Nous sommes aussi allés sur le terrain, dans dix pays d'Afrique où notre empreinte militaire est significative : le Niger, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, le Mali, le Sénégal, le Gabon, la République centrafricaine, le Tchad, les Émirats arabes unis, où notre base s'inscrit dans la cinématique générale de l'Afrique dans la bascule générale des moyens et fonctionne en quelque sorte « en vases communicants » avec notre dernière destination d'étude : Djibouti. Et quand je dis : sur le terrain, c'est que nous ne sommes pas restés barricadés dans des hôtels, des ambassades et des palais présidentiels ; nous sommes allés au plus près de nos militaires, partager leurs rations, partager leur hébergement, voir les sites d'entraînement ou d'opérations. En Centrafrique comme au Mali, au Tchad comme au Gabon, nous avons tenu à sortir des capitales quelles qu'aient été les réticences, pour aller dans le Nord du Mali et dans l'Est de la RCA, sur les centres d'aguerrissement à la forêt équatoriale ou sur les zones d'opérations tripartites dans les déserts du Nord du Tchad. Il n'a pas toujours été facile d'obtenir que les rapporteurs puissent aller le plus possible au contact de nos militaires, sur le terrain. Il y avait parfois de bonnes raisons : par exemple, la situation du Nord du Mali ne nous a pas permis de nous rendre à Tessalit ; dans d'autres cas, il a fallu être plus insistants. À chacun de nos déplacements, nous n'avons pas fait seulement la « tournée des popotes » : nous nous sommes attachés à comprendre les enjeux stratégiques dans lesquels entre la France quand elle s'implante ou s'engage militairement, en parlant directement aux plus hautes autorités civiles et militaires des nations hôtes. Nous nous sommes aussi intéressés à deux autres aspects de la présence française au sens large. D'une part, les retombées économiques de notre engagement militaire. N'ayons aucune pudeur à le dire : quand des Français ont versé leur sang pour préserver un pays de la guerre civile voire du djihadisme international, il y a quelque chose de troublant à voir qu'in fine, on « travaille pour le Roi de Prusse »… Et d'autre part, notre rayonnement global, c'est-à-dire l'ensemble des moyens d'influence par lesquels on peut faire en sorte qu'aujourd'hui encore et demain peut-être, la voix de la France, en Afrique, continue à porter un peu plus haut que celle d'autres puissances qui lorgnent sur les richesses et les intérêts stratégiques de ce continent.