Intervention de Henri Brichart

Réunion du 16 juillet 2014 à 9h00
Commission des affaires économiques

Henri Brichart, vice-président de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles, FNSEA :

Plusieurs signaux très inquiétants démontrent que la situation de l'agriculture en France, et par conséquent de l'agroalimentaire, est en déclin. Les comparaisons internationales, notamment avec des voisins proches comme les Pays-Bas et l'Allemagne, révèlent que nous perdons un grand nombre de parts de marché, et que nous sommes passés du deuxième rang des exportateurs au cinquième. Plus grave, certains secteurs subissent même des pertes de production – moins 30 % de surfaces de légumes en quinze ans, moins 3 % pour le porc, moins 18 % pour la volaille. Plus grave encore, nous accusons un retard important en termes d'innovation et de modernisation, puisque l'investissement en bâtiments agricoles a chuté de 30 % en quinze ans et que 30 % du parc de bâtiments de volailles a plus de trente ans. Le constat est d'autant plus inquiétant que l'agriculture participe dans une large mesure à l'économie dans les territoires.

Les causes de cette situation sont diverses : l'inflation de normes et de contraintes, la sur-transposition des réglementations européennes, des charges fiscales et sociales élevées et instables. Dans un monde structurellement volatil, le marché intérieur des fruits et légumes et de la production animale est devenu très compliqué. Depuis une dizaine d'années, il est agité par une guerre des prix incessante, qui renvoie à la problématique de la déflation.

Dans le secteur laitier, l'Allemagne et les Pays-Bas sont passés devant nous parce qu'ils ont su créer sur leur marché intérieur une forme de rente de situation qui les rend extrêmement forts pour aller à la conquête d'autres marchés. Comme le montrent des chiffres publiés récemment par la Direction générale de l'agriculture et du développement rural (DG AGRI), au niveau du consommateur, les prix des produits laitiers en France sont restés stables, alors qu'ils ont enregistré une hausse de 3,5 % dans l'ensemble de l'Union européenne et de 8,7 % en Allemagne. Sans prétendre qu'il faille atteindre de tels niveaux de hausse, on voit que le secteur des productions animales est confronté à un problème réel, en particulier à cause d'une flambée du coût des intrants. Or ces difficultés peuvent mettre en cause l'avenir de ces productions.

À ce stade, deux types de solutions s'offrent à nous.

Le premier concerne la filière au sens large, du producteur au consommateur. D'abord, il faut en finir avec cette notion de « prix le plus bas », qui est destructrice de valeur ajoutée et risque, à terme, d'engendrer une perte de qualité et de fiabilité. Il faut redonner une vraie valeur aux produits, leur rendre leur juste prix – dans des secteurs comme celui du porc, ils ne veulent plus rien dire, avec les promotions permanentes. La question est clairement posée de la transmission des coûts le long de la chaîne alimentaire, sachant que le consommateur est très protégé en France.

Ensuite, dans un contexte de distorsion de concurrence importante avec d'autres pays, la responsabilité nous incombe, en tant que filière, de promouvoir le label « Origine France ».

Le second type de solutions a trait au rôle de la puissance publique. Beaucoup de lois ont été votées, et nous sommes assez satisfaits des dernières évolutions introduites par la loi Hamon. Toutefois, le problème n'est pas tant de voter des lois que de les faire correctement appliquer. Pour nous, la régulation de la chaîne alimentaire par les pouvoirs publics est une priorité : nous aimerions qu'ils puissent s'en saisir.

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