Je répondrai d'abord à la question portant sur le bénévolat et sur la difficulté qu'il y a à transformer un bénévole en responsable associatif. On évoque fréquemment l'idée d'un véritable statut du bénévole comportant des protections sociales qui pourraient aller jusqu'à l'attribution de droits à retraite. Une telle orientation, qui ne me semble pas correspondre au souhait du Gouvernement, n'est pas non plus soutenue par la DJEPVA, qui privilégie une logique de promotion, de reconnaissance et d'incitation, plutôt qu'une logique statutaire. Il nous semble en effet que l'idée d'un statut du bénévole, comportant des acquis calqués sur ceux du monde salarié, est tout à fait contradictoire avec celle d'engagement désintéressé, et qu'il vaut mieux fidéliser les bénévoles par la formation, en recourant pour cela au Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) qui, abondé par l'État et les régions, met en oeuvre chaque année 11 millions d'euros au profit de la formation des bénévoles, ce qui complète de façon substantielle les ressources dont disposent les associations dans le cadre des conventions pluriannuelles d'objectifs (CPO). Un bénévole mieux formé sera plus à l'aise dans son action au sein de l'association et aura donc tendance à pérenniser son engagement.
Une autre piste, débattue dans le cadre de la loi sur l'ESS, est celle du congé d'engagement bénévole, qui permettrait de favoriser l'engagement des responsables associatifs exerçant une activité salariée. Le Gouvernement doit remettre au Parlement, dans les mois qui viennent, un rapport sur ce thème, l'objectif recherché étant de mettre au point une formule suffisamment attractive pour susciter les vocations d'engagement bénévole, sans toutefois perturber la vie des entreprises concernées. La principale question qui se pose au sujet de ce congé d'engagement bénévole est de savoir s'il faut le réserver à l'exercice de responsabilités statutaires, ou s'il peut concerner toute activité bénévole à partir d'un certain seuil d'intensité. Nous considérons que, en permettant que ce congé puisse être pris pour permettre à un bénévole de participer à des activités d'un faible niveau d'implication – par exemple assemblées générales ou réunions –, nous passerions à côté de l'objectif essentiel de la mesure envisagée, à savoir favoriser la prise de responsabilités statutaires. Cela dit, il doit être possible de trouver une solution équilibrée en termes de jours de congé et d'indemnisation – que celle-ci soit obligatoire, facultative, à l'initiative de l'entreprise ou non, éventuellement abondée par le compte épargne-temps du salarié, sans toutefois aller jusqu'à instaurer une indemnité journalière du bénévole, qui ne nous paraît pas souhaitable – et d'une efficacité satisfaisante en termes d'attractivité.
Avec le service civique, nous sommes tout à fait dans l'esprit de l'engagement volontaire et bénévole propre aux associations. Cela permet aux jeunes de rencontrer un monde associatif qu'ils ne connaissent pas toujours et, s'ils le souhaitent, de prolonger une première expérience de volontariat par d'autres formes d'engagement bénévole tout au long de leur vie. Il existe d'autres modalités de reconnaissance du bénévolat : je pense notamment à la médaille de la jeunesse et des sports, récemment réformée pour devenir la médaille de la jeunesse, des sports et de l'engagement associatif, et dont le domaine a été élargi à la valorisation de tout engagement bénévole en faveur de l'intérêt général. Pour conclure sur ce point, j'insisterai à nouveau sur l'importance du bénévolat, qui constitue l'un des piliers de la ressource humaine des associations, ainsi que l'une des conditions de leur fonctionnement démocratique du fait de l'intervention de personnes autres que des salariés, qui évite une trop grande institutionnalisation.
Le développement des nouvelles technologies peut effectivement contribuer à favoriser le recrutement au sein des associations. J'y vois d'abord un instrument permettant aux associations de se faire connaître, notamment au moyen des réseaux sociaux : ainsi le recrutement pour le service civique se fait-il intégralement par le biais d'un site internet et par l'animation d'une communauté assurée à la fois par l'agence et par les principaux organismes recruteurs. Les nouvelles technologies permettent également aux associations de se procurer des ressources financières alternatives, même si cet aspect reste encore relativement marginal pour le moment : ainsi, c'est par le crowdfunding associatif que la plate-forme HelloAsso – que nous soutenons au titre de l'opération « La France s'engage », initiative présidentielle lancée le 24 juin dernier – facilite, pour les associations, le recours à la générosité publique. Puisque je m'exprime devant le législateur, je souligne que ce nouveau mécanisme, qu'il convient d'encourager, nécessiterait sans doute d'être régulé, puisqu'il est actuellement régi par des lois votées avant qu'internet ne prenne l'importance qu'on lui connaît maintenant, et dont la lourdeur s'accorde mal avec la rapidité, pour ne pas dire l'immédiateté caractérisant les nouvelles technologies.
