Intervention de Jean-Yves le Drian

Réunion du 27 août 2014 à 12h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Jean-Yves le Drian, ministre de la Défense :

Mesdames et messieurs les députés, mesdames et messieurs les sénateurs, merci de vos félicitations. Si je puis exercer mes fonctions dans une relative sérénité malgré une situation mondiale très instable, c'est aussi grâce à l'écoute, au partage d'informations, au dialogue apaisé et à la franchise dont j'ai toujours bénéficié au sein de vos commissions respectives des affaires étrangères et de la défense.

Avant d'en venir à l'Irak, sur lequel je centrerai comme prévu mon propos, et afin de répondre à Mme Guigou, je dirai deux mots, sans ouvrir le débat, de la situation en Centrafrique et au Mali, en anticipant sur l'audition prévue le 17 septembre.

La situation est très tendue en Centrafrique, où nos forces ont dû répondre courant août à des attaques très significatives de la part de différents groupes plus ou moins rattachés soit à la Séléka, soit aux anti-balakas. Il nous est arrivé d'intervenir violemment, en particulier à Batangafo, il y a maintenant quinze jours, ainsi qu'au PK5, à Bangui. Nous avons alors neutralisé un nombre significatif de personnes armées. À Batangafo, il n'y a eu aucun blessé dans nos rangs alors que nous avons neutralisé une centaine de personnes armées, plus ou moins liées à l'ex-Séléka bien que celle-ci n'ait pas revendiqué l'attaque. Par contre, lors des incidents majeurs survenus au PK5, nous avons déploré des blessés, mais les agresseurs que nous avons dû neutraliser étaient un peu moins nombreux.

Par ailleurs, une tentative de médiation due à l'initiative du président Sassou a abouti à ce que l'on appelle désormais les accords de Brazzaville, lesquels devaient permettre de trouver un consensus censé aboutir à une solution politique. Toutes les sensibilités et tous les partis de Centrafrique étaient représentés à Brazzaville. Au cours de la rencontre, il a été souhaité que le changement de gouvernement s'inscrive dans la logique consensuelle qui semblait se dégager sur place, et il a été demandé à Mme Samba-Panza d'agir en ce sens.

Les Nations Unies doivent structurer la Mission intégrée multidimensionnelle de stabilisation des Nations Unies en République centrafricaine (MINUSCA) afin qu'elle puisse prendre ses fonctions dans quinze jours comme prévu.

Au Mali, un processus d'inclusion positif a été engagé par l'intermédiaire du gouvernement algérien, doté d'un calendrier et marqué par des échanges fructueux et par une véritable volonté de réconciliation. Les discussions vont reprendre le 1er septembre. Le chemin paraît donc bien tracé pour que les discussions aboutissent à Alger dans les meilleures conditions, comme je le souhaite. Nous restons évidemment vigilants, mais il s'agit là de problèmes intra-maliens.

En ce qui concerne la situation strictement militaire, la force Barkhane installée le 1er août à N'Djamena poursuit ses opérations, en particulier afin d'identifier les groupes terroristes qui tentent de se reconstituer, conformément à sa mission initiale.

J'en viens à l'Irak, où une crise majeure a débuté le 9 juin dernier avec la prise de Mossoul par l'EIL, autoproclamé État islamique depuis. Même si l'Irak était traversé par une crise profonde depuis plusieurs années, ces événements marquent un tournant, à plusieurs égards.

Premièrement, l'EI constitue une entreprise de terrorisme sans précédent par la dimension de ses prétentions territoriales et par les ressources effectivement contrôlées. Nous devons avoir à l'esprit que ses objectifs – ainsi qu'al-Baghdadi, son chef, l'a affirmé sans aucune ambiguïté – s'étendent, au Moyen-Orient, non seulement aux territoires syrien et irakien mais aussi à la Jordanie, au Liban et à la Palestine.

