Nous n'avons aucun problème avec l'institution CCAS en tant que telle. Au quotidien, nous avons en revanche la surprise de recevoir fréquemment, dans nos permanences d'accueil, de solidarité et de relais santé, des personnes auxquelles une assistante sociale a délivré un ticket donnant « droit à » telle ou telle prestation alors qu'elle-même, apprenons-nous lorsque nous lui téléphonons, n'a pas pu agir faute de moyens. De même, il y a un problème lorsqu'un conseil d'administration de CCAS s'interroge non sur la façon dont il peut aider ceux qui en ont besoin, mais plutôt sur la meilleure façon de priver une famille d'une prestation au nom de prétendus abus ! Pour notre part, nous refusons de jouer ce jeu-là.
Certaines épiceries sociales sont parfois des courroies de transmission des municipalités. Lorsque ces épiceries rencontrent des difficultés, il est souvent fait appel au Secours populaire. Nous estimons qu'il s'agit d'un mélange des genres.
Les associations pourraient-elles se réunir pour délivrer une parole unique ? Nous estimons, pour notre part, qu'il est utile et efficace d'agir ensemble sur des sujets qui nous réunissent. Nous avons ainsi réussi à infléchir les positions de l'Union européenne concernant l'aide alimentaire – il s'agit d'ailleurs d'un succès remarquable qui devrait être bien mieux valorisé. En revanche, il n'aurait guère de sens que les associations se fondent en un organisme unique. Demande-t-on aux partis politiques ou aux députés de se fondre en un objet unique mal identifié ? Si nous sommes respectés en tant qu'associations, c'est parce que nous veillons à préserver notre indépendance. Et, si nous avons montré que nous savions converger dans une démarche commune et obtenir des résultats ensemble, nous ne pouvons être responsables que pour les seuls engagements que nous prenons, et nous ne pouvons pas nous engager pour les autres.
Une question parfois soulevée d'une façon que je qualifierai de subliminale a trait aux personnes en difficulté qui, aux dires de certains, émargeraient auprès de plusieurs associations. Je rappelle que le nombre total de repas délivrés annuellement par l'ensemble de nos associations ne correspond même pas à un repas quotidien pour chacune des personnes en grande difficulté, qui auraient pourtant droit à deux et même à trois repas par jour. Nous en sommes loin, et nous n'avons jamais entendu parler de quelqu'un qui serait mort d'indigestion pour avoir fréquenté à la fois les Restos du coeur et le Secours populaire ! L'idée qu'il nous faudrait nous réunir pour vérifier que personne ne vient manger deux fois est à la fois contraire à la réalité que nous constatons sur le terrain, et à l'opposé de nos pratiques qui consistent à accueillir ces personnes, à parler avec elles, et à créer un lien. Ceux qui imaginent que les abus constituent un véritable problème se trompent.