Intervention de Pierre Lellouche

Séance en hémicycle du 17 septembre 2014 à 15h00
Lutte contre le terrorisme — Avant l'article 3

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Lellouche :

Je laisse délibérément de côté les arguments du rapporteur, qui me paraissent complètement inopérants, pour en venir à la réponse du ministre. Deux choses, monsieur le ministre : l’incrimination du loup solitaire, cette fameuse activité terroriste solitaire, de même que l’incrimination de l’association de malfaiteurs à des fins terroristes créée par Alain Marsaud à l’époque, sont très complexes à démontrer ; je vous en avais touché un mot alors que vous prépariez votre texte. Pour notre part, au groupe UMP, nous avons, avec Éric Ciotti, Alain Marsaud et Claude Goasguen, beaucoup travaillé sur ces questions et auditionné les juges antiterroristes. Ceux-ci nous ont dit à quel point cela était difficile, face à des gens qui nient : c’est très compliqué, quand on n’a pas de gens sur un théâtre d’opération, pas d’officier de police judiciaire pour regarder qui tue et comment. En ce moment, à Raqqa en Syrie ou dans le nord de l’Irak, il est très compliqué de réunir les éléments constitutifs de l’infraction. C’est difficile là-bas et encore plus ici. S’il s’agit d’ici, monsieur le ministre, l’infraction du loup solitaire, par définition, quand il revient, elle n’a pas encore été commise ; donc vous ne pouvez pas criminaliser quelque chose qui n’a pas encore été commis.

Nous vous proposons donc, dans ces amendements, d’envoyer tout d’abord un signal pédagogique à une partie de notre jeunesse : il est interdit de porter les armes à l’étranger ; c’est le premier point.

Deuxième point, nous vous proposons un système d’incrimination selon lequel toute personne vue sur une vidéo avec une kalachnikov – et Dieu sait qu’il suffit d’aller sur les sites pour voir des Français qui s’exhibent en armes dans des zones de guerre – est susceptible de tomber sur le coup de l’incrimination, dès son retour en France.

Voilà le sens des textes qui vous sont proposés. Il s’agit premièrement d’envoyer un signal et deuxièmement de créer un délit immédiat. Rien n’empêchera, de surcroît, de faire appel aux autres textes qui figurent dans notre droit ou à l’incrimination nouvelle que vous créez.

J’y insiste : l’incrimination d’acte terroriste du loup solitaire s’applique une fois que l’identification a échoué. Mohammed Merah a été interviewé par les services de sécurité, à plusieurs reprises. Ceux-ci ont été incapables de savoir ce qu’il avait fait et encore moins capables de lancer une incrimination contre lui. On ne savait pas.

On ne savait pas davantage pour M. Nemmouche, jusqu’à ce qu’il sorte les armes. Si M. Merah, M. Nemmouche ou leur famille envoient des vidéos sur Facebook où ils s’exhibent en tenue de combat, avec kalachnikov, ils tombent sous le coup de cette interdiction.

Voilà pourquoi cette interdiction a été rédigée : pour faciliter l’incrimination de ces personnes, immédiatement après leur retour, avant qu’elles ne commettent des actes, monsieur le ministre.

Je crois qu’il y a là une vraie différence d’approche entre nous. J’insiste sur ce point : MM. Marsaud, Ciotti ou moi-même sommes là pour vous aider, collectivement, à disposer du texte le plus efficace possible. Or il y a une lacune béante dans votre texte.

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