En deuxième lieu, nous avons ici affaire à une nouvelle génération de combattants. On pourrait tenter une analogie avec les talibans mais, bien qu'il soit difficile d'établir des hiérarchies de ce type, nous sommes en présence de ce que j'appelle la seconde génération de jihadistes, post-Ben Laden : un mouvement né des combats en Irak et en Syrie, sensiblement plus radical qu'al-Qaïda, utilisant la terreur et une violence totalement désinhibée – vous en avez vu des images particulièrement spectaculaires – comme outil habituel d'action contre ses adversaires et contre les populations. Contre tous les adversaires : les chiites, qu'ils soient turkmènes, comme dans la ville d'Amirli aujourd'hui assiégée, ou arabes, mais aussi les Kurdes, les Yézidis, les chrétiens.

Troisièmement, l'enjeu sécuritaire du conflit est pour nous plus immédiat encore qu'auparavant : il a certes existé par le passé des « filières afghanes », mais l'EI, plus proche, plus professionnel, plus efficace dans son recrutement, attire de partout dans le monde des centaines de combattants étrangers, parfois des familles entières. Son radicalisme dangereux séduit également de très jeunes filles et des jeunes femmes, comme le montrent les enquêtes et interpellations récemment opérées en France : deux jeunes filles de 15 et 17 ans ont ainsi été placées en garde à vue à Tarbes et à Vénissieux le 19 août dernier.

Cela posé, je ferai d'abord le point sur la situation sécuritaire.

Depuis la proclamation du califat, le 29 juin dernier, l'EI poursuit sa conquête territoriale en utilisant la terreur et la barbarie comme moyens de propagande. La symbolique véhiculée par le terme même de califat est très puissante : le deuxième califat, celui de Bagdad, s'étendait de l'Espagne à l'Iran avant sa chute au VIIIe siècle. Cette notion – reprise par Boko Haram lui-même, qui s'est érigé en califat dans la partie nord du Nigéria – renvoie donc à l'idée d'une autorité politique exercée sur un territoire par un héritier du Prophète. Le terme constitue ainsi à lui seul un programme politique. Dans cette perspective, l'objectif principal, la consolidation territoriale transfrontière du califat, s'accompagne de la captation des ressources nécessaires à sa survie.

Au début du mois d'août, après sa percée foudroyante contre l'armée irakienne, l'EI a accru le rythme de ses conquêtes territoriales, faisant fuir les populations chrétiennes, et allant jusqu'à menacer – il le fait aujourd'hui encore – Bagdad et Erbil, capitale du Kurdistan irakien.

L'offensive des jihadistes et de leurs alliés – tribus sunnites et ex-baasistes de Saddam Hussein –, lancée dans le Nord de l'Irak, a conduit à la prise des villes de Sinjar, dont la population est majoritairement composée de Yézidis, et de Qaraqosh, première ville chrétienne d'Irak. Dans les deux cas, les populations ont fui les troupes de l'EI – celle de Qaraqosh vers Erbil, tandis que celle de Sinjar s'est réfugiée dans les montagnes auxquelles est accolée la ville et s'y est trouvée piégée par les forces jihadistes. Vous le savez, les jihadistes considèrent les Yézidis comme les adeptes d'une secte hérétique, antérieure aux religions du Livre – ce que l'on appelle le zoroastrisme. Je n'ai pas à commenter ici la teneur de cette référence religieuse. Quoi qu'il en soit, prise au piège dans la région montagneuse, escarpée et très rocheuse du mont Sinjar, cette population, estimée alors entre 15 000 et 25 000 personnes, a bénéficié d'aérolargages américains entrepris dès le week-end du 10 août.

La situation sécuritaire dans la région s'est très vite détériorée et le groupe terroriste est parvenu à s'emparer le 7 août du barrage de Mossoul sur le Tigre, qui est le premier par sa taille et qui joue un rôle capital en régulant les eaux du fleuve et, dans une moindre mesure, en fournissant de l'électricité à toute la région.

Contraintes de se replier devant l'avance des jihadistes, les troupes kurdes – je parle ici du Kurdistan irakien –, essentiellement de l'infanterie de montagne, n'avaient que peu de munitions et pas assez d'armes lourdes pour faire face aux moyens que l'EI a saisis sur les forces irakiennes défaites en juin.

