Intervention de Valérie Rabault

Réunion du 22 juillet 2014 à 17h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Rabault, Rapporteure générale :

Depuis 1997 jusqu'en 2012, le rapport annuel sur l'application de la loi fiscale avait pour objet d'indiquer, article par article de chaque loi de finances promulguée, le détail du contenu des textes réglementaires – décrets, arrêtés, etc. – ou des instructions fiscales correspondants. La mise en ligne du Bulletin officiel des finances publiques – BOFiP – a enlevé de sa pertinence à cette présentation. En effet, depuis la fin de l'année 2012 et la présentation de la doctrine fiscale administrative sous la forme d'une base documentaire en ligne, les instructions fiscales ont été remplacées par une mise à jour permanente des différentes rubriques concernées par une mesure nouvelle. Le précédent rapporteur général, M. Christian Eckert, avait ainsi été conduit à retenir l'an passé un nouveau format pour l'examen de l'application des dispositions fiscales contenues dans les lois de finances. Je vous propose de reprendre ce cadre, en présentant un rapport en deux parties, après une introduction.

Cette dernière dresse un bilan synthétique et statistique des mesures d'application prises ou en attente à la date du 31 mai 2014.

La première partie consiste ensuite en une analyse, au regard de la loi votée, des mesures édictées par l'administration fiscale et, plus généralement, par le Gouvernement en application d'une douzaine de dispositifs importants issus des lois de finances de la fin de l'année 2013. L'intérêt de cette étude est de mettre en lumière les précisions ou la valeur ajoutée apportées par le texte d'application aux dispositions que nous avons votées. Elle porte, par exemple, sur les mesures relatives à l'impôt sur le revenu prises en loi de finances initiale – LFI – pour 2014, telles que la suppression de l'exonération fiscale de la participation de l'employeur aux contrats collectifs de complémentaire santé, ou la réforme des plus-values immobilières.

La seconde partie présente des éléments plus quantitatifs – nombre de bénéficiaires, montants, effets observés… – sur une sélection de mesures adoptées l'année précédente ou auparavant – y compris donc sous la précédente majorité. Pour les plus récentes, il faut bien entendu que les données soient disponibles et j'indique ainsi à M. de Courson, devançant une question qu'il ne manquerait certainement pas de me poser, que nous n'avons pas encore reçu la simulation que doit établir la direction générale du Trésor à partir d'une base de 500 000 ménages : en effet, le temps a manqué pour traiter les déclarations de revenus, qui pouvaient être transmises jusqu'au 10 juin. Mais ont été retenues une vingtaine de dispositions dont, en matière d'impôt sur le revenu, les mesures destinées à accentuer la progressivité de l'imposition, comme la revalorisation de la décote ; en matière de fiscalité de l'épargne et du patrimoine, la réforme de l'impôt de solidarité sur la fortune – ISF – et la question de l'assujettissement des revenus immobiliers des contribuables non-résidents ; en matière d'impôt sur les sociétés, la réforme des régimes de report en avant et en arrière ; la contribution exceptionnelle sur la valeur des stocks pétroliers instituée par la loi de finances rectificative du 17 août 2012 ; en matière de fiscalité locale, l'exonération de la cotisation foncière des entreprises dont bénéficient les auto-entrepreneurs ou encore la réforme de la fiscalité de l'aménagement et de l'urbanisme. Cette partie comporte également un bilan de la procédure de mise en conformité spontanée, engagée au printemps 2013, ainsi que de l'activité de la Brigade nationale de répression de la délinquance fiscale – BNRDF.

Le bilan de l'application des dispositions fiscales au 31 mai 2014 en prend en compte 202, comprises dans la LFI pour 2014, dans la loi de finances rectificative – LFR – votée à la fin de l'année 2013 ou dans des articles qui attendaient encore leur texte d'application au 31 mai 2013 – ce nombre est comparable à celui qui a été constaté les années précédentes. Sur ce total, 145 ont fait l'objet d'un texte d'application ou étaient d'application directe, mais 57, soit 28 %, demeuraient en attente d'un texte d'application.

En ce qui concerne la loi de finances initiale pour 2014, 68 % des dispositions votés étaient en application au 31 mai 2014 ; ce taux, supérieur à celui qui avait été constaté l'année précédente, atteste de l'effort de célérité accompli par l'actuel Gouvernement. En revanche, la proportion est moins élevée pour les dispositions de la LFR pour 2013, tout en restant dans la moyenne des lois de finances rectificatives – soit 50 %.

