En ce qui concerne l'Allemagne, et pour ce qui est de l'énergie, le prix en question est un prix de marché et ne peut donc être l'objet de contestation. Quant aux taxes, la nouvelle loi allemande a été votée fin août, début septembre et a reçu un nihil obstat de la Commission européenne ; il n'y aura donc pas de recours sur le sujet. La compensation des coûts de dioxyde de carbone indirect, elle, est de droit européen puisque c'est la Commission qui l'a instaurée. Enfin, un aménagement est certainement en cours sur certaines règles de transport. Mais je ne m'étendrai pas sur ces sujets horriblement techniques. La modalité changera certainement, mais l'impact sera le même. La volonté politique allemande est d'ailleurs de trouver le moyen d'obtenir l'impact recherché. De ce point de vue, le différentiel de compétitivité entre la France et l'Allemagne est durable, de même qu'entre la France et l'Espagne. Au début des années 2000, en France, les tarifs de l'énergie, encore en bonne partie régulés, étaient moins élevés qu'ailleurs et notamment qu'en Allemagne. Dès 2003, nous avons averti que le marché tel qu'il était défini n'était pas viable. Nous n'avons pas été entendus immédiatement. Or, aujourd'hui, la courbe est inversée de façon durable.
Pour ce qui est de la problématique contracyclique, on note en France une forte consommation de gaz et d'électricité en hiver. Une bonne partie de la solution résiderait dans l'établissement d'un vrai transport horo-saisonnalisé qui favoriserait significativement ceux qui coûtent le moins cher au réseau. Or le dimensionnement du réseau n'est pas fonction de la moyenne, mais bien du pic de consommation, les gens qui consomment réellement en base étant donc ceux qui coûtent le moins cher au réseau.
L'UNIDEN n'a jamais pris position sur l'accès à la ressource hydrologique – ressource collective – même si certaines sociétés membres de l'UNIDEN ont beaucoup travaillé sur le sujet à l'occasion de l'élaboration de la première mouture du texte. En revanche, en matière d'optimisation des ressources existantes de la collectivité, une solution commune et de long terme aurait du sens.
En ce qui concerne l'effacement de la consommation des industriels électro-intensifs, les systèmes électriques nous semblent suffisamment bien adaptés pour cette opération, de même que pour le gaz. Les réponses doivent être proportionnées à l'urgence, le dispatching permettant une capacité de réaction instantanée – et rendant par là le plus grand service au réseau. L'accès au système de réserve primaire ou secondaire est possible pour certains industriels dans plusieurs pays en Europe, mais très compliqué en France, même s'il n'est pas impossible technologiquement. L'électricité ne se stocke pas ; il faut donc qu'à tout instant le gestionnaire de réseau – et c'est la principale mission de Réseau de transport d'électricité (RTE) – maintienne l'équilibre sur le réseau en niveau de tension et en fréquence. La réponse à un creux de tension peut prendre un certain temps, alors qu'il faut une réponse instantanée à une perte en fréquence. RTE agit grâce à un système de réserve : la réserve primaire permet de répondre à une perte de fréquence et la réserve secondaire à un creux de tension. Pour cela, les producteurs contribuent et les consommateurs le peuvent également. Un producteur, lorsqu'il contribue à la réserve primaire ou secondaire, est rémunéré 150 000 euros par MW et par an. Un industriel qui participe au mécanisme d'effacement perçoit dix à quinze fois moins. On doit pouvoir trouver une solution intermédiaire.
J'évoquais, dans mon propos liminaire, le récent rapport du Conseil économique pour le développement durable qui rappelle que, pendant les douze dernières années, l'intensité énergétique de l'industrie, à savoir la consommation de MWh par tonne de produits finis, a baissé de 20 % pour la chimie et de 10 % pour la sidérurgie. Nous sommes convaincus de la nécessité d'un progrès continu. Nous nous trouvons dans une configuration asymptotique : l'effort marginal économique étant disproportionné par rapport au gain d'efficacité, nous devons être soutenus, à un moment de crise, pour investir plus. Nous pouvons en tout cas nous réjouir de la capacité de l'industrie française à rester efficace d'un point de vue énergétique, ce qui lui permet de survivre malgré des prix élevés. Mais si, aujourd'hui, nous pouvons poursuivre notre activité sans interruption, nous ne pouvons pas réinvestir à cause d'une énergie trop chère par rapport à celle de nos concurrents.
J'en viens, pour finir, à la taxe carbone. Nous importons des produits de pays qui n'ont pas de coûts CO2. L'instauration d'une taxe aux frontières ne semble pas conforme aux règles du commerce international. Aussi avons-nous le sentiment que l'Europe s'est tirée une balle dans le pied : elle veut entrer dans une logique vertueuse, mais celle-ci la pénalise puisque la mise en place d'un garde-fou serait contraire aux règles du commerce international.