Malgré les premiers bombardements aériens menés par les Américains le 8 août, les forces jihadistes ont poursuivi leur marche vers Bagdad, qui semble rester l'objectif premier d'al-Baghdadi, et de la coalition qui s'est agrégée autour de lui. Cet objectif comporte une puissante dimension symbolique et politique, toujours en référence au premier califat. Il convient donc d'être vigilant quant à la situation sécuritaire de nos propres ressortissants dans la capitale irakienne – 50 personnes à l'ambassade, une centaine de Français dans la ville. Nous avons pris toutes les dispositions nécessaires pour être prêts à intervenir le cas échéant. Car l'instauration d'une situation insurrectionnelle généralisée est un mode d'action possible que nous ne devons pas exclure.

Le Gouvernement irakien a perdu le contrôle de 40 % de son territoire national. Les voies d'accès à ces zones sont soit coupées soit dangereuses. Les routes reliant Bagdad à la Syrie et à la Jordanie sont elles aussi coupées. L'axe stratégique menant à la Turquie est considérablement rallongé. Quant à l'Iran, elle tente de tirer avantage de cette situation, et elle a ouvert deux nouveaux points de passage avec l'Irak.

Le bilan humain est particulièrement lourd même s'il reste difficile à évaluer. On estime que l'on compte une centaine de morts par jour depuis la mi-juin.

J'en viens aux forces en présence, en commençant par celles de l'EI.

Depuis le début de la semaine dernière, les forces kurdes et irakiennes ont enregistré quelques succès face aux combattants de l'EI et aux rebelles sunnites. L'EI conserve toutefois une réelle capacité d'action et d'adaptation. Il continue de concentrer ses efforts opérationnels sur les principaux axes entre la Syrie et Bagdad afin d'assurer sa continuité territoriale, et en direction des principaux sites énergétiques : champs pétroliers et barrage d'al-Haditha.

Se dessine ainsi une stratégie de l'EI selon trois axes.

Il cherche tout d'abord à créer une continuité territoriale entre l'ensemble des territoires qu'il domine où se développe une forme rudimentaire d'administration s'appuyant sur des acteurs locaux. Le dirigeant nommé à Mossoul est par exemple un ancien gouverneur de la ville de l'époque de Saddam Hussein.

Il donne ensuite une priorité au contrôle des ressources stratégiques de manière à assurer la pérennité des flux financiers, humains et matériels.

Enfin, il mène une épuration ethnique et religieuse qui assure la docilité des populations sous contrôle de l'EI, et qui correspond à l'agenda extrémiste du califat.

S'y ajoutent des menaces, qu'il faut à mon sens prendre très au sérieux, sur la Jordanie, le Liban et la Palestine, même si, en la matière, il faut faire la part de la propagande.

À l'appui de cette stratégie, l'EI dispose de moyens considérables.

Il s'appuie sur un nombre significatif de combattants. Ce nombre est, selon toute vraisemblance, en augmentation rapide à mesure que d'autres groupes comme les katibats syriens du Jabhat al-Nosra, se délitent ou sont contraints de prêter allégeance à l'EI. Madame la présidente, vous évoquiez l'attaque qui a eu lieu au Liban à la mi-août, et qui fut attribuée à l'EI : elle était en réalité le fait de groupes du Jabhat al-Nosra, affiliés à al-Qaïda, récemment ralliés à l'EI, avec l'appui de ses membres plus anciens.

L'EI sait en outre nouer des alliances. Il catalyse en Irak les intérêts des baasistes et de certaines tribus sunnites, qui estiment avoir été marginalisés par la politique du Gouvernement de M. Nouri al-Maliki.

L'EI dispose également de ressources financières. En stock, on estime qu'il pourrait puiser dans une réserve de un à deux milliards de dollars. En flux, il organise un système économique pour se financer en visant prioritairement les ressources que constituent les puits de pétrole – il commercialise du pétrole, via des détaillants locaux au prix compétitif de 20 dollars le baril –, les postes frontaliers, les barrages, et une forme d'activité économique dans les villes qu'il gère.

