Intervention de Danielle Auroi

Réunion du 2 juillet 2014 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanielle Auroi, Présidente :

Monsieur le Secrétaire d'Etat, à mon tour de vous dire à quel point nous sommes heureux de vous recevoir aujourd'hui pour faire le point sur le Conseil européen de la semaine dernière et sur ses suites. Il faut rappeler que ce Conseil européen s'est tenu dans la foulée et encore sous l'effet des élections européennes. Ces élections ont constitué un avertissement. L'ouverture du Parlement européen avec des députés européens eurosceptiques qui boudent l'hymne européen constitue un mauvais signal. De ce point de vue, s'il fallait une preuve supplémentaire de la nécessité toujours renouvelée d'expliciter le sens du projet européen, nous la trouvons ici.

Mais le Conseil européen a quand même, Mme la Présidente Elisabeth Guigou l'a fort bien dit, et malgré la campagne très ferme des britanniques, envoyé un signal fort de respect de la démocratie en proposant le candidat Jean-Claude Junker au poste de Président de la Commission, en conformité avec les résultats des élections européennes. A cet égard, nous pouvons nous interroger sur une mention des conclusions du Conseil européen, qui s'est engagé, une fois la future Commission constituée, à réexaminer le processus de nomination futur du Président de la Commission européenne dans le respect des traités européens. On peut supposer que cette phrase a été rédigée pour rassurer les Britannique, et nous aimerions M. le Ministre, des éclaircissements sur la portée de cette formulation assez ambigüe, qui pourrait laisser présager un retour en arrière.

Dans le même ordre d'idée, pouvez-vous nous informer sur le déroulement des prochaines étapes de ce cycle de mise en place des nouvelles institutions européennes ?

Une seconde avancée importante de ce Conseil me semble être l'adoption d'un programme stratégique pour la nouvelle mandature, dit « Programme stratégique pour l'union à l'ère du changement » et qui semble offrir une feuille de route commune et un véritable projet européen. La communication sur cette stratégie a malheureusement été assez réduite, car la nomination de Jean-Claude Junker a occupé tout l'espace médiatique. Or, il faut noter que ce programme évoque une association plus étroite des parlements nationaux aux propositions européennes. Pouvez-vous nous dire ce que nous pouvons en attendre, dès lors que nous nous inscrivons dans une démarche de travail très complémentaire entre parlements nationaux et Parlement européen ?

En outre, la présentation d'un projet très vague ne pourrait-elle pas constituer un compromis a minima ? Je regrette par exemple que soient passés sous silence des points qui nous semblent importants, en particulier dans le champ social. La mise en place d'un salaire minimum européen diversifié par pays a-t-elle été évoquée ? Les projets de nouveaux moyens de financement de l'Union – ressources propres et obligations – sont indispensables. Y a-t-il eu des clarifications à ce sujet ?

Je regrette également que l'européanisation nécessaire de la politique de l'énergie, s'agissant plus particulièrement des contrats avec les pays fournisseurs, soit évoquée par une formulation imprécise : « trouver les moyens d'accroitre les pouvoirs de négociation de l'Union ». Face à la crise ukrainienne qui souligne la nécessité pour l'Union de parler d'une voix unie sur ce dossier énergétique, cela me parait trop ambigu.

Nous mettons beaucoup d'espoir dans une présidence italienne très volontaire. Votre alter ego Sandro Gozzi, M. le Ministre, que nous avons reçu à la Commission des Affaires européennes le 19 juin, nous a présenté trois grandes priorités italiennes : la croissance, avec un accent particulier mis sur l'emploi des jeunes, le climat et l'énergie, et l'immigration. Ces points s'inscrivent dans une vraie cohérence avec la volonté française : cette convergence a-t-elle commencé à trouver une concrétisation au niveau du Conseil ? Cela pourrait avoir des effets très positifs, d'autant que M. Gozzi nous a expliqué qu'à son sens, les clauses de flexibilité du Pacte de stabilité devaient être utilisées « le plus flexiblement possible », si je puis m'exprimer ainsi. Cette position reflète-t-elle celle du Premier ministre italien ou est-elle trop optimiste ? Nos collègues du Bundestag, également reçus ici récemment, affichaient en revanche une plus grande raideur quant aux réformes structurelles, ce qui ne nous a pas empêché par ailleurs d'avoir un débat très riche.

La France a apporté sa contribution à cette démarche stratégique le 24 juin dernier, avec un « Agenda pour la croissance et le changement en Europe » qui contenait des propositions fortes et fermes, pouvez-vous nous donner vos éclairages sur les avancées obtenues dans le programme stratégique et les insuffisances de celui-ci ? Avez- vous le sentiment que tout ce que nous avons apporté a été entendu ?

Enfin, je voudrais vous interroger sur trois points complémentaires.

Tout d'abord sur la question de l'efficacité énergétique. Le paquet énergie climat, présenté depuis le début de l'année, sera forcément évoqué lors de la Conférence sur le climat et il semble que l'on connaisse un blocage au niveau de la Commission à propos de cette question de l'efficacité énergétique : où en est-on à cet égard, et plus largement, d'une communauté européenne de l'énergie, qui avait été un moment évoquée et qui devrait avoir dès à présent quelques amorces ? Une politique d'ensemble est, dans ce domaine, absolument indispensable.

La seconde question porte sur la situation en Ukraine, qui soulève ces jours derniers de nouvelles inquiétudes. La Commission des Affaires européennes fera prochainement un déplacement à Kiev et à Odessa pour rencontrer des collègues parlementaires, des membres de l'exécutif ukrainien et des Organisations non gouvernementales et évaluer la situation. Assiste-t-on vraiment à l'instauration d'un statu quo ou envisage-t-on de nouvelles sanctions ou des aides pour un contrôle effectif aux frontières maintenant qu'est signé l'accord d'association entre l'Ukraine et l'Union européenne.

Enfin, la présidence italienne veut faire un focus fort sur la Méditerranée à travers la politique de l'immigration. L'Italie demande que les coopérations soient renforcées, que la solidarité soit plus forte sur le dossier des réfugiés. Elle demande ainsi un soutien accru à Frontex, ainsi qu'un programme d'asile européen mieux assumé. Le Conseil européen a-t-il avancé sur ce sujet ? Voilà les quelques questions que je souhaitais poser pour compléter celles posées par la Présidente Elisabeth Guigou.

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