Intervention de Najat Vallaud-Belkacem

Réunion du 15 juillet 2014 à 16h00
Commission des affaires économiques

Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports, sur la politique de la ville :

Le calendrier est en effet assez volontariste et ambitieux, monsieur Pupponi, mais il était important de déclencher une dynamique. Dans la plupart des territoires, cependant, il y aura très probablement deux temps : d'abord, à la fin de 2014, la définition des objectifs stratégiques du contrat de ville ; puis, dans les trois premiers mois de 2015, la signature de ces contrats par chacun des partenaires. Ces dispositifs seront d'autant plus efficaces que les partenaires seront plus nombreux. Nous sommes d'ailleurs convenus avec la Caisse des dépôts que le représentant de la Caisse sur le territoire concerné sera signataire du contrat de ville, ce qui devrait répondre à votre question concernant le « mode d'emploi ».

Quant aux conseils citoyens, il ne s'agit pas de plaquer sur un territoire un dispositif superficiel. Je suis agréablement surprise de la rapidité de leur mise en place dans votre circonscription. Peut-être cela prendra-t-il plus de temps dans d'autres quartiers. Mais, dans tous les cas, la continuité du financement des associations sur le terrain n'est nullement remise en question.

Par ailleurs, Sylvia Pinel, ministre du logement et de l'égalité des territoires, a indiqué cet après-midi que les discussions avec Action Logement avançaient de façon satisfaisante. Le montant de la contribution de l'organisme à l'ensemble des politiques nationales sera relevé à hauteur de 1 milliard d'euros en 2016, 900 millions en 2017 et 700 millions en 2018. Cette enveloppe financera le nouveau PNRU à hauteur de 850 millions sur les trois prochaines années, sachant qu'il faut également acquitter ce qui restait à payer du premier programme. Les discussions avec Action Logement devraient s'achever au mois de septembre.

Lors de la dernière réunion du conseil d'administration de l'ANRU, au mois de juin, nous avons engagé la modification du règlement intérieur de l'Agence afin de permettre de lancer des études dans le cadre du nouveau programme. La première liste des quartiers considérés comme les plus prioritaires sera proposée en septembre et les décisions prises au début de 2015. Les territoires qui auraient déjà signé leur contrat de ville ont la possibilité d'y adjoindre un protocole de préfiguration qui sera évidemment pris en compte.

S'agissant de l'exonération de TFPB, il est vrai que les bailleurs n'ont pas toujours joué le jeu et réinvesti les montants appropriés dans les quartiers prioritaires. Nous sommes d'ailleurs en train de travailler avec l'Union sociale pour l'habitat à une charte rassemblant les engagements que nous souhaitons lui voir prendre. Je vous invite bien volontiers à vous y associer. Il faudra organiser par la suite un suivi du respect de ces engagements.

La simplification des dispositifs est précisément un des objectifs de cette réforme, monsieur Fasquelle : nous avons désormais une cartographie unique, 1 300 quartiers, pas de sigles divers et variés, mais des crédits d'intervention de la politique de la ville et un renforcement de la mobilisation du droit commun dans les quartiers prioritaires.

Lorsque des communes sortent du dispositif, c'est soit qu'elles vont mieux – la vocation d'un territoire bénéficiant de la politique de la ville est d'en sortir à un moment ou à un autre –, soit qu'elles n'auraient jamais dû y entrer – nous en avons découvert quelques exemples –, soit qu'elles ne répondent pas au critère unique retenu, qui est, je le rappelle, un revenu des habitants inférieur de 60 % au revenu moyen en France. Cela étant, lorsqu'il existe un risque de fragilisation du fait de la sortie du dispositif, la veille active que nous prévoyons permettra de mobiliser davantage le droit commun à leur bénéfice et de les aider à mener à bien les contrats de ville. Nous avons reçu beaucoup d'élus depuis trois mois et nous continuerons de le faire pour examiner en détail la situation des territoires. Mais, si l'on veut faire cette réforme, il faut bien se plier à la règle adoptée.

Aujourd'hui, deux ministres s'occupent en réalité de l'égalité des territoires : Sylvia Pinel sous l'angle de l'aménagement du territoire, notamment en ce qui concerne les zones rurales, et moi-même sous l'angle de la politique de la ville. Ma collègue est en train de mettre en place un dispositif de contrats de centre bourg, destiné à donner un coup de pouce aux territoires ruraux en difficulté. Alors que, par le passé, les problèmes des zones rurales et ceux des quartiers urbains étaient traités de façon séparée, nous avons désormais une seule structure, le commissariat général à l'égalité des territoires, qui regroupe l'ancienne DATAR (délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale) et le SGCIV (secrétariat général du comité interministériel des villes).