Il convient toutefois de rappeler qu'à la différence des décrets ou des arrêtés, les instructions fiscales ne conditionnent pas l'entrée en vigueur d'un mécanisme, du moins dans ses dispositions essentielles ; elles ne font en principe qu'en faciliter l'application, en éclairant l'intention du législateur.

Le rapport présente donc, dans sa première partie, les précisions apportées par les textes d'application aux articles des lois de finances. C'est par exemple le cas en ce qui concerne la taxe exceptionnelle de solidarité sur les hautes rémunérations ou, autres dispositifs issus de la loi de finances pour 2014, le mécanisme visant à lutter contre l'optimisation fiscale par les produits hybrides et le taux réduit de TVA sur les travaux de rénovation énergétique des logements et sur « les travaux induits qui leur sont indissociablement liés ». Sur ce dernier point, le BOFiP détaille depuis le 25 février 2014 la liste des travaux pouvant être considérés comme induits. Pour donner un dernier exemple, relatif cette fois à la fiscalité locale, on découvrira que 90 des 101 départements avaient relevé, au 1er juin dernier, comme la loi de finances pour 2014 le leur permettait, le taux des droits de mutation à titre onéreux – DMTO – sur les cessions immobilières en le portant tous, sauf un – la Côte-d'Or –, de 3,80 % au maximum autorisé, soit 4,50 %.

Dans la seconde partie, nous aurions souhaité mesurer l'effet pour les entreprises de l'abaissement du plafond de déductibilité – à 85 %, puis à 75 % – de leurs charges financières, mais nous avons dû y renoncer cette année, l'administration n'ayant pas prévu de case à cet effet dans les déclarations d'impôt sur les sociétés – cette lacune devrait être comblée l'année prochaine. En revanche, nous avons pu constater que le produit de la contribution exceptionnelle sur la valeur des stocks de produits pétroliers, instituée par la deuxième LFR pour 2012, a été conforme à la prévision à hauteur de 549 millions d'euros. Quant au rendement de l'impôt de solidarité sur la fortune, qui a fait souvent matière à débat dans l'Hémicycle comme dans cette commission, il atteindra cette année 5,3 milliards d'euros, soit un rendement proche de celui qui aurait été obtenu en l'absence de réforme. S'agissant enfin de l'impôt sur le revenu, l'analyse a porté comme je l'ai dit sur les mesures adoptées en loi de finances pour 2013 – abaissement du plafond du quotient familial et du plafond de déduction forfaitaire pour frais professionnels, notamment – pour renforcer la progressivité.

À la fin du rapport figure un premier bilan de la procédure de régularisation des avoirs à l'étranger non déclarés. Engagée en juin 2013, cette procédure repose sur une circulaire fixant en toute transparence les règles fiscales applicables, lesquelles différent selon qu'il y a eu fraude « passive » ou fraude « active ». Les données qui m'ont été transmises ont été arrêtées au 31 mai 2014 : à cette date, 24 200 contribuables s'étaient manifestés auprès de l'administration fiscale. Près de 6 400 dossiers – soit un quart du total – étaient complets et, dans cet ensemble, les montants moyen et médian des avoirs déclarés s'élevaient respectivement à 930 000 euros et à 400 000 euros. Parmi ces dossiers, 1 370 ont pu être complètement traités par l'administration fiscale : les trois quarts concernaient des cas de fraude dite « passive » – liés à des successions ou à des donations – et les avoirs régularisés se sont montés à 1,4 milliard d'euros au total cependant que le montant des droits et pénalités a atteint 383 millions d'euros, soit un taux moyen d'imposition de 27,2 %. À ces sommes s'ajoutent les impositions qui doivent être réglées spontanément par le contribuable au titre de l'ISF ou des droits de succession, ce qui représente 665 millions d'euros pour les quelque 6 400 dossiers complets. Ces montants sont donc loin d'être anecdotiques et démontrent la détermination du Gouvernement à combattre la fraude fiscale.

Dernière précision : les 1 370 dossiers traités au 31 mai 2014 concernaient très majoritairement des avoirs détenus en Suisse – 89,3 % des cas –, le Luxembourg et l'Amérique du Nord ne venant que très loin derrière, avec respectivement 6,8 % et 1,8 % des dossiers.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion