Monsieur le ministre, chère Frédérique Massat, cher Germinal Peiro, sans vouloir bien sûr dévaloriser quiconque, je dois dire que nous aurions difficilement pu trouver aujourd’hui, dans le monde politique français, une telle équipe pour aborder le problème de l’agriculture d’aujourd’hui sur l’ensemble des territoires de notre beau pays.
Notre collègue Martial Saddier a dit tout le bien qu’il pensait des dispositions concernant la montagne. Je n’y reviendrai donc pas.
Je ne pense pas, monsieur le ministre, que quiconque aurait fait mieux que vous dans la situation actuelle. Cette loi est ce qu’elle est. Elle permet surtout de reposer les bases d’un dialogue actualisé qui prend en compte les nouvelles contraintes de notre temps, qui n’existaient pas il y a vingt-cinq ou trente ans, liées à l’Europe, à la mondialisation, voire à la financiarisation en tous domaines.
Je pense que votre charisme, et peut-être aussi vos origines bretonnes, vous ont permis de faire le maximum de ce qui pouvait être fait.
Mais le fait qu’une équipe comme la vôtre ne puisse pas aller plus loin montre combien notre société est bloquée, toutes choses s’étant enchevêtrées d’une manière kafkaïenne pour nous interdire d’impulser à notre agriculture le formidable élan qui lui est nécessaire.
Depuis une trentaine d’années, nous avons oublié combien notre pays est différent de tous les autres pays, notamment des autres pays d’Europe, d’abord parce qu’il représente la troisième surface agricole en Europe et qu’on peut pratiquement tout y cultiver, mais du fait également de son organisation territoriale et de celle de sa population.
Il faut dire que vous n’êtes pas bien accompagné. Ainsi Manuel Valls devrait retirer d’urgence sa réforme territoriale, car c’est elle qui provoquera la chute de François Hollande, plus que les petites histoires ou les mauvais sondages. Quand on veut réformer, il faut savoir ce qu’on veut faire. Ce type de projet doit être mis en oeuvre au lendemain d’une élection présidentielle, comme François Mitterrand l’avait fait pour l’abolition de la peine de mort ou Giscard d’Estaing pour l’IVG. Mais dans un contexte où plus personne ne sait plus à quoi il sert, où plus personne ne sait s’il exercera encore ses responsabilités dans deux ou trois ans, comment voulez-vous que cela marche ?
En attendant, la nature ayant horreur du vide, ceux qui ont pris les rênes ignorent tout de la réalité du terrain, même s’ils ont suivi des études très longues, difficiles et coûteuses.
La réalité, c’est qu’il y a dans tous nos territoires des hommes et des femmes qui veulent être paysans, qui veulent relancer l’agriculture. Beaucoup voudraient se passer de pesticides, mais ils me disent : « Mais, monsieur le député, comment empêcher l’herbe de pousser ? » Et quand je leur dis d’employer quelqu’un, ils me répondent qu’ils ne trouvent personne. Comment faire pour trouver de nouveau du personnel ?
En tant qu’ancien élève d’un lycée agricole, je peux vous dire, monsieur le ministre, que la formation dispensée dans ces lycées est excellente. Le problème, c’est qu’après il n’y a rien pour leurs élèves.
Monsieur le ministre, si nous ne voulons pas que notre agriculture s’effondre comme notre industrie s’est effondrée au cours de ces vingt-cinq dernières années, nous devons, sur la base de votre travail, bâtir un consensus national. Pour ma part, je crois au local : c’est à partir des communes, des territoires qu’il faut cheminer, avec ceux qui ont envie de « mettre le paquet ». C’est ainsi qu’on pourra donner un grand dessein à la paysannerie française et à la France.