels mécanismes l'agence met en oeuvre pour cet objectif, avec quels résultats, et quelles sont aussi les comparaisons que l'on peut faire avec les pratiques des institutions comparables à l'AFD.

Par ailleurs, selon votre dernier rapport d'activité, les interventions du groupe AFD au profit du secteur productif ont représenté près de 720 millions d'euros en 2013. Elles ont pour l'essentiel concerné le secteur bancaire et financier, l'agro-industrie, le tourisme, la formation professionnelle, le renforcement des capacités commerciales et le transport. Nous serons intéressés par la présentation que vous nous ferez de la mission de Proparco, de ses objectifs et mécanismes d'intervention, tout particulièrement en Afrique subsaharienne, qui constitue la zone prioritaire de notre politique d'aide au développement.

Enfin, je ne peux évidemment clore ce propos introductif sans mentionner la question de la transparence et des juridictions non coopératives, qui est l'expression pudique pour désigner les paradis fiscaux, contre lesquels j'ai un tropisme particulier. Car c'est par eux que transitent toutes les formes d'argent sale, qu'il s'agisse de la fraude, de l'évasion fiscale légale ou du blanchiment d'argent du crime.

Alors que j'avais institué, il y a douze ou treize ans, avec le ministre des finances de l'époque, Dominique Strauss-Kahn, les premières listes à l'OCDE contre les paradis fiscaux, celles-ci ont disparu dans les dix ans qui ont suivi, puis réapparu après la crise économique de 2008. Il est vrai que la situation a changé et beaucoup de ces paradis se conforment aux nouvelles règles imposées par la communauté internationale. Deux de nos collègues de la commission ont d'ailleurs rendu un rapport sur ce sujet.

Vous comprenez donc bien, qu'après l'article récemment publié dans Le Canard enchaîné, selon lequel beaucoup des interventions de Proparco passent par des fonds d'investissement localisés dans des paradis fiscaux, nous nous interrogions. Si les fonds d'investissement sont très utiles, en prenant des risques que les banques ne veulent pas courir, pourquoi faut-il qu'ils soient immatriculés dans des juridictions considérées encore comme non coopératives – en l'occurrence Chypre, Jersey, le Luxembourg, l'île Maurice, les îles Caïman et les îles Vierges britanniques –, même si elles ont fait quelques progrès pour se conformer aux règles internationales ?

Quels sont les montants localisés par Proparco dans les paradis fiscaux et quelle politique met-elle en place dans ce domaine ? De quelle manière celle-ci a-t-elle évolué depuis qu'en 2009 le G20 a chargé l'OCDE de renforcer la mise en place des normes en matière de transparence ? Et quelles mesures concrètes le groupe AFD a-t-il pris pour s'y conformer ?

Par ailleurs, quelle est la position de vos deux tutelles sur la question des investissements dans des paradis fiscaux ? Dans un rapport que j'avais rendu avec d'autres collègues dans le cadre de la commission des affaires européennes lors de la précédente législature, nous avions identifié cette fameuse maison des îles Caïman, qui immatriculait quelque 90 000 sociétés et que le président Obama a récemment qualifiée comme il le fallait.

N'y a-t-il pas dans le fait d'investir dans des paradis fiscaux pour des raisons d'évitement fiscal une contradiction grave avec l'objectif même de l'aide au développement ? Si ces investissements permettent d'être moins taxé, ce sont nécessairement des recettes fiscales en moins pour certains pays : lesquels ?

Je rappelle que si les îles Caïman sont passées en phase 2 en 2012, Proparco y aurait investi en 2008, c'est-à-dire juste avant que les listes de l'OCDE soient rétablies.

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