L'EI est de mieux en mieux équipé. Les matériels pris aux armées syriennes et irakiennes constituent un avantage significatif. Il a par ailleurs développé une stratégie d'influence et de communication très efficace en mettant en scène sa violence et ses succès. Il instaure ainsi son primat sur les autres groupes jihadistes en vue d'attirer leurs combattants ou ceux venus de l'étranger. Il n'est pas regardant sur les recrutements, contrairement à al-Qaïda, et développe une communication moderne qui utilise largement des productions médiatiques et des caméras ainsi que le web et les comptes twitter. L'EI fait preuve d'un grand professionnalisme pour mobiliser autour de lui notamment en recrutant des familles entières. Une véritable vie sociale se constitue ainsi autour d'EI qui n'attire pas que des combattants.

De leur côté, avec un budget de 17 milliards de dollars, les forces armées irakiennes restent un acteur majeur. Elles comptent plus d'un million d'hommes à majorité chiites, auxquels il faut ajouter les milices chiites qui assument aujourd'hui une part importante de la capacité offensive terrestre des forces progouvernementales.

Nombreuses, ces forces sont mal utilisées et présentent des lacunes. Elles manquent notamment d'une composante aérienne suffisante et efficace dans le domaine de l'attaque au sol.

Le mot Peshmerga désigne un combattant qui se battra jusqu'à la mort. C'est le terme officiel utilisé par le Gouvernement régional du Kurdistan pour qualifier les forces armées du Kurdistan irakien. Au nord de l'Irak, les troupes kurdes subissent depuis le 3 août une part importante de la pression offensive de l'EI, ce qui allège de fait la pression sur la capitale irakienne. Aujourd'hui, le Kurdistan doit assumer un voisinage immédiat avec l'EI islamique sur une ligne longue de près de 1 000 kilomètres. Si l'avancée djihadiste a offert une opportunité majeure aux Kurdes qui ont pris le contrôle de la plus grande partie des territoires dits « contestés » entre eux et le pouvoir central, y compris les champs pétroliers de Kirkouk, elle les a aussi conduits sur les terrains qui leur sont militairement peu familiers des plaines et des grandes villes au sud de leurs bastions traditionnels.

Le Gouvernement autonome du Kurdistan de M. Massoud Barzani gère une zone relativement prospère. Il est néanmoins fragilisé depuis plusieurs mois par le refus du Gouvernement Maliki de verser la part des salaires en principe prise en charge par Bagdad, notamment ceux des Peshmergas. Son budget total est de 14 milliards de dollars qu'il faut comparer aux 17 milliards de dollars du seul budget de la Défense irakien. Traditionnellement divisé entre deux tendances politiques, le PDK de Massoud Barzani et l'UPK – Union Patriotique Kurde – de l'ancien président irakien, M. Jalal Talabani, et de son successeur, M. Fouad Massoum, le Gouvernement kurde a pu compter dans la crise sur l'appui des forces kurdes de Syrie – le PYD – et de Turquie – une partie du PKK.

J'en viens aux actions que nous avons menées.

Notre premier objectif a été de parer à l'urgence. Elle était évidemment humanitaire mais aussi opérationnelle afin de contenir la poussée de l'EI et de briser sa dynamique. Depuis le 10 août, trois livraisons de fret humanitaire ont eu lieu. Aujourd'hui, nous conservons des moyens sur zones afin d'être en mesure d'effectuer rapidement des largages dans des régions difficiles d'accès.

Pour l'urgence opérationnelle, nous avons également mis en place des moyens en étroite coordination avec les autorités irakiennes ainsi qu'avec les États-Unis et le Royaume-Uni. Cela s'est traduit par le déploiement sur zone de moyens supplémentaires – frégate Courbet dans le Golfe Persique – et, dans le domaine du renseignement, par la réorientation de nos capteurs.

L'intégration d'officiers français au centre de commandement américain d'Al Udeid au Qatar a permis d'améliorer la coordination des vols alliés. Ce dispositif complète les moyens d'état-major et de planification dont nous disposons en permanence au siège du commandement américain de CENTCOM, à Tampa aux États-Unis.

En présence d'une autorité irakienne, nous avons livré aux forces kurdes de M. Barzani des armements avec les munitions nécessaires. Plusieurs actions internationales sont menées par ailleurs.

Les frappes américaines ont permis d'empêcher une nouvelle conquête territoriale durable par l'EI ; la Maison Blanche s'est donnée à ce stade un mandat limité à la protection des emprises américaines et de certains sites stratégiques comme le barrage de Mossoul. Ces frappes ont permis aux Peshmergas de reconquérir des territoires perdus.

