Monsieur Brottes, un système de suivi des contacts vient d'être mis en place, avec le concours d'un organisme d'études extérieur, pour s'assurer que les prestations réalisées par Ubifrance sont suivies d'effets. De mémoire, ce dispositif recense le nombre d'entreprises qui font appel à Ubifrance et celui des contacts qui leur sont proposés, ainsi que les dispositifs mis en oeuvre pour répondre à leurs demandes. En revanche, il ne donne pas d'éléments sur le chiffre d'affaires généré ni sur l'effet de levier, bref sur l'efficacité opérationnelle du dispositif public.
Quant aux barrières non tarifaires, je puis vous dire d'expérience qu'il est très difficile de les recenser, sachant que ce peut être, par exemple, la contre-étiquette de bouteilles de vin sur laquelle une mention doit obligatoirement apparaître à l'encre bleue et dans une police de caractères précise. Je me souviens aussi d'opérations d'exportation pour lesquelles nous devions fournir un certificat en deux exemplaires ; en fin de compte, il en fallait trois parce que telle ou telle administration en réclamait un supplémentaire. Comme il s'agissait de produits rapidement périssables, il ne restait plus qu'à renvoyer le conteneur. Ces barrières consistent surtout, en fait, en une succession de tracasseries que les pays mettent en oeuvre de manière plus ou moins assumée – d'où l'intérêt du multilatéralisme : c'est grâce aux négociations multilatérales que nous parviendrons à neutraliser progressivement ce type d'obstacles qui sont souvent, disons-le, érigés de mauvaise foi.
L'idée d'une sensibilisation des lycéens à l'international par des opérations de jumelage avec des expatriés n'entre pas tout à fait dans le champ de notre rapport, mais elle mérite d'être étudiée. Je répète ce que nous avions écrit dans notre évaluation : pour développer nos échanges, il faut avant tout renforcer l'apprentissage des langues étrangères. En effet, la barrière de la langue reste aujourd'hui l'un des premiers freins à l'exportation.
Madame Rabin, pour évaluer les progrès en matière de commerce extérieur, j'ai pour ma part tendance à privilégier deux indicateurs. Le premier est la valeur ajoutée, qui n'est pas aujourd'hui un indicateur agrégé. Ce n'est d'ailleurs pas moi qui le dis, mais M. Pascal Lamy, ancien directeur général de l'Organisation mondiale du commerce, qui expliquait récemment qu'il fallait cesser de calculer notre performance à l'export en termes de solde entre flux entrants et flux sortants. Pour des pays comme le nôtre, qui vivront de plus en plus sur leur capacité à générer de la valeur ajoutée, agréger des flux à valeur ajoutée très faible – hydrocarbures, blé – avec des flux de produits à forte valeur ajoutée ne permet pas de donner une vision claire de notre performance à l'exportation. Nous avions d'ailleurs intégré cet élément dans notre rapport initial : l'idée est d'apprendre à évaluer cette performance par le déficit ou l'excédent de valeur ajoutée plus que par le déficit ou l'excédent des flux bruts.
Le second indicateur intéressant est constitué par les parts de marché. Les perspectives de croissance pour la France sont estimées en fonction de notre capacité à bénéficier de la croissance des pays les plus consommateurs et des pays émergents. Dans cette optique, il est clair que les parts de marché sont un élément d'appréciation essentiel. Si nos parts de marché en Chine régressent, nous ne profiterons pas de la croissance chinoise, quand bien même l'évolution des flux serait en notre faveur. Il en va de même pour la zone euro : si la croissance s'y accélère et que nous y perdons des parts de marché, c'est toute notre performance à l'export qui en sera amoindrie.
Nous sommes tout à fait d'accord sur la nécessité de la simplification, mais la Coface a décidé de simplifier le dispositif de l'assurance prospection à l'entrée, ce qui a eu pour effet de l'ouvrir largement, et de contrôler davantage à la sortie. Il aurait été préférable – et c'est le sens de notre préconisation – de faire l'inverse. De fait, ce choix a créé un effet d'aubaine, ou en tout cas permis de gonfler inconsidérément les entrées dans le dispositif : on a encouragé les entreprises à déposer des dossiers et à partir à l'export, quitte à constater des difficultés a posteriori, quand il était trop tard. Mieux vaudrait être plus pédagogues, affiner le contrôle à l'entrée et faire davantage confiance aux entreprises pour la suite. L'idée est donc de déplacer l'effort de simplification vers la sortie du dispositif.
L'effet de levier de l'assurance prospection se dégrade. Bien entendu, il faut mieux intégrer l'ensemble des acteurs de la négociation commerciale internationale, madame Guittet : ce sont eux qui font in fine le chiffre d'affaires. S'agissant de l'assurance prospection, ils préconisent une meilleure prise en compte des dépenses de prospection et un meilleur contrôle a priori plutôt qu'a posteriori.
Nous sommes tout à fait d'accord avec vous sur la nécessité de restaurer les marges de nos entreprises, monsieur Furst. Le premier avantage à l'export ne réside pas tant dans les aides publiques que dans le fait de disposer de marges qui permettent d'investir, d'innover et de se démarquer des concurrents.
L'Europe est-elle un marché grand export ou un marché domestique ? Cela dépend des produits. Il est bien plus difficile de négocier une vente de biscuits avec une centrale d'achat allemande qu'une vente de semi-conducteurs à l'arséniure de gallium au Vietnam, où notre avantage comparatif est très fort et où la norme ne joue pas comme une contrainte pour notre industrie. L'un des cas les plus compliqués sur lesquels j'aie eu à travailler concernait d'ailleurs les normes imposées par l'institut allemand de normalisation, le Deutsches Institut für Normung (DIN), pour les importations des produits de décolletage en provenance de la vallée de l'Arve : exporter en se pliant à ces exigences était bien plus malaisé que de vendre du champagne millésimé en Inde ou en Chine !
Il est vrai que, si, du point de vue des normes ou de la couverture des changes, les exportations en Europe ne sont plus de l'export, elles sont encore considérées comme telles du point de vue comptable et logistique – de même que sont comptabilisés comme exports nos envois de produits par conteneurs dans nos départements et territoires d'outre-mer. Bref, l'ensemble de ce qui est comptabilisé en export va dépendre à la fois des contraintes opérationnelles propres à certains produits et de tout un champ normatif, comptable, réglementaire et logistique.