J'alerte ceux de mes clients qui cherchent à quitter la France pour des raisons fiscales sur le traumatisme qu'ils vont vivre : ils vont perdre leurs relations, il va leur falloir en nouer d'autres… Et quand on a 70 ans, il faut être très motivé ou ne pas avoir le choix pour prendre ce type de décision. J'en ai – et je m'en targue – découragé un certain nombre. Et à ceux qui cherchaient à me rassurer en me disant qu'ils ne seraient là-bas qu'officiellement mais continueraient à vivre en France avec de l'argent liquide, je répondais que ce n'était désormais plus possible et que je ne m'occupais que de vraies délocalisations, qui emportent des conséquences et entraînent des contraintes. Je demandais donc à ces clients s'ils étaient prêts à changer totalement de vie, si leur femme y était prête également, car, très souvent, c'est de ce côté-là que cela « coince », les femmes ne voyant pas du tout les choses de la même manière : pour elles, les relations sociales comptent plus que les questions d'argent. J'ai ainsi l'exemple de la conjointe d'un client qui veut revenir en France tant elle s'ennuie ; et pourtant elle n'est qu'à Tournai. Eh bien, Tournai n'est pas Lille ni le « triangle BMW » – Bondues, Marcq-en-Baroeul, Wasquehal !
Il est exact que la géographie compte. Le Nord s'est vidé au point qu'une vie à la française s'est recréée à Tournai, à Courtrai et à Orcq, où les exilés fiscaux se retrouvent tous. Dans ce cas, le départ ne présente plus d'inconvénients. En revanche, un habitant de Rennes peut peut-être aller à Jersey, mais vivra un traumatisme s'il s'installe en Belgique. Je n'ai d'ailleurs pas aidé beaucoup de Bretons à se délocaliser hors de France, mais bien plutôt des gens du Nord vers la Belgique, des Lyonnais, des Alsaciens ou des Savoyards vers la Suisse et des Parisiens, eux aussi vers la Suisse et la Belgique mais également vers l'Angleterre. Il est vrai que je n'ai pas vu partir à l'étranger la richesse de province.