Intervention de Pierre-Olivier Bandet

Réunion du 3 septembre 2014 à 18h00
Mission d'information sur la candidature de la france à l'exposition universelle de 2025

Pierre-Olivier Bandet, directeur de cabinet du président-directeur général d'Air France :

Comme vous l'avez souligné, Air France fait partie des quinze partenaires d'ExpoFrance 2025. Malgré la situation financière difficile dans laquelle nous nous trouvons et le fait que nous avons beaucoup réduit nos partenariats, ce choix nous a paru évident car notre métier ne consiste pas seulement à faire voyager les Français à l'étranger, mais aussi à faire venir les étrangers à Paris ainsi que dans une trentaine de villes de France. C'est d'ailleurs afin de capitaliser sur les valeurs de la « marque France » que nous avons infléchi notre campagne de communication. Celle-ci s'appuie sur le slogan France is in the air et des références traditionnelles telles que les jardins à la française et les chaises à porteur – au traitement visuel desquelles nous essayons d'apporter une touche de modernité. Nous avons par ailleurs été très associés aux Assises du tourisme et croyons beaucoup à la volonté d'ores et déjà exprimée de développer la qualité de l'accueil. Cela suppose à la fois que de nouvelles infrastructures soient implantées au sein des aéroports et que nous formions nos personnels à l'accueil. D'ailleurs, nous sommes déjà confrontés aujourd'hui à l'enjeu de l'accueil des passagers chinois dans nos avions, qui exige que nos personnels opèrent une véritable révolution culturelle.

Dans le domaine aérien, Air France estime être tout à fait à même de relever le défi que constitue l'organisation d'un tel événement, tout en espérant pouvoir retrouver une assise financière qui lui permette de poursuivre son développement, notamment sur les vols long courrier. Notre ambition, à l'horizon 2025, est d'être encore davantage qu'aujourd'hui une entreprise forte dont le réseau se déploie sur l'ensemble des continents, dans le cadre d'un partenariat solide avec KLM et au sein de l'alliance SkyTeam. Air France transporte aujourd'hui 53 millions de passagers par an et dessert 180 destinations dans 103 pays : il s'agit donc de l'une des compagnies européennes dont le réseau est le plus étendu, comportant des positions fortes en Amérique latine, en Afrique de l'Ouest et en Chine. Notre ambition est de continuer à étendre ce réseau dans des conditions rentables. En termes de couverture mondiale, Air France se considère comme l'un des principaux hubs européens, devant British Airways en termes d'étendue du réseau, et au même niveau que Lufthansa.

Si une exposition universelle draine un afflux important de passagers sur une période relativement limitée, Air France achète ses avions pour dix ans et non pour un événement spécifique. Cela dit, au vu de notre expérience, ce type d'événements entraîne pour nous une hausse de 10 % de la demande aérienne de passagers sur la période concernée. Si beaucoup de visiteurs étrangers se rendent dans le pays d'accueil, de nombreux nationaux restent quant à eux dans le pays au lieu de se rendre à l'étranger, et ne prennent donc pas l'avion. Ainsi, en juillet dernier, lors de la Coupe du monde, nous avons enregistré une baisse de 25 % du nombre de passagers brésiliens sur nos vols par rapport au mois de juillet précédent, tandis que l'on assistait à une augmentation du nombre de passagers européens se rendant au Brésil. Quant au chiffre de + 10 %, il correspond à peu près à l'augmentation que nous avons observée sur nos lignes vers Shanghai lors de l'exposition universelle qui s'y est déroulée. L'exposition de Hanovre, pour sa part, a accueilli beaucoup moins de visiteurs que prévu, de sorte que notre offre s'est révélée surdimensionnée, comme celle de toutes les autres compagnies aériennes.