Pour ce qui est de la loi ESS, nous entrons dans une phase de programmation des textes, chaque ministère préparant actuellement la mise en oeuvre des dispositions dont il est chargé – certaines étant confiées à la fois à Bercy et au ministère de l'intérieur. Pour sa part, la DJEPVA travaille à la fois sur un texte technique relatif aux fusions et cessions d'associations, et sur un autre relatif à l'application du Haut Conseil à la vie associative (HCVA), instance placée auprès du Premier ministre, mais dont le secrétariat et le fonctionnement relèvent de nos attributions. Notre objectif étant de permettre une entrée en vigueur de la loi dans les six mois suivant son adoption, nous ne devons pas perdre de temps pour achever la mise au point des textes d'application, attendus pour le début de l'année prochaine. Ce calendrier correspond à celui d'élaboration des ordonnances retenu par M. Blein, qui m'a auditionné dans le cadre de la mission qui lui a été confiée – d'une visée assez large, puisqu'elle consiste à préparer la simplification par ordonnances de l'ensemble des relations entre le monde associatif et l'administration, ce qui peut concerner aussi bien l'accès aux subventions que les agréments et l'ensemble des procédures auxquelles peuvent être confrontées les associations.
Avec votre collègue, nous avons abordé la question du tronc commun d'agrément : il existe déjà une disposition législative sur ce point, mais elle est tombée en désuétude faute de parution des décrets d'application s'y rapportant. Le rapport de M. Blein sera l'occasion soit de relancer cette disposition si l'on considère qu'elle présente un intérêt suffisant, soit de proposer son abandon. Les travaux menés jusqu'à présent ont montré la grande diversité des agréments ministériels ainsi que les conditions très variables auxquelles ils répondent et les nombreux droits qu'ils peuvent conférer. Une seule association peut, de ce fait, être amenée à solliciter deux ou trois agréments distincts, ce qui entraîne l'ouverture d'autant de procédures – étant précisé par ailleurs que chaque agrément est soumis à des formalités de renouvellement, notamment en termes de périodicité, qui lui sont propres. L'idée d'un tronc commun d'agrément ayant trait, par exemple, au fonctionnement démocratique de l'association, et opposable aux différents départements ministériels, rendrait inutile la vérification de ce critère par chaque ministère concerné : comme le permet le programme « Dites-le nous une fois » mis en place pour simplifier les relations entre les entreprises et l'administration, il suffirait que cette vérification ait été faite une fois. En revanche, chaque département ministériel a bien vocation à vérifier que les actions conduites par une association dans tel ou tel domaine répondent à des critères spécifiques liés à son domaine de compétence. Il faut donc distinguer, dans l'agrément, les critères relevant de la structure de l'association de ceux relevant de l'action qu'elle mène, et procéder à une simplification en faisant un tronc commun des premiers.
Le système d'information en matière associative mériterait également d'être étudié afin d'être mieux connu qu'il ne l'est actuellement, car nous manquons de données et d'observations sur les associations, même si des travaux de longue haleine sont menés sur ce thème par le Conseil national de l'information statistique (CNIS) et l'INSEE. En tout état de cause, on peut s'interroger sur la gouvernance des systèmes d'information associatifs, notamment dans l'optique de la simplification de la vie des associations, qui soulève de nombreux sujets infralégislatifs. En matière de gestion, par exemple, les logiciels utilisés pour instruire les demandes de subventions sont très hétérogènes et imposent de lourdes contraintes aux associations, qui doivent refaire plusieurs fois la même déclaration. Dans le respect des logiques institutionnelles propres à chaque donneur d'ordre, donc à chaque personne morale octroyant une subvention, il serait bon que les différents intervenants s'accordent sur des principes communs, ce qui nécessiterait la mise en place d'une gouvernance dynamique des systèmes d'information afin de progresser en termes de qualité de service. Il existe aujourd'hui un portail associatif hébergé par la direction de l'information légale et administrative (DILA), qui permet de regrouper un certain nombre de démarches, mais je suis persuadé que nous pourrions encore avancer dans cette direction.
La pré-majorité associative, que nous avons soutenue, est un sujet délicat qui a suscité de nombreuses craintes lorsqu'il a été débattu au Sénat. Nous estimons pour notre part que ces inquiétudes ne sont pas justifiées : actuellement, il est fréquent que des mineurs adhèrent à des associations, et il serait bien dommage qu'une loi vienne limiter l'engagement des très jeunes gens au sein du monde associatif. Si certaines craintes – tel le risque de dérive sectaire ou d'endoctrinement religieux – sont légitimes, elles ne doivent pas empêcher un jeune d'adhérer à un club de football ou à n'importe quelle autre association sportive, et de devenir un véritable acteur du monde associatif. Si l'on a échoué jusqu'à présent à définir des critères de nature à écarter les risques évoqués, c'est peut-être parce que le contexte n'était pas favorable, et je pense qu'il faudra y parvenir d'une manière ou d'une autre, car l'enjeu de la pré-majorité, qui n'est autre que le recrutement des futurs responsables associatifs, le justifie pleinement.
Le seuil de lucrativité, actuellement fixé à 60 000 euros, date de 2002. Le HCVA a mené une réflexion en vue d'une actualisation raisonnable de ce seuil, correspondant au moins à l'inflation, et le chiffre de 72 000 euros a été avancé – ce qui me semble correspondre à la proposition formulée par certains députés.