Intervention de Dominique Olivier

Réunion du 17 septembre 2014 à 18h00
Commission spéciale pour l'examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte

Dominique Olivier, secrétaire confédéral de la Confédération française démocratique du travail, CFDT :

S'agissant des concessions, le schéma envisagé ne répond pas à tous les problèmes posés. Même si la méthode des barycentres protège de nombreux ouvrages, une telle protection ne serait pas définitive, puisque des opérateurs européens sont prêts à « acheter » des vallées entières. Quant à la taille adéquate des SEM, à la limite, si l'on créait une grosse SEM englobant toutes les vallées, cela permettrait d'associer l'opérateur historique, un investisseur public et les collectivités territoriales dans lesquelles sont implantés les ouvrages concernés. Cette solution n'est cependant pas en discussion. Si l'on abandonne ce qui est envisagé aujourd'hui, c'est parce que c'est insatisfaisant pour les métiers de l'ingénierie et de la recherche. On ouvre seulement une concertation afin de rechercher une solution optimale.

En ce qui concerne les zones non interconnectées et l'outre-mer, nous les considérons comme une omission flagrante du projet de loi. On semble dire aux territoires concernés qu'ils doivent faire pour le mieux et qu'ils bénéficieront peut-être de quelques mesures dérogatoires. Or les besoins de ces territoires sont considérables et ont des incidences sociales importantes. Face à ces besoins, le potentiel en EnR est considérable. Il est donc aberrant de brûler du gasoil ou du pétrole pour produire de l'électricité dans des territoires où la mer, le soleil et le vent ne manquent pas. Le projet de loi pèche par manque de soutien à ces territoires.

La question des sous-traitants et des prestataires du nucléaire représente effectivement une difficulté. Dès que seront annoncés l'arrêt d'une centrale et la préparation de son démantèlement, les gens concernés disparaîtront, car ils seront soucieux de se recycler sans tarder. Mais, lorsqu'ils rencontreront des difficultés de reconversion, ils ne pourront pas faire valoir qu'ils ont été victimes de la fermeture d'une centrale. Nous n'avons donc pas de réponse évidente à vous fournir sur le sujet. Chaque fois que des contraintes s'imposeront à des secteurs donnés – qu'il s'agisse de budgets carbone, de décisions de fermeture de centrales ou de baisse de la production pétrolière –, il faudra assurer un traitement de proximité de ces personnels et préparer leur reconversion professionnelle. Il faudra donc prévoir des lieux d'accueil appropriés, sachant que les maisons de l'emploi sont très hétérogènes et qu'elles ne couvrent pas tout le territoire.

Nous sommes favorables à la participation des collectivités territoriales et des citoyens à la gouvernance. La proposition de Mme Duflot consistant à y ajouter les salariés est intéressante. L'économie sociale et solidaire peut dans ce cas constituer une solution possible. Le statut de coopérative en est une autre, de même que la prise de participations au capital d'une société anonyme de production d'énergie renouvelable. La participation de ces acteurs est de nature à faire baisser les tensions lorsque des projets importants sont prévus.

Nous revendiquons depuis plusieurs années déjà que l'assiette de la CSPE englobe l'énergie dans son ensemble et non la seule électricité. Cela permet en effet de répartir la charge de cette contribution de manière plus équitable. De plus, de nombreuses sources d'énergie ont aujourd'hui des équivalents. Il est possible que cet élargissement complique le mode de gestion de cette contribution, mais certains spécialistes savent résoudre ce type de problèmes.

Nous sommes sceptiques à l'égard de la notion de tonne de carbone évité, car elle ne permettrait de prendre en compte qu'une partie de la question, alors que les gains d'efficacité énergétique produisent d'autres effets – notamment sanitaires et sur le plan de la sécurité. Enfin, la tonne de carbone ne valant plus rien aujourd'hui, il conviendrait d'abord d'en fixer le prix plancher – au niveau français ou européen – et de viser à atteindre en 2030 la valeur tutélaire de 100 euros la tonne.

En l'état actuel des connaissances et des modes d'extraction, il ne nous paraît pas souhaitable de développer l'exploitation des gaz de schiste. Cela étant, nous sommes par principe favorables à la production de connaissances et au développement de la recherche. Cela vaut non seulement pour les gaz de schiste, mais aussi pour la totalité du sous-sol, minéraux inclus. À l'heure actuelle, nous ne connaissons pas un dixième du potentiel de nos sous-sols. Le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) pourrait retrouver là une activité utile. Ce développement de la recherche doit être le fait d'entités publiques afin que, si l'on trouve quelque chose, seule la puissance publique puisse vendre ces données.

Nous sommes plutôt favorables à un accroissement de l'autonomie d'ERDF, mais avec des réserves : pour nous, l'objectif serait surtout de faire en sorte que sa capacité d'investissement soit restaurée. Il ressort selon nous de certaines de ses dispositions que le projet de loi vise à mieux intégrer les coûts d'investissement, notamment dans le TURPE ou dans le coût de l'électricité, en remplaçant les tarifs réglementés par une notion beaucoup plus économique que comptable.

Nous sommes également plutôt favorables au plafonnement de la puissance nucléaire, point de départ si l'on souhaite faire baisser la part de l'électricité d'origine nucléaire. Cela correspond à une position ancienne de la CFDT qui, depuis 40 ans, est contre le tout nucléaire. Cette énergie a cependant encore une utilité, pour peu que ses conditions de sécurité et de sûreté soient garanties au mieux. En cela, les progrès de l'ASN sont encourageants. Nous disposons d'ailleurs sans doute de la meilleure autorité de sûreté au monde. Il nous faut poursuivre dans cette voie pour sécuriser nos installations. C'est pourquoi j'ai posé la question du dépassement des quarante ans et ai évoqué la nécessité d'appliquer une procédure de gouvernance citoyenne – la référence en la matière étant pour nous la convention d'Aarhus.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion