Intervention de Élisabeth Guigou

Réunion du 9 juillet 2014 à 10h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉlisabeth Guigou, présidente :

Nous accueillons Mme Hélène Duchêne, directrice des affaires stratégiques au ministère des affaires étrangères, et M. Pierre Lévy, directeur de l'Union européenne, pour une audition qui n'est pas ouverte à la presse.

La crise ukrainienne conduit à s'interroger sur la pertinence des politiques conduites par l'Union européenne et par l'OTAN au cours des dix dernières années et sur ce que pourrait être le rôle de ces organisations à court et à plus long terme. Les affrontements dans la région du Donbass, à l'est de l'Ukraine, et la signature, lors du Conseil européen du 27 juin dernier, des accords d'association avec l'Ukraine, la Géorgie et la Moldavie nourrissent ces interrogations.

On peut en effet se demander si les négociations de ces accords d'association ont été conduites avec toutes les précautions nécessaires pour qu'ils n'apparaissent pas comme dirigés contre les intérêts de la Russie ou comme en faisant fi. On a certes exclu d'emblée qu'ils offrent explicitement une perspective d'adhésion de ces États à l'Union, et il ne pouvait être question d'accorder à la Russie un droit de veto sur la signature des accords d'association. Mais on peut avoir le sentiment que les négociations ont longtemps été menées de manière strictement technique, sans direction politique, et que cela a pu servir de prétexte à la Russie pour justifier l'affrontement actuel en Ukraine. Cela n'excuse en rien l'attitude de M. Poutine au cours des derniers mois ni ne remet en cause notre condamnation de l'annexion de la Crimée.

L'accord d'association avec l'Ukraine a pour enjeu principal la préservation des relations économiques de ce pays avec la Russie, car l'imbrication entre les économies russe et ukrainienne est telle qu'il y a, pour les deux pays, un intérêt majeur au maintien de ces relations. C'est le principal problème qui a empêché la signature de l'accord à Vilnius, en novembre 2013, et qui a retardé la signature du volet économique après que le volet politique a été signé en mars 2014. L'accord finalement signé préserve-t-il les intérêts ukrainiens et russes au maintien d'un commerce intense entre les deux pays ? L'Union européenne est-elle déterminée à préserver ces intérêts, condition sans doute nécessaire à l'apaisement de la crise actuelle en Ukraine orientale ?

S'agissant de l'OTAN, je rappelle les conclusions du sommet de Bucarest, en avril 2008. Alors que les États-Unis entendaient obtenir pour la Géorgie et l'Ukraine un plan qui aurait conduit à leur adhésion rapide à l'Alliance, la France et l'Allemagne se sont opposées avec succès à ce projet. Cependant, l'OTAN a maintenu le principe de « la porte ouverte », qui permet à ces pays d'envisager une adhésion à un terme indéterminé. L'insistance avec laquelle certains dirigeants occidentaux ont souligné la vocation de l'Ukraine à intégrer l'OTAN a pu être interprétée comme une provocation par la Russie, qui tient que la promesse, explicite ou implicite, aurait été faite à Mikhaïl Gorbatchev au début des années 1990 que l'OTAN ne s'étendrait pas à l'Est. Comment interprétez-vous les conclusions du sommet de Bucarest, et où en est-on ?

L'Ukraine semble avoir renoncé à la perspective d'une adhésion à l'OTAN pour se concentrer sur ses relations avec l'Union européenne. En revanche, pour la Géorgie, l'enjeu à moyen terme, avant une éventuelle candidature à l'Union, porte sur les relations avec l'OTAN. Après avoir reçu la qualification de pays ayant « vocation à rejoindre l'Alliance atlantique » au sommet de Bucarest d'avril 2008, la Géorgie insiste pour qu'un pas supplémentaire soit fait lors du sommet de l'Alliance de septembre prochain, avec la définition d'un plan d'action pour l'adhésion (MAP). Cependant, le président Obama a récemment déclaré que ni l'Ukraine ni la Géorgie « ne sont aujourd'hui sur le chemin d'une adhésion à l'OTAN ». Quelle appréciation portez-vous sur les hésitations occidentales ?

Vous nous direz également ce qu'il en est de la Moldavie, si le dossier de la Transnistrie a été affecté par la crise ukrainienne, comment l'on pourrait régler les conflits gelés et, plus généralement, comment la politique de l'OTAN peut évoluer au regard de la crise ukrainienne.

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