Intervention de Hervé Heyraud

Réunion du 17 juin 2014 à 17h00
Commission d'enquête sur l'exil des forces vives de france

Hervé Heyraud, président et fondateur du site lepetitjournalcom :

L'exil fiscal est marginal – il concerne une faible part des 2,5 millions de Français à l'étranger. Néanmoins, ce phénomène ne peut être nié car, même si les chiffres exacts ne sont pas connus, il touche des forces vives, des talents, des gens qui auraient pu continuer à exercer en France.

Selon l'étude Mondissimo, la population française à l'étranger est plus âgée. La raison tient peut-être au poids des retraités, plus nombreux aujourd'hui à prendre leur retraite au soleil ou à passer une partie de l'année au Maroc ou en Asie du Sud-Est. Je pense plutôt que la population française à l'étranger rajeunit.

Cela m'amène à la problématique des outils d'évaluation. En effet, les données dont nous disposons, grâce à l'étude Mondissimo et à notre propre sondage réalisé l'année dernière, sont très partielles. Aujourd'hui, je vous fais part de mon ressenti, n'ayant pas beaucoup de chiffres à vous livrer. Nous publions près de 30 000 articles par an, mais ce sont des données qualitatives. Certes, le sondage réalisé chaque année par la Maison des Français de l'étranger est représentatif. Néanmoins, si l'on veut que l'expatriation soit une force, une chance pour notre pays, un important travail de recensement et de qualification de cette population est nécessaire. Une meilleure connaissance des Français de l'étranger est un enjeu majeur pour les pouvoirs publics, car elle permettrait de comprendre comment évolue cette population. La création de cette Commission d'enquête, l'existence d'un secrétariat d'État aux Français de l'étranger et de députés des Français de l'étranger témoignent de l'importance de l'expatriation aujourd'hui, d'autant que le nombre d'expatriés ne va certainement pas diminuer dans les années à venir.

Les Anglais dans le Sud-Ouest vivent en communauté et en réseau ; les Français font de même à Bangkok, à Mexico que je connais bien, ou dans d'autres villes. En arrivant à Bangkok, il suffit de se connecter sur nos sites ou sur celui de l'ambassade ou de la chambre de commerce pour trouver une baby-sitter, un job, ou encore pour rencontrer un partenaire de tennis ou aller voir un match de foot le soir dans un bar. Se connecter aujourd'hui est plus naturel est plus facile qu'auparavant.

Les expatriés commencent souvent par dire qu'ils ne sont pas à l'étranger pour rencontrer d'autres Français ; néanmoins, ils sont très vite ravis de se retrouver en communauté. Pour autant, ils s'intéressent au pays où ils se trouvent. Si le french bashing est une réalité, critiquer la France est un sport national en France aussi.

Je pense que le sentiment d'appartenance à la communauté française, lié à un socle commun de valeurs, de culture et d'éducation, est très fort chez les expatriés. Au vu de l'augmentation du nombre de Français à l'étranger et surtout de l'évolution de cette population – jeunes et retraités –, la vraie question est celle de leur accompagnement par les pouvoirs publics, afin de maintenir le lien avec ces personnes. Faute de quoi, on pourrait se retrouver dans deux ou trois générations avec des gens qui auront des passeports français, mais ne parleront pas français et n'auront aucune idée de l'histoire de notre pays.

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