Intervention de Alban Schmutz

Réunion du 10 juillet 2014 à 9h00
Commission d'enquête sur l'exil des forces vives de france

Alban Schmutz :

La lourdeur administrative n'est pas l'élément principal qui fait qu'une entreprise marche ou ne marche pas. Il faut d'abord être bon sur le marché. Après, cela dépend des structures des entreprises. Une entreprise comme OVH, qui va dépasser les 1 000 salariés d'ici à la fin de l'année, a une organisation administrative qui lui permet d'encaisser cette lourdeur. Dans une entreprise de 10 salariés, pendant que l'entrepreneur fait de la paperasse, 10 % de l'entreprise au moins ne travaille pas. C'est mathématique ! Et pendant qu'il cherche à régler certains problèmes opérationnels, il ne crée pas de valeur.

Il y a évidemment des améliorations à apporter. Il est nécessaire de dématérialiser. Il faut que l'administration se mette au rythme de la vie réelle des entreprises. Celles-ci ont besoin d'un interlocuteur qui les connaisse et qui ne soit pas là pour les sanctionner mais pour les aider. Je ne parle pas seulement des contrôles fiscaux, mais du soutien qu'elle peut leur accorder en leur expliquant ce qu'elles ont à faire, ou ce qu'elles auraient dû faire.

Je vais faire un parallèle avec la vie de l'entreprise. Aujourd'hui, OVH a décidé de faire évoluer la fonction de support clients – les clients appellent quand ils ne peuvent accéder à un support – en une fonction de customer advocate – nous sommes là pour les aider et nous devons nous débrouiller pour y parvenir. Il serait très important de faire la même chose dans l'administration : être là pour aider les entreprises et pas uniquement pour voir ce qui ne va pas.

Tout à l'heure, nous avons parlé du CIR. De nombreuses personnes m'ont dit qu'à partir du moment où elles en avaient déclaré, elles avaient fait l'objet d'un contrôle. Je ne sais pas si c'est une réalité ou si ce n'est qu'une perception. Il n'empêche que ces personnes pensent que si elles rentrent dans un nouveau dispositif, elles seront contrôlées. Et ce n'est pas le contrôle lui-même qui pose problème, dans la mesure où à peu près tout le monde essaie de faire correctement son travail, c'est le fait qu'il n'est pas toujours facile de répondre aux questions posées. Je considère, pour ma part, que ce n'est pas le rôle de l'entrepreneur de comprendre toutes les questions dans le détail – pas plus que ce n'est celui du citoyen. Il faut expliquer à l'intéressé de quoi il s'agit, et faire en sorte de simplifier le vocabulaire administratif.

Je ne remets pas en cause le principe du contrôle, mais il faut que les procédures soient logiques et que l'on avance en terrain connu. Il faut éviter que ceux qui entrent dans de nouveaux dispositifs soient systématiquement contrôlés alors qu'on leur avait annoncé le contraire, ou que l'administration interprète les règles différemment de ce que les politiques ou les médias avaient annoncé. Finalement, le chef d'entreprise consacre beaucoup de temps au contrôle, pendant lequel il ne développe pas ses produits et perd en compétitivité.

Le temps perdu à cause d'un contrôle amène certains à s'interrogent sur l'intérêt d'entrer dans certains dispositifs. Il m'arrive même de le déconseiller : le dispositif est peut-être adapté, mais personne n'est sûr de la manière dont les textes seront interprétés. Il n'y a aucune sécurité juridique et l'entreprise risque d'y perdre du temps. Une société assez importante peut l'encaisser, mais pas une petite société. C'est là-dessus qu'il faut travailler. Quand on pose un nouveau cadre, il doit être pérenne sur plusieurs années, on doit savoir que tel ou tel point sera apprécié de telle ou telle manière, et que l'on ne reviendra pas en arrière. Il en va parfois de la vie des entreprises.

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