Une hausse de 10 % du trafic reste de l'ordre de ce qu'une compagnie aérienne sait gérer, comme elle le fait durant les mois d'été, en jouant sur son calendrier de maintenance des appareils – c'est-à-dire en décalant ses opérations de grand entretien –, en améliorant le remplissage de ses avions sur certaines lignes, en faisant appel à ses partenaires et en jouant sur les entrées et sorties d'avions dans sa flotte. Notre expérience et nos calculs comptables – qui intègrent l'aide de 70 à 80 millions d'euros que vous avez évoquée et que nous souhaitons obtenir pour l'événement – nous donnent à penser qu'une bonne planification nous permettra de relever le défi, d'autant que les autres compagnies renforceront elles aussi leur capacité.

S'agissant des infrastructures aéroportuaires, je formulerai la même remarque que pour les avions : les construire uniquement en vue de l'exposition n'a aucun sens. En revanche, la date de 2025 fournit un catalyseur à tous les projets en cours de gestation ou de réalisation. Ceux d'entre eux qui concernent l'accès terrestre aux deux aéroports parisiens – CDG-express, le Grand-Paris-Express et le raccordement routier à Roissy – nous paraissent indispensables au bon déroulement de l'exposition universelle. Cet accès est en effet très contraint actuellement en période de pointe. Sans le contournement est de Roissy, désormais lancé, nous risquons de subir une congestion importante entre la ville et les sites de l'exposition. Il conviendra également que le quatrième terminal de Roissy, actuellement en projet, soit livré, au moins dans sa première tranche, à l'horizon 2025. S'il s'agit là aussi d'accélérer des travaux qui devront de toute façon être réalisés en raison du développement du trafic aérien dans notre pays, l'échéance de l'exposition permet de leur assigner une date d'achèvement réaliste et objective.

L'exposition requerra aussi la réalisation de travaux de longue haleine, à laquelle nous nous sommes engagés avec les services de l'État, afin de fluidifier d'une part le parcours du passager lorsqu'il passe la frontière, et d'autre part les contrôles de sécurité, tant pour les passagers que pour les bagages. On peut imaginer que, d'ici à 2025, le système PARAFE soit généralisé, plus efficace et plus simple à utiliser. Une réflexion sur la sûreté des passagers s'impose également : comment éviter de rajouter encore des règles, des contrôles et des contraintes à ce qui existe déjà ? Mieux vaudrait remettre à plat les mesures de sûreté aérienne. La sécurité absolue et le combat contre les menaces terroristes – objectifs qui nous animent, nous aussi – ne doivent pas nous faire perdre de vue le parcours client et les coûts induits par tous ces dispositifs. Cela suppose également d'améliorer la délivrance des visas – domaine dans lequel de nombreux progrès ont déjà été réalisés. L'ensemble de ces mesures de simplification ont d'ailleurs été évoquées lors des Assises du tourisme.

Il conviendra par ailleurs d'améliorer la qualité de l'accueil que nous réservons à certaines cultures, ce qui suppose de revaloriser tous les métiers de contact avec le client. Cette question fait l'objet d'une réflexion de notre part : historiquement, tous les agents en contact avec le client dans nos aéroports ont une compétence essentiellement technique. Ces personnes regardent votre billet, opèrent des transactions pour imprimer votre carte d'embarquement, puis pèsent votre valise et la déposent sur le tapis. Or, ces fonctions techniques, qui font aujourd'hui la fierté des agents, sont progressivement automatisées et informatisées puisque l'on peut désormais imprimer sur internet non seulement sa carte d'embarquement mais également son étiquette bagage. Dans ce contexte, l'un des enjeux pour Air France est de former ses agents à l'accueil et à la résolution de cas complexes, autre forme de compétence qui n'est pas forcément naturelle dans des métiers historiques où la hiérarchie des valeurs porte davantage sur la compétence technique et la maîtrise de l'outil informatique. Il nous faut savoir expliquer que c'est dans le fait d'être à l'écoute du client, de parler sa langue et de résoudre ses problèmes que réside la noblesse de nos métiers. Je ne voudrais pas tomber dans une critique caricaturale de l'esprit des Français, mais nous rencontrons cette difficulté au quotidien sur nos lignes vers ou en provenance de la Chine. Cela nous a conduit à embaucher des interprètes et à travailler sur le produit chinois, notamment afin de traduire sous forme d'idéogrammes les informations les plus importantes.

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