Le Président Obama s'est fortement engagé dans le règlement du conflit tout en fixant les limites de l'intervention américaine. Il a ainsi souligné que le déploiement de forces américaines au sol en Irak était exclu. Par ailleurs, il a pris soin de placer cette intervention dans le cadre strict d'un appel à l'aide du nouveau Gouvernement irakien.

Les États-Unis ont également annoncé hier leur volonté d'effectuer des vols de reconnaissance au-dessus de la Syrie en vue d'éventuelles frappes aériennes contre les djihadistes de l'EI.

Les Britanniques ont retenu le principe d'un appui au transport d'armes. Des missions de largage de fret humanitaire ont été effectuées dans les montagnes du Sinjar.

Pour sa part, le Gouvernement allemand a récemment pris la décision de soutenir les forces kurdes combattant l'offensive de l'EI par des livraisons d'armes, en complément du soutien déjà annoncé dans les jours précédents – aide humanitaire, équipements non-létaux. Il s'agit d'une décision sans précédent, l'Allemagne n'ayant jusqu'alors jamais livré d'armements dans des zones de conflit. Encore faut-il qu'elle se traduise dans les faits ! Nous discutons actuellement avec mon homologue allemand, Mme Ursula von der Leyen, pour organiser des livraisons communes. Je constate que la nouvelle ministre de la Défense allemande engage avec la France une coopération beaucoup plus active que ne le faisait son prédécesseur. Dans quelques jours, je dois d'ailleurs me rendre en sa compagnie au Mali où la brigade franco-allemande assure une mission de formation au centre d'entraînement de Koulikoro.

En guise de conclusion, je vous fais part de six remarques.

Nous faisons face à une situation qui nécessite que les Européens et leurs alliés réfléchissent à des perspectives et à une stratégie de long terme. C'est l'objet de la conférence sur la sécurité en Irak et la lutte contre l'EI, voulue par le Président de la République. Le sujet sera évidemment abordé la semaine prochaine dans le cadre du sommet de l'OTAN de Newport, et à l'Assemblée générale de Nations unies. Il n'y a bien entendu pas de solution exclusivement militaire à cette crise. Même si l'on peut espérer que l'avancée de l'EI est aujourd'hui bloquée – mais je ne suis certain de rien –, une réflexion doit être menée et la solution ne peut-être que politique.

Pour autant, l'action militaire a permis de briser l'élan de l'EI et de freiner ses avancées. Elle a aussi permis à ceux qui le combattent au sol de lui infliger des défaites, comme on l'a vu avec la reprise du barrage de Mossoul ou de la ville de Makhtoum.

Nous devons tenter de priver l'EI de ses alliés, qui sont puissants dans la partie nord occidentale de l'Irak, notamment les tribus sunnites et les ex-baasistes. L'Arabie Saoudite peut y aider, comme elle l'avait fait en 2006, en contribuant à désolidariser les tribus de l'EI, tout comme le roi de Jordanie qui a fait des déclarations sur ce sujet hier.

Nous devons continuer à inciter le pouvoir central irakien à jouer son rôle en mettant un terme aux politiques d'exclusion des sunnites pratiquées ces dernières années. La nomination de M. Haïdar al-Abadi, même s'il appartient au même parti Dawa que M. Nouri al-Maliki, ouvre la voie à la création d'un nouveau gouvernement plus « inclusif » et au spectre plus large.

Une autre leçon des dernières semaines est que l'EI s'engouffre partout où il y a de la faiblesse. Nous devons donc veiller à aider tous les États de la zone à faire face.

Enfin, nous ne pouvons traiter la question de l'EI indépendamment du théâtre syrien tant il est vrai que pour ce dernier la frontière n'existe pas. À mesure que sa progression ralentit en Irak, l'EI peut être tenté d'orienter son action et ses ressources en Syrie à partir de ses bastions traditionnels, notamment de Raqqa, vers Alep ou Deir Ezzor. Il peut le faire en s'opposant à Bachar al-Assad mais aussi à l'Armée syrienne libre affaiblie qui lutte contre ce dernier. Celle-ci court donc le risque d'être marginalisée.

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