Tout à fait. Le second volet de la réorganisation de nos forces concerne les forces prépositionnées, c'est-à-dire stationnées à titre permanent. Suivant les orientations du Livre blanc et de la LPM, le Gouvernement est en train de procéder à une vaste manoeuvre de réorganisation de ce dispositif.
Ne nous racontons pas d'histoire : l'objectif principal de cette manoeuvre, c'est de faire des économies, en réduisant le nombre de personnels déployés. L'idée est de la ramener de 3 800 à 3 300 pour les seules forces de présence – Dakar, Libreville, Djibouti, Abou-Dhabi.
Par ailleurs, la situation politique de la Côte d'Ivoire nous ouvre une opportunité qu'il faut savoir saisir pour y pérenniser notre implantation et profiter des grandes potentialités d'Abidjan.
Compte tenu de ces contraintes, le problème est alors de trouver le dispositif le plus cohérent. Celui qui est envisagé, et pas encore définitivement arbitré, l'est à une grande exception près : Djibouti.
Quelle est l'idée ? Il faut, pour la comprendre, bien saisir le fait que notre dispositif en Afrique est organisé autour de deux missions : les opérations et la coopération. Pour les opérations, nous disposons de deux réservoirs de forces, appelés « bases opérationnelles avancées » : l'un à l'est, c'est Djibouti. L'autre à l'ouest, c'est aujourd'hui Libreville. Pour la coopération, la précédente période de programmation avait créé un nouveau type de prépositionnement, plus léger que la base opérationnelle avancée : le « pôle opérationnel de coopération ». C'est la nouvelle vocation de Dakar, depuis 2010, et l'opération Serval a montré que cette formule permettait de développer nos liens de coopération, qui sont désormais la principale source de notre légitimité en Afrique – on n'en est plus à l'armée d'Afrique ! – sans perte de réactivité pour l'opérationnel. C'est bien l'état-major de Dakar qui a armé en urgence l'opération Serval.
L'idée qui sous-tend la manoeuvre actuelle consiste ainsi à transférer de Libreville à Abidjan notre base opérationnelle avancée ouest-africaine, pour profiter des potentialités bien supérieures qu'offre cette dernière. On laisserait à Libreville un pôle opérationnel de coopération, construit sur le même mode que celui de Dakar. C'est une sorte de « révolution culturelle » pour une base française aussi bien intégrée dans le tissu local. Libreville passerait ainsi de 900 hommes à 350, tandis qu'on créerait ex nihilo une base permanente à Abidjan, armée par 950 personnels. Cette perspective n'est pas accueillie avec le sourire par nos partenaires gabonais, mais notre Gouvernement leur a fourni des explications.
Le problème est à l'est : c'est Djibouti. On a l'impression que Djibouti est la « variable d'ajustement » de ce dispositif : pour tenir dans « l'enveloppe » des 3 300 hommes, on propose de supprimer 1 000 postes à Djibouti, qui n'en aurait plus que 950.