Intervention de Daniel Fasquelle

Réunion du 17 septembre 2014 à 9h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Fasquelle, rapporteur pour information au nom de la commission des affaires économiques :

Je tiens à rendre hommage à Mme Éricka Bareigts, qui a accompli l'essentiel du travail sur ce rapport d'information.

Trois facteurs concourent à faire des outre-mer un territoire privilégié de la transition énergétique.

Les spécificités de l'approvisionnement de ces territoires en énergie constituent un premier facteur. En effet, cet approvisionnement n'est ni sécurisé ni garanti à tous les citoyens.

Tous les territoires d'outre-mer comptent plus de 80 % d'énergies fossiles dans leur mix énergétique primaire – les deux cas les plus extrêmes étant la Guyane avec 82 % d'énergies fossiles, et Mayotte avec 99 %. Contrairement à la France métropolitaine, où le nucléaire représente 75 % du mix électrique, les produits pétroliers et le charbon constituent en outre-mer la principale source de production d'électricité. Cette situation fragilise ces territoires en les rendant dépendants d'un approvisionnement extérieur, et en les exposant à une hausse du prix des produits pétroliers.

Les outre-mer font également face à une qualité dégradée de l'alimentation électrique, liée à des contraintes physiques spécifiques mais aussi à un réseau moins dense qu'en métropole. Le temps moyen de coupure annuel en témoigne : entre 2008 et 2013, il était d'environ quatre-vingts minutes en métropole, contre deux cent cinquante à La Réunion, trois cent vingt en Guyane, cinq cent cinquante en Guadeloupe et sept cents à la Martinique. En matière de qualité de l'électricité, il existe un fossé entre les outre-mer et l'Hexagone. La mission d'information en a d'ailleurs fait l'expérience directe, puisque la Martinique a connu un black-out le jour même de notre arrivée à Fort-de-France.

La situation est particulièrement grave dans les communes de l'intérieur de la Guyane, car 80 000 citoyens français habitant le long des deux fleuves frontaliers ne peuvent pas être raccordés au réseau. Les habitants des bourgs-centres sont alimentés en électricité par des micro-centrales thermiques incapables de répondre à des demandes trop fortes, ce qui rend impossible le développement d'une activité économique sur place et l'acquisition par les ménages d'équipements de confort standard. Le fonctionnement de ces micro-centrales assuré par EDF coûte très cher. Quant aux habitants des « écarts », groupements d'habitations dispersés le long des deux fleuves frontaliers, ils doivent prendre en charge eux-mêmes la production d'électricité en achetant à des prix élevés des groupes électrogènes et le carburant nécessaire. La situation, déjà critique, devrait s'aggraver dans les prochaines années sous l'effet d'une croissance démographique annuelle de l'ordre de 10 %. Près de 250 000 de nos concitoyens risquent d'ici à quelques années d'être privés d'un accès normal à l'électricité.

Un deuxième facteur justifie l'importance de la transition énergétique dans les outre-mer : le mix électrique de ces départements et régions est très carboné, malgré des gisements renouvelables importants et des acteurs locaux dynamiques La production électrique dans les outre-mer est fortement émettrice de gaz à effet de serre en raison du poids des produits pétroliers et du charbon. En 2011, les émissions de CO2 issues de la production électrique étaient de 90 grammes de CO2 par kilowattheure en France métropolitaine et, en moyenne, de 340 grammes en Europe. Si, en Guyane, ces émissions se situent légèrement au-dessus de cette moyenne, à 360 grammesKWh grâce au fonctionnement du barrage de Petit-Saut, elles la dépassent très largement dans les autres territoires : 670 grammes à la Martinique, 680 à Mayotte, 750 à La Réunion, et 800 en Guadeloupe. Dans ces deux derniers territoires, la production à base de charbon explique ces chiffres très élevés.

Pourtant, les gisements d'énergies renouvelables représentent un potentiel important et diversifié. Toutes les filières sont présentes : hydroélectricité, éolien, photovoltaïque, géothermie, biomasse. Plusieurs filières d'avenir pourraient également trouver un terrain de développement privilégié dans les outre-mer, comme le sea water air conditioning (SWAC) à La Réunion. Leur développement repose sur l'implantation d'acteurs spécialisés et dynamiques, qui pourraient exporter leurs procédés sur des territoires aux caractéristiques similaires. Les territoires insulaires tropicaux d'Asie du Sud-Est ou de la Caraïbe représentent un marché porteur de plusieurs centaines de millions de consommateurs.

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