La RTT a apporté une certaine nouveauté dans le dialogue social de la fonction publique. Celui-ci se caractérisait jusqu'alors par des instances consultatives et un cadre réglementaire laissant peu de place à la négociation. Or nous avons connu une période de négociation sociale intense et constructive dans les trois versants de la fonction publique, portant à la fois sur la baisse du temps de travail et sur la « régularisation » de certaines pratiques auxquelles les employeurs souhaitaient mettre fin. On a ainsi ouvert le champ des conditions de travail à la négociation, ce que je considère comme positif.
Je serais beaucoup plus prudente au sujet des conditions de travail elles-mêmes, car la mise en place de la RTT s'est effectuée parallèlement à d'autres évolutions très structurantes pour les services publics.
Premièrement, le déploiement des nouvelles technologies de l'information, encore embryonnaire au début de la réforme, a conduit à de nombreuses réorganisations, à l'évolution des missions, à la requalification des compétences. Son poids me semble plus important que celui de la RTT pour ce qui est de l'évolution de l'organisation des services, d'autant que, je le répète, on a souvent choisi de s'en tenir à des cycles de travail identiques à ceux de la période précédente.
La deuxième évolution lourde est celle de la politique de l'emploi public engagée en 2002 et amplifiée jusqu'en 2012, avec un objectif de stabilisation des effectifs. Sur la longue durée, il s'agit d'une inflexion majeure pour la fonction publique de l'État. La stabilisation globale suppose, dans plusieurs ministères, des non-renouvellements de postes qui ont un impact important sur l'organisation du travail.
Il est difficile de faire le départ, dans ces évolutions, entre ce qui relève de la RTT et ce qui relève de mouvements plus récents ou plus structurants.
Pour ce qui est des effets plus sociétaux de la réforme, on peut estimer que l'introduction de jours de RTT à la place de régimes d'autorisation d'absence plus ou moins opaques, plus ou moins dépendants du bon vouloir du chef de service, a été favorable à la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle. La possibilité de « poser » un jour de RTT plutôt que de solliciter une autorisation d'absence met les femmes et les hommes qui en ont besoin dans une situation plus confortable – de façon plus marquée, à mon sens, pour les hommes. Plus récemment, l'accord du 8 mars 2013 relatif à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique, le premier du genre, consacre un volet important à la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle.
Je confirme par ailleurs que l'impact immédiat de la RTT sur l'organisation du travail dans la fonction publique n'a pas été massif, notamment dans les services administratifs classiques.
Les heures supplémentaires – qui concernent, pour l'essentiel, les enseignants – font désormais l'objet d'un suivi précis, dont il est rendu compte dans le rapport annuel du département statistique de ma direction. Leur paiement s'effectuant sur des bases déclaratives, le système est fiabilisé.
L'évolution de la consommation de ces heures supplémentaires est étroitement corrélée à la politique de l'emploi du ministère de l'éducation nationale, qui représente plus de 80 % du volume utilisé. En période de réduction des effectifs, comme ce fut le cas entre 2007 et 2012, on assiste à une compensation qui se traduit par des pics de consommation, favorisés par les exonérations et revalorisations que nous évoquions. En période de création d'emplois, on assiste à un ajustement à la baisse des heures supplémentaires, qu'elles soient effectives ou annuelles. Les statistiques pour 2013, dont nous disposerons prochainement, feront très certainement apparaître cette diminution et sa répercussion sur le coût budgétaire lié à ce poste. En outre, la fin de la défiscalisation des heures supplémentaires diminue leur attractivité, notamment pour les personnels de catégorie B et C.
Cette baisse aura nécessairement des répercussions sur l'évolution de la rémunération globale des personnels de la fonction publique, même si le poids des heures supplémentaires dans la progression des rémunérations n'est pas considérable.
S'il vous reste d'autres questions, je vous propose de me les transmettre pour que j'y réponde par écrit. Je tiens également la disposition de la commission d'enquête tous les éléments statistiques auxquels je me suis référée.