L'objectif de la politique de la ville dans les 1 300 quartiers prioritaires repose sur trois piliers : un pilier urbain, un pilier économique et un pilier social.

En matière d'urbanisme, il s'agit de remplacer de l'habitat très dégradé et d'offrir une meilleure qualité de vie, ce qui inclut le bâti, mais aussi les transports, les commerces, etc.

Du point de vue économique, le taux d'emploi des habitants de ces quartiers est de 18 points inférieur à la moyenne nationale. Le chômage des jeunes ne cesse d'y augmenter, alors qu'il a plutôt régressé en France ces derniers mois. Notre objectif est de réduire cet écart de moitié en 2017, ce qui suppose que nous mettions le paquet sur le développement de l'activité économique : outre les 600 millions d'euros de soutien aux entreprises issus de la Caisse des dépôts et du programme d'investissements d'avenir, nous avons obtenu que la Banque publique d'investissement double ses prêts à la création d'entreprises dans ces quartiers et nous avons élargi les garanties de prêts bancaires.

Nous constatons aussi que le dispositif des emplois francs n'a pas fait ses preuves : alors qu'on escomptait annuellement 5 000 emplois, on en est à 130 cette année. Par pragmatisme et souci d'efficacité, nous avons décidé d'y mettre fin et de soutenir les « clubs ambition », dispositif de terrain qui a vu le jour en 2006 en Provence-Alpes-Côte d'Azur. Ces structures permettent d'accompagner, de « coacher » les jeunes en recherche d'emploi, avec trois mois de formation intensive pour qu'ils se mettent en phase avec le marché du travail. Les résultats sont probants : 58 % d'insertion en emploi à la fin des trois mois. Notre objectif est de mettre en place 500 à 700 de ces clubs dans les quartiers prioritaires d'ici à 2020.

En matière sociale, je vous renvoie à mes propos sur le soutien aux associations, la sanctuarisation des crédits d'intervention de la politique de la ville et le rôle des bailleurs sociaux dans la gestion urbaine de proximité. Nous accordons une attention particulière, madame Allain, à la précarisation, partout signalée, des familles monoparentales conduites par une femme. Nous avons demandé aux préfets de prévoir dans les contrats de ville une réponse spécifique à cette question, notamment en ce qui concerne les gardes d'enfants, l'articulation entre la vie personnelle et la vie professionnelle, et l'accès de ces femmes à des emplois associatifs.

Quant au FISAC, il est prévu d'affecter un tiers de ses ressources aux quartiers prioritaires. En outre, le jour même où nous signions avec la Caisse des dépôts la convention permettant de mobiliser 400 millions d'euros en soutien à l'investissement privé, l'établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA) décidait d'affecter 75 millions d'euros à la revitalisation des espaces commerciaux et artisanaux des quartiers.

La mobilisation du droit commun, monsieur Chassaigne, est un des aspects de l'action de mon prédécesseur François Lamy, qui a passé avec douze ministères des conventions d'objectifs. Ce n'est pas un hasard si 40 % des postes créés depuis deux ans sont allés aux territoires prioritaires : c'est le résultat d'une volonté politique. Dans le cadre de la réforme de son réseau d'éducation prioritaire, l'éducation nationale va d'ailleurs s'appuyer sur les mêmes indicateurs de pauvreté et de niveau de revenu des familles que nous.

La nouvelle carte des quartiers prioritaires fait particulièrement ressortir la dégradation de l'habitat privé dont vous faites état. L'ANRU passera un partenariat avec l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) pour traiter ce problème.

Madame Allain, dans le cadre de la charte « Entreprises et quartiers », qui engage les grandes entreprises à mener des actions spécifiques dans les quartiers prioritaires, nous avons signé, il y a dix jours, une convention aux termes de laquelle cinquante grandes entreprises s'engagent à recruter davantage dans les quartiers. Elles chargeront leurs salariés d'y parrainer ou d'y accompagner des projets. Elles proposeront des apprentissages aux jeunes. Je vous donnerai, si vous le souhaitez, le détail de ces mesures.

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