Intervention de Martial Saddier

Réunion du 17 septembre 2014 à 11h00
Commission spéciale pour l'examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartial Saddier, représentant de l'Association des maires de France, AMF :

Je me suis efforcé d'avoir des modèles dans toutes les familles politiques, et vous en faites partie, monsieur le président. (Sourires.)

Tout d'abord, je vous demande de bien vouloir excuser notre président, Jacques Pélissard, qui m'a demandé de le représenter pour vous transmettre les propositions et les remarques de l'AMF, dictées par les principes fondamentaux auxquels nous sommes attachés : ancrage territorial des politiques énergétiques, subsidiarité et péréquation tarifaire nationale, recherche de leviers financiers et techniques pour accompagner et soutenir les actions des collectivités territoriales, expérimentation – à cet égard, nous nous félicitons que le texte ouvre son champ, comme la Constitution le lui permet.

Nous prenons acte de l'identification de la région en tant que force organisatrice globale, tout comme de la reconnaissance du rôle essentiel du bloc local dans la réalisation concrète de la transition énergétique.

Nous avons toutefois des inquiétudes au sujet du caractère inflationniste de certaines mesures dont la complexité pourrait aboutir à des superpositions, à l'extension du champ du recours contentieux et à une augmentation des coûts qui pèsent sur les collectivités territoriales.

Nous invitons, par ailleurs, députés et sénateurs à être attentifs à la responsabilité pénale des élus en matière de qualité de l'air. Il ne faudrait pas que l'État se défausse sur les maires ou les présidents d'intercommunalité en leur laissant assumer la charge de réaliser les objectifs.

Comme d'autres l'ont relevé avant moi, les moyens financiers suscitent également des inquiétudes. Le bouclage financier du projet de loi n'est pas assuré à l'heure où nous parlons, et nous redoutons les incidences que cela pourrait avoir sur le bloc local.

Nous nous préoccupons des effets directs ou indirects de certains dispositifs sur la vie des habitants et des habitantes des collectivités territoriales que nous représentons au même titre que les élus. Je pense notamment à l'interdiction faite aux véhicules les plus polluants de circuler, sachant que ceux qui les utilisent ne le font pas par plaisir mais parce qu'ils n'ont pas le choix. Je déplore l'absence totale de mesures d'accompagnement pour le renouvellement de ce parc comme pour le renouvellement des équipements de chauffage défectueux, qu'il s'agisse des cheminées ouvertes, des chaudières au fioul ou à gaz.

La présidente de l'ANEM a souligné l'absence de mesures consacrées au transport des marchandises, je n'y reviens pas.

Enfin, il me semble utile de rappeler que si tous les territoires sont favorables aux énergies renouvelables, toutes les énergies renouvelables ne sont pas forcément adaptées à tous les territoires. Ainsi, la géothermie profonde est peu compatible avec la présence de réserves importantes d'eau potable. Des précautions s'imposent selon les spécificités de chaque territoire.

J'en viens au détail du texte.

S'agissant de l'article 3, nous sommes défavorables à ce que la loi permette de passer outre les autorisations d'urbanisme délivrées par les collectivités territoriales, communes ou intercommunalités, si la compétence est déléguée.

Nous redoutons que les dispositions des articles 4 et 5, pour des raisons de forme, n'aboutissent par leur superposition à une complexification et à un alourdissement des coûts.

À l'article 9, l'objectif d'inscrire dans la loi une proportion obligatoire de véhicules propres dans les flottes des collectivités publiques est louable, mais il se heurte à plusieurs objections. Tout d'abord, nombre d'entre elles se sont déjà engagées dans le renouvellement de leur parc. Ensuite, il n'est pas sûr qu'il appartienne au législateur d'imposer un tel pourcentage. Enfin, d'un point de vue technique, certains véhicules n'ont pas d'équivalent parmi les véhicules propres.

Concernant la pollution de l'air, si nous prenons acte du retour dans la loi des plans de protection de l'atmosphère, qui avaient été supprimés, nous estimons qu'il y a lieu de clarifier les responsabilités pénales en la matière. L'article 18 appelle, quant à lui, des clarifications, compte tenu des risques de superposition de procédures administratives extrêmement lourdes.

S'agissant des déchets, la volonté d'inscrire dans la loi un pourcentage est une fois de plus louable. Je salue d'ailleurs l'honnêteté de Mme la ministre, qui a reconnu lors de son audition que les objectifs fixés par la loi étaient extrêmement ambitieux et ne seraient pas forcément atteints dans les délais. La vertu pédagogique risque de se heurter à la réalité des faits : financement et moyens posent problème et la filière industrielle pourrait elle-même ne pas être prête. Or, un écart avec les objectifs affichés est toujours délicat en termes de crédibilité. Nous craignons que les élus locaux en soient tenus responsables.

Une mesure en particulier nous inquiète très fortement : l'article 21 prévoit de donner aux éco-organismes la possibilité de sanctionner la gestion des déchets d'une collectivité, ce qui nous paraît tout simplement inacceptable du point de vue tant du bon fonctionnement de ce service que du respect de l'autonomie des collectivités territoriales.

S'agissant de la question cruciale du financement des énergies renouvelables, nous pensons, je le répète, que le texte n'est pas abouti mais nous faisons confiance à la représentation nationale pour apporter les compléments nécessaires.

Si, aux articles 26 et 27, nous saluons la possibilité offerte au bloc local de participer au capital des sociétés anonymes, nous souhaitons que le décret prévu ne réserve pas aux plus grandes des collectivités territoriales, c'est-à-dire aux régions, la possibilité de participer au capital des sociétés d'économie mixte.

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