Intervention de André Marcon

Réunion du 17 juillet 2014 à 12h00
Mission d'information sur le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi

André Marcon, président de CCI France :

En 2013, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault nous a demandé de faire la promotion du CICE auprès des entreprises. Nous avons donc réalisé, avant la mise en place du dispositif, un important travail d'information, distribuant notamment à toutes les CCI un document intitulé CICE : mode d'emploi, dans lequel étaient regroupés les renseignements les plus utiles.

Puis nous avons signé avec la Banque publique d'investissement (BPI), chargée d'une partie du préfinancement, une convention prévoyant un échange d'informations sur les questions que se posaient les entreprises. Nous avons également noué un partenariat avec les experts comptables, interlocuteurs privilégiés des chefs d'entreprise pour le CICE, nos moyens ne nous permettant pas de nous rendre dans chacune des 2,4 millions d'entreprises concernées.

Partout – dans nos revues consulaires ou lors des réunions que nous avons organisées, le plus souvent avec les services du préfet –, nous avons présenté le CICE comme un bon outil.

Sur dix entreprises qui l'utilisent, six sont des TPE-PME. C'est honorable, mais insuffisant, les grandes entreprises pesant moins de 5 % dans le total des entreprises. Il reste donc des marges de progrès.

Grâce au CICE, ces entreprises ont pu améliorer leur trésorerie, ce qui leur a permis d'envisager des investissements et, en fonction des carnets de commandes, des embauches, notamment par le biais des contrats d'avenir.

Elles ont également amélioré leurs relations avec leur banquier, qui s'est souvent substitué à la BPI : considérant que, avec une entreprise dont la trésorerie est renforcée, le risque est nul, la banque peut en effet se charger elle-même du dossier de préfinancement.

Le CICE garantit une mobilisation rapide des financements, très appréciée des chefs d'entreprise, car, en temps normal, la lenteur des procédures leur est préjudiciable.

Il existe toutefois des freins à la mobilisation du CICE. Ainsi, malgré le travail réalisé en amont, les TPE-PME manquent d'informations. Certains dirigeants croient – ils nous le disent – que le dispositif ne leur est pas destiné. Quand on leur en explique les modalités, ils admettent n'avoir pas compris que leur entreprise était éligible. Dans certains cas, il faut aller sur le terrain pour discuter avec les chefs d'entreprise.

La complexité supposée du dispositif de préfinancement est un autre frein. Certains chefs d'entreprise ne voient pas l'intérêt de monter un dossier compliqué pour 5 000 à 10 000 euros. Le coût élevé du préfinancement dans le cadre du dispositif mis en place par la BPI est également un frein. Il est en effet supérieur à celui des emprunts généralement proposés aux TPE-PME.

On peut encore citer la difficulté de l'estimation dans le montage du dossier. Le dirigeant de TPE-PME, qui n'a pas l'habitude de calculer lui-même son impôt et qui n'est pas suffisamment conseillé, aura peur de se tromper dans son estimation.

Malgré l'important travail que nous avons réalisé avec les ordres des experts-comptables, il semble en effet que les conseils aient fait défaut. Certains experts comptables n'ont vu dans le CICE qu'un formalisme bureaucratique supplémentaire et ne l'ont pas proposé à l'entreprise, a fortiori si elle était saine.

Enfin, le coût administratif que représente le temps passé au montage du dossier – supposé plus qu'avéré – a constitué un autre frein.

Mais les freins n'étaient pas seulement méthodologiques : ils pouvaient être émotionnels. Ainsi, la crainte du contrôle fiscal a été dissuasive, les entreprises ayant été échaudées par les contrôles systématiques et chronophages qu'avait entraînés le crédit d'impôt recherche.

D'autre part, certains ont craint que les donneurs d'ordre n'exigent des ristournes dès lors que l'entreprise aurait bénéficié du CICE. Cette pratique est totalement illégale, mais une TPE-PME est souvent très dépendante de son donneur d'ordre, qui ne manque jamais de lui rappeler qu'il peut faire appel à un concurrent. Pierre Pelouzet, médiateur des relations interentreprises, a d'ailleurs été saisi d'un certain nombre de dossiers en la matière.

En dépit de ces risques, nous estimons que le bilan du CICE est positif. Nous ne souhaitons pas une complexification du système : les systèmes sont efficaces lorsque le public a compris qu'ils sont simples. Il est encore jugé complexe par les entreprises, dont la demande récurrente auprès des CCI consiste simplement en des allègements de charges.

Nous avons bien conscience qu'il faut poursuivre, voire intensifier, notre effort de communication. Les CCI doivent en quelque sorte se remettre en question pour savoir comment promouvoir encore davantage le CICE.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion