L'éparpillement de la responsabilité en matière de gestion du risque est l'une des difficultés que doit résoudre la gouvernance. Encore faut-il s'entendre sur ce que l'on entend par gestion du risque et ne pas réduire cette notion au contrôle de la pratique des tarifications ou de la T2A dans les établissements sanitaires. La gestion du risque, c'est la technique qui doit nous permettre de prioriser nos investissements de santé et d'allouer nos ressources aujourd'hui pour améliorer, demain, la santé des Français et réaliser, après-demain, des économies. Aujourd'hui, l'absence de pilotage et le défaut de gouvernance déjà évoqués privent les directeurs d'ARS des informations leur permettant d'investir là où ce serait le plus efficient en termes de santé et de qualité de l'offre de soins.
J'ai pour ma part priorisé deux parcours en région Limousin : le premier lié à l'autisme, le second à la personne âgée dépendante. Sur ce dernier, je disposais d'éléments médico-économiques issus de l'expérience de prévention à domicile menée par le pôle gériatrie du CHU, dont je vous ai déjà parlé. Je savais donc qu'en investissant dans le déploiement de ce dispositif sur l'ensemble de la région, j'allais permettre le maintien à domicile des personnes âgées dans de bonnes conditions et réaliser ainsi, au bout du compte, d'importantes économies.
Pour l'autisme, je ne disposais que d'études canadiennes et américaines, recommandant le dépistage et le diagnostic précoce, pour un accompagnement intensif le plus tôt possible. En France, le diagnostic et l'accompagnement ne se font pas, en moyenne, avant l'âge de six ans, alors que nous disposons des moyens techniques pour le faire dès dix-huit mois. Cela se traduit, d'une part, par une perte de chances pour les malades, chez qui nous intervenons trop tard et, d'autre part, par un surcoût global, à l'âge de quarante ans, de 1,3 million de dollars selon les études parues outre-Atlantique. Compte tenu du taux de prévalence de l'autisme, évalué par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) à 1 pour 140, cela représente pour notre pays six milliards d'euros, actuellement investis dans les hôpitaux psychiatriques et les maisons d'accueil spécialisées, où vivent des personnes lourdement accompagnées alors qu'elles pourraient l'être beaucoup moins.