Intervention de Véronique Louwagie

Réunion du 16 juillet 2014 à 9h00
Commission spéciale pour l'examen du projet de loi relatif à la simplification de la vie des entreprises

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVéronique Louwagie :

L'article 1er autorise le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures visant à « favoriser le développement des dispositifs de titres simplifiés et de guichets uniques de déclaration et de paiement des cotisations et contributions de sécurité sociale ». Il est notamment envisagé de relever le plafond pour accéder au TESE à vingt salariés, au lieu de neuf, et d'étendre son application à l'outre-mer.

Je souscris à ces objectifs louables de simplification et de lisibilité. Mais comment concilier la simplification des procédures et la complexité toujours plus grande du droit du travail ? Est-il possible d'alléger la forme alors que le fond est sans cesse alourdi par des obligations toujours plus fortes pour les entreprises ?

Je souhaite prendre quelques exemples pour démontrer les limites et les risques de l'exercice. Le TESE permet d'effectuer en ligne les formalités liées à l'embauche. Le formulaire rempli vaut contrat s'il est signé par l'employeur et le salarié. Mais, si nous voulons faciliter la tâche des entreprises, nous devons leur apporter de la sécurité dans les relations entre l'employeur et le salarié. Aujourd'hui, aucune garantie n'entoure le contenu de ce formulaire.

Le problème se pose également lors de la rupture du contrat de travail. Dans l'exposé sommaire de l'amendement, je rappelle certains contentieux auxquels elle a donné lieu. La chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 5 mars 2014, a condamné un employeur à verser un rappel de 13 000 euros au motif que le TESE ne précisait pas la durée du travail dans un contrat à temps partiel. Si le temps de travail n'est pas mentionné dans le contrat, c'est le droit commun qui s'applique, en l'occurrence la durée légale. Précédemment, dans un arrêt du 6 novembre 2013, un employeur a été condamné à verser des dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail.

Il y a une vraie difficulté à concilier la simplification souhaitée et la protection nécessaire face à la complexité du droit de travail. Le Parlement a l'obligation de faire en sorte que les relations entre le salarié et l'employeur soient sécurisées.

Qui gérera les dépassements de seuil ? L'employeur ou l'URSSAF ? À partir de neuf salariés, l'entreprise est assujettie au versement transport. À partir de dix, la contribution au financement de la formation professionnelle passe de 0,55 % à 1,5 % et le forfait social sur les cotisations patronales de prévoyance s'applique. Qui décidera du franchissement du seuil ?

Cet article relève de la fausse simplification. La vraie simplification consisterait à réduire le nombre de lignes sur un bulletin de salaire, qui oscille entre dix et vingt-cinq, ainsi que le nombre d'opérations sur ce dernier, qui peut aller de 30 à 90.

Autre point crucial, à qui revient-il d'établir le bulletin de salaire ? Est-ce vraiment le rôle de l'URSSAF ? Son rôle de contrôle est-il compatible avec cette mission ?

En conclusion, cet article n'apporte pas de simplification. Pis, il conduit à une insécurité juridique. On peut penser qu'en confiant à l'URSSAF certaines tâches, les contraintes pour l'entreprise s'en trouvent allégées. Mais elles ne le sont pas. Elles le seront lorsque les obligations d'embauche seront moins pesantes et que le contenu d'un bulletin de salaire ainsi que les formalités de rupture du contrat de travail seront simplifiés. Or, il n'en est rien. Trois contraintes nouvelles vont peser sur les entreprises : à compter du 1er janvier 2015, la création du compte personnel de formation ; depuis le 1er juin 2014, la mention dans le certificat de travail du maintien à titre gratuit des garanties de dépenses prévues par le contrat de prévoyance de l'entreprise au profit des salariés involontairement privés d'emploi ; à partir du 1er janvier 2016, la généralisation de la complémentaire santé et la gestion de la portabilité.

Cet article est un leurre. C'est pourquoi j'en propose la suppression. Il nous faut travailler résolument sur le contenu du code du travail.

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