Intervention de Noël Mamère

Réunion du 16 juillet 2014 à 9h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNoël Mamère :

Les experts sont des lanceurs d'alertes : il leur appartient de dresser un état des lieux – leurs projections sont d'ailleurs plutôt effrayantes –, mais pas d'apporter des réponses politiques. Ainsi, ce n'est pas à eux qu'il reviendra de prendre des décisions lors de la conférence Paris Climat 2015.

L'enjeu est de dépasser le fiasco de Copenhague. Il convient de prendre des décisions à l'échelle non seulement européenne, mais aussi mondiale. L'Union européenne a-t-elle eu raison d'adopter des directives non contraignantes ? Les menaces sont aujourd'hui telles, non seulement sur l'homme, sur l'économie et sur les modes de développement, mais aussi sur les êtres vivants et sur les écosystèmes, que nous serons sans doute amenés à prendre des dispositions à caractère contraignant, voire autoritaire. Or comment amener à les faire accepter ? Comment concilier la réduction des menaces pesant sur nos petits-enfants ou nos arrières petits-enfants avec le respect de la démocratie ?

« Nous n'avons qu'un seul monde », disent à juste titre les écologistes. Les projections du GIEC mettent en lumière les interactions à l'échelle de la planète. Certaines parties du monde seront d'ailleurs victimes d'une double peine : les pays les plus vulnérables socialement seront aussi les plus touchés par les effets du bouleversement climatique. D'où les questions qui se posent en termes de développement, d'inégalités et de rapports entre les pays riches et les pays pauvres.

Le principal enjeu de la conférence Paris Climat est sans doute l'engagement des pays émergents. Nous avons une dette écologique à l'égard de ces pays, dont nous avons largement exploité les ressources. À cet égard, l'un des enjeux de demain est celui de l'extractivité des terres rares, qui entrent dans la composition de nombreux petits objets non recyclables. Cela nuance ce que l'on dit sur l'économie circulaire. Nous devrions également réfléchir à la question de la dispersivité. Reste que les pays émergents sont apparemment prêts à faire des efforts. Est-ce là, selon vous, une des clés pour l'avenir ?

Tous les ministres invoquent à l'envi la croissance, que l'on pensait pourtant une notion du passé. Afin de relancer l'économie, certains vont jusqu'à proposer de construire à nouveau des grands barrages, en contradiction avec les orientations que nous avons prises. Le Gouvernement a décidé de transférer 280 millions d'euros du budget de l'écologie à celui de la défense. Le projet de loi sur la transition énergétique n'en a que le nom : il s'agit seulement d'une stratégie « bas carbone », qui n'est pas à la hauteur des enjeux. Qu'en pensez-vous en tant qu'experts ? Une véritable transition énergétique implique un autre mode de développement, un changement de logiciel dans le fonctionnement de nos sociétés.

Enfin, on présente le gaz de schiste comme la solution, alors que le GIEC souligne, rapport après rapport, la nécessité de sortir des énergies carbonées. Même si nous disposions de millions de tonnes de gaz de schiste sous nos pieds, il ne faudrait pas les exploiter ! Êtes-vous d'accord avec cette réflexion ? Sans doute exciperez-vous de votre droit de réserve, en votre qualité d'experts. Mais quand l'homme est passé de l'âge de la pierre à l'âge du fer, ce n'est pas parce qu'il manquait de pierres : il a purement et simplement basculé dans un autre modèle.

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