Intervention de Dominique Raimbourg

Séance en hémicycle du 15 septembre 2014 à 21h30
Lutte contre le terrorisme — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Raimbourg :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, ce texte doit être voté. Il ne le sera pas de gaieté de coeur car, à l’évidence, il répond à une situation de guerre, mais il est nécessaire. Jamais, en effet, la menace terroriste n’a été aussi importante ni aussi proche ; vous l’avez décrite et je n’y reviendrai donc pas longuement.

Je m’attacherai à dissiper les craintes que ce texte suscite chez certains et à démontrer que, s’il est exceptionnel, il ne constitue pas pour autant un recul face à nos idéaux et à l’espoir d’une société de plus en plus démocratique. La logique en est simple : elle consiste, pour l’interdiction de sortie du territoire et le blocage administratif des sites, à inverser la pratique habituelle, qui réserve à l’autorité judiciaire le pouvoir de prendre des décisions de coercition à l’encontre des individus ou de certains sites internet.

Cette inversion est absolument nécessaire car, compte tenu du délai de convocation devant le juge des libertés de la personne suspectée de vouloir fuir à l’étranger pour combattre aux côtés des djihadistes, cette personne aura tout le temps de fuir avant l’audience. Il doit donc s’agir d’abord d’une décision administrative, susceptible d’être ensuite contestée.

Cette inversion est également nécessaire pour le blocage des sites internet. Je n’aborderai pas à ce propos la question de savoir si ce blocage peut être efficace ou s’il peut être contourné, car c’est là une discussion de spécialistes. En tout état de cause, la qualité du blocage est indépendante de la procédure appliquée.

Une décision administrative est toutefois nécessaire, car il est impossible de convoquer devant un juge des libertés un hébergeur inconnu qui se cache sur des réseaux difficiles à décrypter ou domicilié à l’étranger. Là encore, l’inversion est nécessaire.

Pour ce qui est de l’interdiction de sortie du territoire, les garanties apportées sont suffisantes, car le juge administratif peut statuer sur la légalité et l’opportunité de la mesure.

Enfin, grâce à Sébastien Pietrasanta, notre rapporteur, et à Marie-Françoise Bechtel, responsable du texte, des garanties supplémentaires ont été apportées pour ce qui concerne le blocage des sites internet. Une mise en demeure est d’abord adressée à l’hébergeur et, à défaut d’exécution dans un délai de 24 heures, le fournisseur d’accès est sommé de procéder au blocage, le tout sous le double contrôle d’une personnalité qualifiée nommée par la CNIL, puis par le juge administratif. Ainsi les garantie sont là, et elles sont importantes.

Peut-être pourrait-on apporter d’autres éléments à ce texte. Il serait notamment bon, comme le souligne M. Malek Boutih, de penser au retour, qui aura lieu tôt ou tard, sans pour autant envisager la perte de nationalité, dont le maniement est si difficile que cette mesure serait absolument inefficace.

Il ne faut pas non plus créer de nouveau délit, car la loi française permet déjà de demander des explications et d’inculper en fonction des crimes et délits commis à l’étranger par des ressortissants français. Il faut, en revanche, veiller à la réinsertion de ceux qui auront rendu des comptes et, le cas échéant, auront été condamnés pour des exactions, des crimes ou des délits commis à l’étranger, afin qu’ils puissent être réintégrés dans la société française et oublier autant que possible les scènes épouvantables qu’ils ont vues et vécues, et auxquelles ils ont peut-être participé.

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